Cette semaine est la reprise des cours, reprise particulière car rythmée par la grève des enseignants-chercheurs. Si d'un côté j'ai du mal à m'empêcher de penser qu'ils font chier à faire grève et ne pas dispenser de cours, d'un autre côté je ne peux que soutenir leur mouvement et initiative. Jusqu'à lundi je ne savais vraiment pas du tout pourquoi mes profs n'étaient pas contents, a vrai dire j'en avais un peu rien à battre (pour plusieurs raisons, dont la principale est d'éviter l'état colérique et dépressif qu'engendre tout intérêt à l'actualité). Bref, depuis lund certains cours ont lieu, les profs s'étant mis au point sur le principe d'une grève active, c'est à dire en se rendant en cours et en établissant un dialogue avec les élèves, chaque prof sa méthode, normal. Lundi mon premier cours était celui de cinéma (que j'ai finalement plus, grâce à une équivalence) le prof nous a expliqué pourquoi lui individuellement faisait grève. Outre le fait que son intervention était instructive, je suis sortie de l'amphi avec encore une certaine perplexité, dû en grande partie par les interventions d'étudiants grévistes, qui malgré les années et les différentes promotions sortent toujours le même type de discours à la fois juste sur certains points, approximatifs sur de nombreux autres et réthoriquement formaté.
Aujourd'hui a eu lieu mon second cours, histoire de la photographie, autre prof autre approche. Cette fois-ci le prof nous a concoté un diaporama powerpoint reprenant les débuts de la grève, soit des faits remontant à décembre, avec des illustrations photographiques des différentes actions (assemblée générale et manifestations) et des extraits des décrets problématiques ainsi que des décisions prises lors des assemblée générale. Autant dire que c'était bein plus structuré que l'argumentaire de mon prof de cinéma, et force est de constater que cela a considérablement clarifié mon esprit sur le pourquoi du comment de cette grève. Sans rentrer dans les détails la réforme visant le statut des enseignements chercheurs (qu'il faudrait aussi expliquer), et au-delà de l'université, confine à l'absurde et plonge le monde de l'enseignement supérieur dans un potentiel devenir Kafkaien, où des personnes n'y connaissant pas grande chose seront là pour évaluer, juger de la validité et de la pertinence d'un sujet de recherche mais pire encore seront là pour dire quoi enseigner. C'est comme si un biologiste jugeait de la qualité d'un travail d'historien d'art, et qu'un cadre issu d'une grande école de commerce, comme HEC, décidait du contenu de l'enseignement en philosophie, c'est certes caricaturale mais les réformes tendent vers une gestion de ce type, kafkaienne il n'y a pas d'autres mots.
Je ne dis pas que le système est parfait, d'ailleurs ces deux professeurs sont tout à fait ouvert à une rediscussion de la réforme conscient des limites et problèmes du système universitaire français, néanmoins il fonctionne tant bien que mal et malgré tout l'enseignement supérieur français reste valorisé à l'étranger. Je ne dis pas qu'il faut rester dans ce système non plus, bien au contraire il a besoin d'être modernisé et assouplis, de permettre des enseignements croisés favorisant le développement de recherches nouvelles, un système permettant d'articuler approche globale et spécifique, permettant à la fois une orientation vers la recherche et l'entreprise, sans pour autant que cette dernière n'impose à l'université ce qu'il convient d'enseigner. Pour cela il faudrait dégager le débat des intérêts particuliers, et là j'avoue on est mal barrés. Quoiqu'il en soit, en tant qu'étudiante en sciences humaines et amoureuse des sciences humaines je ne peux qu'adhérer et être solidaire des professeurs, qui même s'ils défendent un point de vue catégoriel, n'en défendent pas moins une certaine idée de l'enseignement et de la recherche non assujetti aux exigences de rentabilités de la sphère économique. Ces réformes sont clairement une menace pour ce que notre cher président considère comme des enseignements déprouvue de rentabilité économique et donc inutile et qu'il faudrait rationaliser comme les marchés financiers l'ont été..
Cela dit chaque professeur a sa manière de rebondir et le professeur de ce matin a une idée vraiment sympa, dans la mesure où, si le mouvement de grève dure, il compte recadrer le cours sur la représentation photographique des luttes sociales depuis l'invention de la photogrpahie, soit une optique à la fois politique et esthétique, limite rien que pour ça j'aimerais assez que la grève des profs continue.
Edit : voici quelques points très clairement expliqué
http://coffeehome.unblog.fr/2009/02/01/harvard-en-poitou-charentes/ Merci Albin!