Original - Et ne jamais monter plus haut - Extra (ligne double)
Titre : Et ne jamais monter plus haut
Auteur : anadyomede
Thème : Accident + Accident d'avion
Fandom : Original
Personnages : Ella, sa mère.
Rating : PG
Disclaimer : Tout m'appartient.
L’autre jour, Ella est venue s’asseoir à côté de moi. Elle a relevé sa frange à l’aide d’une petite pince rougeoyante dotée d’un ours qui sourit au bout, il est immonde, immonde, je pense, avec ce nœud papillon rose à l’oreille, avec ces petites dents très blanches qui sortent ; et Ella m’a demandée :
« Est-ce qu’on meurt longtemps ? »
Je l’ai regardée.
Depuis quelques jours, elle bouge tout le temps. Son lit est défait jour et nuit, personne ne le range. Le mien est froid. Le mien est glacé. Je n’ose plus me mettre dedans. Elle s’en est rendue compte, je crois. J’ai sa voix qui me suit lorsque je sors, lorsque je dors, j’ai ses grands yeux posés sur mon corps. Est-ce que ça s’arrêtera ? Ma mère m’a dit que non. Ou alors dans très longtemps. Elle m’a dit : « Je prends la petite à la maison » mais Ella n’a pas voulu partir. Elle s’est accrochée à mes bras et elle a hurlé tellement fort qu’on a fini par la laisser là et moi, grand chêne, j’ai arrêté de respirer jusqu’à ce qu’on me libère.
Elle est jolie, encore. Je me demande si elle durera, cette blancheur sur sa peau, ce blond dans les cheveux et puis surtout, ce petit fond d’espoir qui hante, qui semble venir d’un endroit très loin que je ne reconnais pas.
Comme je n’ai pas répondu, elle a répété sa question.
« Je ne sais pas, ai-je dit.
- Pourquoi ?
- Tais-toi. »
Ella a huit ans. Elle s’en va.
*
« Et maintenant ? » a-t-elle murmuré.
Je ferme les yeux. Sa main se pose sur ma joue et je sens ses jambes chercher les miennes. Elles tirent sur la couverture. Tout reste froid.
« Tu ne crois pas que c’est suffisant ? »
Je dis non.
« L’avion s’est écrasé, dit-elle. Et puis après ?
- Après il est mort.
- Ce sont des choses qui arrivent.
- Non, c’est faux.
- Maman…
- Je te dis que les choses ne se passent pas ainsi. Quand on monte dans un avion, il y a un jour où on en redescend.
- Et il est revenu sur terre, Maman. Sauf qu’il n’est pas revenu vivant. »
Je ne lève pas la tête. Je lui dit juste : « tu mens », et je l’entend qui respire, ce n’est plus comme avant. Je crois qu’elle a vieilli, que je ne l’ai pas vue grandir mais je n’arrive pas à me rappeler du moment où elle a pris toutes ces années.
J’ai toujours sous les paupières la même image qui danse et chante. C’est quand il a fait sa valise. C’est quand on a fait l’amour et qu’ensuite, il a fallu tout plier très vite parce que l’avion allait partir, parce que c’était un voyage important, oui, qu’il y aurait sûrement une promotion. Et puis c’est moi qui conduisait jusqu’à l’aéroport, et puis j’avais bien attaché Ella à l’arrière, elle demandait : « tu rentres bientôt, tu promets, tu rentres bientôt, et je pourrais avoir un cadeau, un très grand cadeau, plus haut que l’univers, s’il te plaît, tu promets ? ».
Elle a dix-huit ans. Elle me dit :
« On ne peut pas reprocher toute sa vie à quelqu’un d’être mort. »
Mais je pense qu’elle a tort.
Auteur : anadyomede
Thème : Accident + Accident d'avion
Fandom : Original
Personnages : Ella, sa mère.
Rating : PG
Disclaimer : Tout m'appartient.
L’autre jour, Ella est venue s’asseoir à côté de moi. Elle a relevé sa frange à l’aide d’une petite pince rougeoyante dotée d’un ours qui sourit au bout, il est immonde, immonde, je pense, avec ce nœud papillon rose à l’oreille, avec ces petites dents très blanches qui sortent ; et Ella m’a demandée :
« Est-ce qu’on meurt longtemps ? »
Je l’ai regardée.
Depuis quelques jours, elle bouge tout le temps. Son lit est défait jour et nuit, personne ne le range. Le mien est froid. Le mien est glacé. Je n’ose plus me mettre dedans. Elle s’en est rendue compte, je crois. J’ai sa voix qui me suit lorsque je sors, lorsque je dors, j’ai ses grands yeux posés sur mon corps. Est-ce que ça s’arrêtera ? Ma mère m’a dit que non. Ou alors dans très longtemps. Elle m’a dit : « Je prends la petite à la maison » mais Ella n’a pas voulu partir. Elle s’est accrochée à mes bras et elle a hurlé tellement fort qu’on a fini par la laisser là et moi, grand chêne, j’ai arrêté de respirer jusqu’à ce qu’on me libère.
Elle est jolie, encore. Je me demande si elle durera, cette blancheur sur sa peau, ce blond dans les cheveux et puis surtout, ce petit fond d’espoir qui hante, qui semble venir d’un endroit très loin que je ne reconnais pas.
Comme je n’ai pas répondu, elle a répété sa question.
« Je ne sais pas, ai-je dit.
- Pourquoi ?
- Tais-toi. »
Ella a huit ans. Elle s’en va.
*
« Et maintenant ? » a-t-elle murmuré.
Je ferme les yeux. Sa main se pose sur ma joue et je sens ses jambes chercher les miennes. Elles tirent sur la couverture. Tout reste froid.
« Tu ne crois pas que c’est suffisant ? »
Je dis non.
« L’avion s’est écrasé, dit-elle. Et puis après ?
- Après il est mort.
- Ce sont des choses qui arrivent.
- Non, c’est faux.
- Maman…
- Je te dis que les choses ne se passent pas ainsi. Quand on monte dans un avion, il y a un jour où on en redescend.
- Et il est revenu sur terre, Maman. Sauf qu’il n’est pas revenu vivant. »
Je ne lève pas la tête. Je lui dit juste : « tu mens », et je l’entend qui respire, ce n’est plus comme avant. Je crois qu’elle a vieilli, que je ne l’ai pas vue grandir mais je n’arrive pas à me rappeler du moment où elle a pris toutes ces années.
J’ai toujours sous les paupières la même image qui danse et chante. C’est quand il a fait sa valise. C’est quand on a fait l’amour et qu’ensuite, il a fallu tout plier très vite parce que l’avion allait partir, parce que c’était un voyage important, oui, qu’il y aurait sûrement une promotion. Et puis c’est moi qui conduisait jusqu’à l’aéroport, et puis j’avais bien attaché Ella à l’arrière, elle demandait : « tu rentres bientôt, tu promets, tu rentres bientôt, et je pourrais avoir un cadeau, un très grand cadeau, plus haut que l’univers, s’il te plaît, tu promets ? ».
Elle a dix-huit ans. Elle me dit :
« On ne peut pas reprocher toute sa vie à quelqu’un d’être mort. »
Mais je pense qu’elle a tort.