la Dame sans Merci - défi Décembre, troisième manche

Jan 02, 2011 04:02

Titre: la Dame sans Merci
Base: folklore anglais + poème de Keats
Personnage(s)/couple(s): Chevalier Errant/ Dame sans Merci
Rating:G
Warning: beaucoup d'implicite?
Genre: angst, comme d’hab, relecture de la légende avec inspirations du poème



Lorsqu’Elle le rencontra, le sang coulait encore du fil de son épée. Elle apparut là, simplement dans la brume du matin, et le regarda. Quel spectacle pouvait donc bien offrir un chevalier au sortir d’un combat ? Il gisait  assis contre un vieux chêne, la respiration sifflante. Ses ennemis l’avaient surpris sans qu’il n’ait pu mettre son armure, malgré tout il les avait défaits. La Belle s’avança, les yeux tristes et le regard lointain. Il ne la connaissait pas. Il ne connaissait aucune femme, lui le chevalier ayant fait vœu de chasteté. L’homme voyait les larmes sur les joues pâles. Etait-ce pour un amant que pleurait cette femme au visage de vierge, elle qui semblait trop pure pour subir le regard des hommes ?

La Dame ne dit mot, l’homme se leva et s’avança. Au pied de l’arbre, il laissa son épée…

Dans les yeux sombres, rien ne se reflétait. Le chevalier les regarda, il ne savait leur couleur, il ne savait rien. Muet lui aussi, il mena la Belle jusqu’à son cheval. Dans l’obscurité du sous-bois, la robe de l’animal lui parut bien plus sombre que d’ordinaire.

La femme se laissa porter, elle pesait à peine plus lourd qu’un oiseau chétif. Les mains aux longs doigts vinrent se perdre dans la crinière du destrier. Elle garda son silence alors que le poids du chevalier s’ajouta au sien sur le dos du cheval. Les larmes continuaient de couler sur les joues diaphanes, rien ne pouvait les arrêter. L’homme pensa au sang sur son épée, lui non plus n’avait put se tarir…

Ils ne trottaient pas, ne galopaient pas… Non, c’est sous la marche fataliste de leur monture que le brouillard les enveloppa. Alors les heures se confondirent avec les minutes et le jour même perdit de sa signification. Il ne restait plus que les longs sanglots silencieux de la jeune femme pour meubler leur univers…

Cette marche de douleur les amena à gravir une montagne, la nuit les surprit près d’un gouffre en amont. Alors tel serait leur lit pour ce soir… 
Ils mirent pied à terre, la Belle regarda le chevalier et, pour la première fois, l’homme vit quelque chose se refléter dans le gouffre de ses yeux. Elle resta immobile un instant, puis se détourna de lui. L’herbe elle-même n’osait se ployer sous les pieds nus, bien trop légers pour être humains.

Le chevalier s’allongea. Rois et princes vinrent hanter ses rêves. Il ne savait leurs noms, il ne savait leurs visages, mais la pâleur de leurs visages le fit frémir. Peu importe leurs âges, jeunes comme vieux, des rides de sagesses faisaient tenir les couronnes sur leurs fronts soucieux.

« Malheur, malheur à toi ! Tes vœux sont brisés, la Dame sans Merci t’a emporté… »

Au matin, le chevalier se réveilla. Seul.
Le brouillard était plus dense désormais tout autour de lui, il leva les yeux au ciel. Des corbeaux croassaient, il ne pouvait les voir. Et un mot, un seul, sortait de leur bec :

« Maudit, maudit, maudit ! »

Parjure à son nom, parjure à son serment : tel était l’homme sans épée… Depuis les limbes obscures, une fée avait marché à sa rencontre, le menant à la punition méritée selon les lois de Dieu.

La montagne de la veille se dressait à nouveau devant lui. Voilà ce qu’on lui offrait désormais pour tout royaume, voilà où errerait le chevalier jusqu’à ce que le brouillard se lève, dans ce pays où jamais il ne le faisait.

Chevalier, tes vœux sont brisés, te souviens-tu ? Te souviens tu de l’épée que tu levas pour assassiner ton roi ? Tu ne l’as plus à présent. De ton crime il ne reste rien qu’un royaume sans monarque et qu’une reine sans mari. Maudit, deux fois maudits, cela ne fut pas ton seul péché…

Car combien de fois pensas-tu à embrasser la Belle Dame sans Merci ? Ton corps souillé ne pouvait être sauvé, mais ton esprit aurait put retourner vers Dieu. Hélas, trois fois hélas, impur tu étais jusque dans la moindre de tes pensées, cela brisa ton voeu de Chasteté.

Maudit, trois fois maudit, toi qui voulais croire en l’oubli.

Maudit, trois fois maudit par la Dame sans Merci.

La Mort ne t’accueillera pas, chevalier, jamais. Toi qui n’est plus de ce monde, il te faut errer. Errer jusqu’au Jugement Dernier, mais n’espère pas voir tes péchés pardonnés…

Car les larmes que versa la Dame sans Merci n’étaient pas dictées par la tristesse, non. Ce qui coulait sur ses joues avait l’amer du sang et le tranchant de l’épée. Ce qui coulait sur ses joues était un chagrin de haine pour le parjuré…

défi : décembre, auteur : nephty_s, yggdrasil

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