On a tous une série à laquelle on est particulièrement attaché. En ce qui me concerne, j'ai pas mal de séries préférées, mais je crois que si je ne devais en garder qu'une, sentimentalement parlant, ce serait Party of Five, "La Vie à Cinq" en français. Ce n'est pas la première série que j'ai suivie assidument, ce n'est pas non plus celle que j'ai le plus vue, mais c'est la seule à laquelle j'étais assez attachée pour en enregistrer les 6 saisons sur des VHS. Un tout petit peu plus tard j'ai aussi enregistré l'intégrale de Once & Again en VHS, c'est ma 2ème "Série-Doudou". Et c'est en partie à cause de ces 2 séries, qui ne sont que partiellement sortie en DVD (et encore, en zone 1 uniquement pour la 2ème) que j'ai toujours un carton de VHS et un magnétoscope dans mon salon. Je ne peux pas me résoudre à les jeter tant que je n'ai pas les coffrets DVD à la maison. Je me revois encore partir en courant à la sortie du lycée pour ne pas rater l'épisode de 18h10 sur Téva.
La Vie à Cinq a été malmenée par les diffusions françaises et par certaines critiques. M6 n'a jamais terminé la diffusion, Téva a pris le relais à une époque où le câble était assez minoritaire dans les foyers. Seules les 2 premières saisons sont sorties en DVD français sur le tard, et ça s'est arrêté là, faute d'acheteurs. Lors de ses 2 premières saisons, elle a frôlé l'annulation plusieurs fois, jusqu'à ce qu'on lui décerne un Golden Globe. Elle est connue pour être la série larmoyante, les enfants à qui il arrive un nombre de catastrophes incroyables. C'est vrai que les frères et sœurs Salinger, c'est pas Cerise de Groupama, ni la famille Jaidlachance. Et je ne vais pas non plus vous faire croire que cette série ne donnait jamais envie de pleurer, non, je suis même à peu près certaine que les quatre acteurs principaux ont été choisis parce qu'ils savaient très bien pleurer.
Je crois que la première qualité de cette série c'était le réalisme. Non je ne me moque pas de vous, je ne parle pas de l'accumulation de catastrophes qui leur tombent sur le coin de la figure en six saisons. Je parle d'une famille. Dès le pilote, on croit à ces frères et sœurs, à leur dynamique, à leurs ennuis. Et pas seulement parce qu'ils ont tous la même couleur de cheveux, non ils ont su créer cette alchimie parfaite. Un petit pitch rapide pour ceux qui ne savent pas de quoi je parle. Les parents Salinger sont morts dans un accident de voiture 6 mois avant le pilote. Six mois c'est bien, c'est assez pour qu'ils ne soient pas tous au bord des larmes à chaque épisode et qu'ils aient déjà trouvé un mode de fonctionnement sans les parents, mais ce n'est pas trop pour qu'ils soient encore en train de s'ajuster. Il reste 5 enfants. Charlie, 24 ans, le
Matthew Fox qui fera Jack dans "Lost", est un très jeune adulte qui a abandonné la fac et les responsabilités et se retrouve tuteur des 4 plus jeunes, obligé de revenir à la maison et d'endosser le rôle de l'adulte; autant vous dire qu'il le fait à contrecœur et plutôt mal au début. Bailey 16 ans,
Scott Wolf, plutôt mature pour son âge prend les rênes, il gère le tableau de garde du bébé, le contenu du frigo, les factures à payer et les devoirs de sa petite sœur, mais franchement il aimerait bien que Charlie le seconde un minimum pour faire des trucs de son âge. Julia, 15 ans,
Neve Campbell, "Sydney Prescott" de Scream, était l'adolescente parfaite, des A dans toutes les matières, responsable, mais tout à coup le fait de ne plus avoir personne pour lui dire à quelle heure rentrer le soir la plonge dans la crise d'adolescence, elle sort avec les mauvais garçons, se fait des amis pas très nets, et se met à bosser dans un bar pour se faire de l'argent à l'insu de ses frères. Claudia, 11 ans,
Lacey Chabert, est la petite soeur violoniste au caractère bien trempé, c'est elle qui remet ses aînés à leur place en leur rappelant qu'elle a besoin d'eux et qu'ils font n'importe quoi, la petite conscience de la famille. Et puis Owen, le bébé, dont le rôle est plutôt fédérateur, quand les temps sont durs ils doivent rester une famille, au moins pour lui. Tout ceci définit à peu près les enjeux de la première saison, Charlie n'arrive pas à se mettre dans son rôle de parent, Julia fait n'importe quoi, et les services sociaux planent au dessus de la famille, s'ils craignent que Claudia et Owen manquent de quoi que ce soit, on leur enlèvera. Et la famille c'est tout ce qu'ils ont, même si le torchon brûle souvent. Franchement ils s'engueulent énormément, mais après tout c'est plutôt crédible, Charlie essaie de se faire figure d'autorité, et si ça marche pas mal avec Claudia, Julia et Bailey ont eux plus mal à trouver ça légitime. Alors oui, ça crie beaucoup, mais ça débouche souvent sur une scène de réconciliation pleine de justesse entre 2 membres de la famille. Les dialogues sont bien écrits, et les membres de la fratrie ont tous une relation différente les uns avec les autres. Charlie est très paternel avec Claudia, mais plus sur un pied d'égalité avec Julia et Bailey, il ne sait pas comment faire, personne ne sait quoi dire quand Julia se fait larguer par son premier petit-ami, à part "on t'avait prévenue, c'était pas un gars pour toi", personne pour la réconforter, pourtant il trouvera les mots avec Bailey quand sa petite-amie mourra d'une overdose quelques mois après. Charlie est maladroit avec Julia, dans les situations de crise comme lorsqu'elle fait sa fausse-couche, il le dit, il regrette que leur mère ne soit plus là, il n'a pas les mots. Julia est la figure maternelle, réconfortante, toujours là dans les moments difficiles, pour apprendre à Charlie à danser avant son mariage, pour lui nouer son nœud-papillon, là pour Claudia qui découvre la puberté, pour lui dire que ça ne va pas être simple et qu'elle-même est encore en train de se débattre dedans. Mais elle passe son temps à se chamailler avec Bailey, comme un frère et une soeur qui n'ont qu'un an d'écart. Bailey est le seul à se placer du côté de Charlie après son mariage annulé, quand tout le monde lui en veut "You're probably gonna hear that from a lot of people, so you don't need to hear it from me. I don't always get you Charlie, sometimes you do things... But you know what ? i'm gonna love you anyway. Because you're my brother, and I think you could use someone on your side. So that's me, I'm on your side." Franchement, c'était super bien écrit !
La plupart des épisodes ne traitaient pas de grands thèmes qui faisaient pleurer, juste de la vie de tous les jours de ces 4 Salinger, des histoires d'amour compliquées de Charlie avec Kirsten, du restaurant de leur père qu'il fallait reprendre, des études de Bailey ou Julia, du violon de Claudia. Le fait qu'ils étaient orphelins était forcément très présent, parce que quand Bailey voulait lâcher le lycée, il n'y avait personne pour lui dire non, quand Charlie voulait trouver quoi faire de sa vie, il se retrouvait coincé avec le restau de son père que personne ne voulait vendre. Et puis il y avait quelques épisodes pivots magnifiques dont on se souvient. Le premier, celui de Thanksgiving, quand Alcott, le type qui a tué leurs parents dans un accident, est relâché de prison, est un épisode fort en émotions. Il montre les réactions différentes des 4 Salinger. Charlie qui culpabilise car il devait baby-sitter Claudia et Owen le soir de l'accident et qu'il est arrivé en retard, s'il avait été à l'heure, les parents n'auraient pas été sur la route à ce moment. Il décide qu'ils ne doivent pas accepter de rencontrer cet homme qui veut s'excuser. Mais finalement chacun ira de son côté. Charlie pour se débarrasser de sa culpabilité, Bailey très en colère qui veut le faire souffrir comme il a souffert, Julia qui veut lui pardonner, et Claudia qui veut juste voir à quoi il ressemble. Julia à Alcott "The only thing I can do for you is tell you that we're going to be OK. My siblings and I. We're going to be OK.". Alcott à Charlie : "Let me do one good thing in this whole situation and tell you the truth. You're the hero in this story, Son." Et puis il y a eu l'épisode où l'assistante sociale débarque alors que personne ne sait chez quelle copine est Claudia, et que Julia 15 ans travaille dans un bar interdit aux moins de 18 ans, tous les éléments jouent en leur défaveur et on va placer Claudia et Owen. Mais c'est finalement Claudia qui sauvera la situation en allant parler à l'assistante sociale : "What about all the things we do right? Like the fact that Bailey gets up in the middle of the night, every night, for Owen? I mean, he's 16 and on Friday nights, he babysits! Julia trims my bangs, and she doesn't let me watch movies on cable, and Charlie has this rule about eating vegetables for dinner...and Bailey took my class on a field trip to the planetarium with, like, 3 other mothers!", et l'épisode se clôt sur Owen qui fait ses premiers pas. Dans la deuxième saison, il y a l'épisode du mariage de Charlie et Kirsten qui n'aura pas lieu, dans la saison 3 c'est "Intervention" quand la famille confronte Bailey pour l'envoyer chez les alcooliques anonymes, et ce monologue heartbreaking de Claudia "I can't take this, Bailey. You can't do this anymore. I mean it. That's it. I will not stand by and let you slowly kill yourself by drinking to death. If you don't get help, I don't wanna see you. You can't talk to me, and you can't talk to Owen, and you can't come over to the house, and I'm not gonna come see you and I'm not gonna call you and I'm not even gonna think about you. I love you. More than anyone else. I love you the best. You know that. This is the only thing I have that I can take away from you. To make you stop. Either you get help right now, or get outta here!" Et on regarde Bailey sortir de la maison sans un regard en arrière... Je pense aussi à la dernière saison, l'épisode où Charlie et Kirsten se marient enfin, et le toast de Charlie qui résume les 5 saisons passées : "A lot of you worried when they left that maybe things wouldn't turn out alright, that maybe we'd learn the wrong lessons from losing them, that we'd be so scared from losing them that we'd never attach ourselves to anything again, including each other. I can't speak for everyone, but I know what I learned. When something is important to you, you grab on with both hands and you don't even think about letting go. Letting go is not even an option. So, I don't know what's next for us after this, but I know that I don't have to worry. Because my parents left me the secret to life. Mom and Dad, we never let go. And I don't believe we ever will." Il y a eu tellement de lignes de dialogues qui m'ont été droit au coeur dans cette série, je ne peux pas toutes les citer, la discussion entre Bailey et Charlie dans la jardin après la mort de Jill, celle de Charlie et Julia dans sa chambre après sa fausse-couche, ou tout ce que j'aurais envie de citer du dernier épisode...
Bien sûr on a critiqué l'accumulation des déboires de cette famille, et c'est vrai, la perte de leurs parents, la grossesse de Julia, l'alcoolisme de Bailey, le cancer de Charlie, la mort de la petite-amie de Bailey, le suicide de la copine de Julia, le divorce de Julia à 19 ans... Vu d'ici c'est too much. Mais étalé sur 6 saisons finalement, il fallait bien des intrigues ! Et pris les uns après les autres, quoi d'invraisemblable à ce qu'une ado sans mère pour fixer des limites tombe enceinte ? Puis à ce qu'elle claque la porte de la maison le bac en poche pour se marier avec son ex-bad-boy pour en divorcer un an après ? Et Bailey qui part à l'université après s'être occupé d'Owen et Claudia pendant 2 ans, jette ses responsabilités par la fenêtre, fait trop la fête et tombe dans l'alcoolisme, pourquoi pas ? Charlie qui annule son mariage au dernier moment parce qu'il a l'impression d'avoir une vie toute tracée à 25 ans : il vit dans la maison de son père, s'occupe de son restaurant, élève ses enfants... Tout à coup il perd pieds, quoi de plus normal ?
La Vie à Cinq était une très bonne série sur les relations frères/soeurs. Avec un bon cast secondaire, Kirsten (
Paula Devicq) l'amour on et off de Charlie, Will (
Scott Grimes, Archie dans Urgences) le meilleur ami de Bailey, Sarah (
Jennifer Love Hewitt) la petite-amie de Bailey qui aura droit à son spin-off raté, Griffin (
Jeremy London) le bad-boy mari/ex-mari de Julia qui squatte la cabane du jardin, Justin l'ami d'enfance de Julia, Jody (
Marla Sokoloff) la copine rebelle de Claudia qui lui fera prendre une cuite à 12 ans...
Je vous laisse sur cette citation du dernier épisode qui parle bien mieux que moi de ce qu'était Party of Five. C'est Charlie qui essaie de convaincre ses Bailey, Julia et Claudia d'accepter des opportunités qui vont les emmener vivre loin de Charlie et Owen, sur la côte Est.
Charlie : If they were alive, we'd all have left years ago. None of us would know Owen, I'd barely know any of you and none of you would know me, I'd have been out of the house for so long... Maybe we'd catch up once a year to Birthday party or christmas morning but we'd be off living separate lives. And that wouldn't be a tragedy, it would just be how it was meant to be. The truth is, we've stayed together so much longer than most families, we've taken care of each others so much longer... It's got to be okay to take care of ourselves now.
Julia : It's hard to imagine all of us in differents places
Charlie : It's gonna happened eventually... Bai ?
Bailey : I don't know man. This works for us, staying close. I don't think we should mess with that.
Charlie : For how long ? Forever ? We're not children anymore. We were then, even me at 24, I was lost and terrified, and none of us knew how to get through this except to stay together. That was our lifeboat, each others, we just got in and held on so tightly, that's how we made it. But now it's six years later and we all want good things for each others, we all want each others to have the best possible chance of being happy. We love each other. Doesn't that mean we got it right ? Doesn't it ?
Julia : Yeah...
Charlie : But not if we believe that we are only a family if we're close enough to touch. I mean, if that's what we're left with, than we failed. We survived so much more than distance, distance is nothing. You should go.
Désolée c'était long. Pourtant j'avais encore des trucs à dire...