Venin d'une nouvelle venue...

Mar 17, 2011 01:33

Bonsoir ! éè

Première critique pour moi... J'espère n'avoir pas - trop - fait n'importe quoi, n'hésitez pas à me lapider dans le cas contraire @_@


Titre : Blanche-Neige et les lance-missiles
Auteur : Catherine Dufour
Maison d'édition : Livre de Poche
Où le trouver : Dans votre librairie la plus proche, pourvu que celle-ci aie noué un pacte avec Satan.
Résumé :  "Tous les contes commencent par «il était une fois» et finissent par «ils se marièrent et eurent beaucoup d’enfants». Oui mais… et après ? Et si le règne de Blanche Neige avait été une horrible dictature ? Et si le miroir magique était devenu gâteux ? Et si Peau d’Âne était tombée amoureuse du prince de Cendrillon ?
Une poignée de fées du bois de Boulogne, une bande de spectres, le père Noël et sa fille, l’Ankou et sa faux, le Petit Chaperon rouge et l’affreux démon Bille Guette suffiront-ils à sauver le monde du chaos ?"

Je serais claire : ce livre est le mal.
Je ne veux pas dire "mal écrit". Non, le style est lisible - si je me souviens bien, parce que je me refuse obstinément à l'ouvrir pour vérifier. Surtout, l'auteur est plus vicieuse que ça ; voyez donc ce titre ; voyez donc l'excellente couverture de l'édition Folio !

Bref, trompée par cette publicité mensongère et les affirmations vicieuses d'un éditeur suffisamment fourbe pour ne pas hésiter à compromettre Terry Pratchett, qui n'avait rien demandé, en y comparant Catherine Dufour, à savoir donc l'auteur de ce crime contre l'humour et le bon goût ; trompée par tout ceci, dis-je, j'achetai BNLM, dont le titre est décidément beaucoup trop long.

Généralement, dans une critique, je m'attache à parler de plusieurs points de l'oeuvre : le scénario, l'univers, les personnages. Dans BNLM, le problème est vite réglé : il n'y a pas d'univers, il y a un vaste bric-à-brac-prétexte destiné à héberger les personn... les poupées-prétextes, car il n'y a pas non plus de personnages... Ni de scénario. BNLM est en fait une vaste improvisation n'importe quoiesque où l'auteur tente de caser tous ses dadas : fées, elfes, contes de fée, anges et démon, dieux et ordinateurs, fantômes et vampire, et tout ceci quasiment en même temps. Si la chose vous semble chaotique, félicitation : votre instinct ne vous a pas trompé, ce livre est un gros n'importe quoi et son "univers", si l'on peut encore se permettre un tel terme à ce stade, un amas informe dont les différentes parties relativement cohérentes ont été scotchées ensembles avec de grosses appliques de glue mal séchée.

Mais je parle, je parle, et je dois sembler bien agressive ; en plus, je n'ai même pas donné d'exemple, qu'en diraient mes profs de prépa ?! °A° Mais c'est que je voulais préparer le terrain, préparer l'Horreur, creuser jusqu'à l'œil sclérosé du cyclone, à savoir : l'humour.

Car BNLM est un livre d'humour. Le titre l'annonce, la couverture l'exhibe, le résumé le proclame. Et c'est exact : ce livre est bien plein d'humour - un humour absolument pas drôle, certes, mais omniprésent.

Vous souvenez-vous du début de votre adolescence ? Les premiers émois, les premières révoltes, les premiers boutons, toussa ? Alors vous devez vous souvenir, sans doute, de votre pur humour de rebelle qui déchirait tout (dans votre tête). Ah, ces blagues cinglantes sur le fait que Dieu est sûrement un alcoolo, lol !!§ Et Jésus se tape Marie-Madeleine !!1 (qui n'existe même pas dans la Bible ou les Apocryphe bon sang, les moines moyennâgeux voulaient juste un prétexte pour caser une femme à poil dans leurs prières, arrêtez d'écouter Dan Brown !) Même que les nanas de jeu vidéo ont des toutes petites armures bikini, LOLILOL!!§ Les princesses sont lesbiennes parce qu'elles ont été élevées dans un monde féminin à cause de la pruderie de leur éducation, LOLOLOLOLOLOLBBQ11§§ Et puis les princes de fée ce sont tous des incompétents et les princesses se débrouillent toute seule, OMGTFLOL!!1§ (ah non, ça, c'est le message des bouquins féministes maladroits pour enfants de moins de dix ans, j'avais bien aimé à l'époque en plus)

Vous l'avez deviné : c'est l'humour de BNLM. Il n'y a, dans cet ouvrage, que ces blagues navrantes de rebellitude consensuelles qui culminent sans doute, j'ai réservé cet exemple pour la fin, dans cette perle lamentable, sommet de cette parodie lovecraftienne du concept de drôlerie : l'infâme démon Bill Guette (?), le grand méchant qui s'incarne finalement dans un humain pour fonder une entreprise informatique...

...

Oui.

Oui, c'est lamentable. Oui, des larmes de douleur vous sont peut-être montées aux yeux tellement ce n'est absolument, entièrement pas drôle. Ça ne l'est tellement pas que cela attriste au lieu de réjouir. C'est atroce. BNLM est un pamphlet contre l'athéisme, le blasphème, l'ironie et le féminisme à la fois tellement l'auteur les emploie MAL. Si Bill Guette ne vous a pas achevé, passons à l'exemple suivant :

BLAGUER SUR L'ARMURE DES FEMMES EN FANTASY/JEUX VIDEO/AUTRE : DEUX EXEMPLES AU HASARD
Nioutaik :


Ce torchon (oui ce n'est pas une citation exacte, je me refuse à tout relire pour retrouver la page) : "Elle lui mit une armure minuscule qui ne couvrait rien[, comme toutes les nanas de jeu de rôle]".

Nioutaik utilise un angle rigolo en prenant à contre-courant cette affirmation certes juste mais... affirmative, évidente, même plus drôle à force d'être faite. Catherine Dufour retranscrit mot par mot la remarque fine que formule tout gamer un peu affûté dès l'âge de onze/douze ans. Laquelle des deux méthodes de traitement est-elle la plus drôle ? JE VOUS LAISSE JUGE.

Et vu que le traitement du féminisme est exercé avec la même subtilité, je vous laisse deviner dans quel état en ressort le/la lecteur/trice (indice : il implique une forte envie d'aller hurler dans la rue que "LES FEMMES A LA CUISIIIIIINE").

TOUS les personnages masculins, absolument tous (sauf peut-être quelques-uns dans le dernier tome, je ne me souviens plus trop, mais celui-ci est honnêtement tellement chaotique, et les personnages tellement inintéressants, que je m'en souviens moyennement), sont des chiffes molles et indécises manipulés par des femmes fortes/par des femmes fortes et par leurs parties génitales. Sauf Dieu et Lucifer, manipulé par l'alcool LOLOLOL l'hilarité me subemerge. Oh, et deux types dans le volume deux : l'un blasé et secondaire (Uther), l'autre sociopathe et attardé (Merlin). Les femmes, en revanche, sont Fortes, Dynamiques, Décidées, toussa, sauf les princesses au début mais ça s'améliore.

CA. C'est grâce à des ouvrages comme cette chose que le féminisme n'arrive pas à être pris au sérieux, bon Dieu ! Être féministe, c'est lutter pour l'égalité, l'égalité, entre hommes et femmes, pas rabaisser systématiquement un sexe pour promouvoir l'autres ! Je crois d'ailleurs que mon envie d'aller hurler des obscénités sous la porte de Catherine Dufour ("vos livres sont des CALEMBREDAINES et vous êtes nulle !!1 èoé") n'a jamais été aussi forte que devant cette touchante anecdote féministe qu'elle nous inflige dans le deuxième/troisième tome : l'épouse d'un industriel, au XIXe, est opprimée par son époux et croit très fort au spiritualisme. Il meurt et elle fait fortune en reprenant l'entreprise de son époux, ce qui la métamorphose en "femme forte", soit un sosie de son époux mais version féminine, vulgaire et "ho-ho-hoante" pendant qu'elle harcèle sexuellement son secrétaire (rien ne dit "humour" comme un homme violé ou harcelé). Et voilà : le féminisme d'après Catherine Dufour. Une fois le mâle mort, la femme s'épanouit en macho inversé, en voilà un message positif !!1

... Et c'est à peu près, en réalité, tout ce que je peux vous dire sur BNLM, parce qu'il n'y a rien d'autre que le chaos. Les personnages ? Ils ne servent qu'au scénario et à l'humour - je n'entends pas par là qu'ils sont creux, j'entend par là qu'ils sont inexistants : il n'y a aucune évolution, aucun développement, et leur personnalité peut... Non, en fait, elle n'est même pas suffisamment consistante pour être résumée par un ou deux adjectifs, sauf les deux-trois veinards qualifiables de "décidé", "sociopathe" ou "désabusé", pas plus d'un à la fois cependant, n'allons pas faire de folie (et quand je dis deux-trois, je n'exagère pas. Je me souviens exactement de trois personnages à personnalité.).

Le scénario, alors. C'est tant mieux, car j'aime avoir des occasions d'étaler ma culture et en voici donc une : savez-vous qu'il est impossible, en science, de prouver l'inexistence de quelque chose ? Karl Popper explique ainsi qu'on ne peut prouver que tous les corbeaux sont noirs ; comment prouver l'absence d'autres couleurs ? Photographier tous les spécimens en vie ? Tâche quelque peu difficile... Par contre, trouvez un corbeau blanc et la belle théorie "les corbeaux sont tous noirs" est détruite.

Heureusement, en littérature, on peut facilement prouver l'absence d'un scénario, je reprend donc ici même le résumé du tome un :

Tous les contes commencent par " il était une fois " et finissent par " ils se marièrent et eurent beaucoup d'enfants ". Oui mais... et après ?

"Et si le règne de Blanche-Neige avait été une horrible dictature ?
Et si le miroir magique était devenu gâteux ?
Et si la Belle au bois dormant était devenue lesbienne ?
Et si Peau d'âne était tombée amoureuse du prince de Cendrillon ?
...
Et si Dieu s'était mis à boire ?..."

- Le livre n'a rien à voir avec un "et après", aucune des héroïnes (? figurantes ?) n'a rencontré son prince.
- La Belle au Bois Dormant devient lesbienne cinq minutes (on revient d'une longue digression et l'auteur encore toute ricanante de son intelligence nous explique que pouf, maintenant, elle sort avec sa copine. Digression suivante ou presque, on nous annonce qu'elles ont rompu.)
Quand aux autres "points de scénario" cités, ils sont en réalité perdus dans le chaos cosmiques ; je n'évoquerais même pas Blanche-Neige...

OU PLUTÔT SI.

CE TITRE EST UNE ARNAQUE.

BLANCHE-NEIGE PASSE LE BOUQUIN A EMBARQUER SES FAMEUX LANCE-MISSILE. SÉRIEUSEMENT. ELLE NE GLANDE RIEN. ELLE LES TRANSPORTE, ELLE LES TRANSPORTE, ET POUF LE MONDE EST FINI. RIEN D'AUTRE NE SE PASSE. LITTÉRALEMENT. ACHETEZ LE LIVRE SI VOUS NE ME CROYEZ PAS, ÇA VOUS APPRENDRA ET PUIS DE TOUTE FAÇON JE VOUS MÉPRISE. Vu les trois plombes qu'elle passe à nous étaler sa version dominatrix de Blance-Neige, les idéaux "féministes" qu'elle incarne puis sa traversée de 90% du monde (? décors en papier) avec ces satanés lance-flammes, ça doit bien être la plus grosse déception du bouquin T____T

Et dois-je parler des deux textes insérés au pied-de-biche dans le récit pour monter le compte-page, parce que ça monte le compte-page et ce serait bête de louper l'occasion (point bonus pour la franchise de l'auteur, qui nous raconte comment elle a décidé d'insérer des textes qui ne collaient pas du tout à la cohésion du récit comme ça, pour le fun, à sec avec du gravier) ? Du fait que le deuxième tome n'a rien à voir avec le premier, ni le troisième avec le deuxième, sinon quelques fins lambeaux de fragments de prétextes foireux ? Que loin d'être plein de digressions, le scénario est en fait Digression, un peu comme on ne voit pas l'aura d'un dieu parce qu'on est en plein dedans tellement elle est grande et majestueuse, sauf que là c'est juste n'importe quoi ?

Dois-je rappeler que Terry Pratchett a déjà Alzheimer et ce seul maux lui suffit, alors ne lui ajoutons pas sur les épaules une association avec pareil ouvrage ?

Que la conjecture est maussade, le dollars dévalué, et la bourse du consommateur suffisamment en difficulté pour qu'il n'aille pas l'alléger davantage pour soutenir pareille offense au bon goût, à l'humour et à la dignité humaine ?

Mais je serais juste cependant. Cette série a bel et bien des qualités. Son style est lisibles ; j'ai ri trois fois (j'ai compté) au cours de la lecture des trois volumes, soit déjà plus qu'à la lecture des Misérables ; enfin, il réussit quand même l'exploit de ne pas faire avancer son intrigue d'un pouce tout en accumulant une impressionnante panoplie de personnages (creux) et d'évènements (inutiles), ce que même les spécimens les plus pittoresques de fanfiction.net n'arrivent pas à accomplir aujourd'hui.

Et ce sont bien là toutes ses qualités.

fantasy, humour, roman

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