Oui, je sais, j'ai mis le temps. Mea culpa (en fait, pas tellement, mais bon)
Spooky, ouvre l'oeil, y'a un petit quelque chose pour toi dans ce one-shot ^.^
Titre : Celui qui était une chèvre… pardon, un bouquetin.
Auteur : Shinia Marina
Timeline : courant août 2002, monde Quatre
POV : Cinq
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Harry soupira et se frotta les mains avec la satisfaction du travail bien fait. Il se laissa tomber sur la souche d’arbre lui servant habituellement de siège et accepta avec un sourire la Bieraubeurre que lui tendait Charlie.
C’était fou comme il se faisait rapidement à cette vie, dans ce monde. Bien sûr, ses parents, ses amis et sa sœur lui manquaient, parfois cruellement. Mais il savait qu’ils allaient bien et qu’ils étaient en vie, quelque part, dans son propre monde, même si ici tout n’était pas aussi rose. Il avait l’impression de s’être morfondu dans les appartements qu’on lui avait mis à disposition au Ministère en attendant de trouver quoi faire de lui pendant une éternité.
Quand Serpy lui avait dis que l’Ordre pensait à se servir de lui comme d’un leurre pour duper Voldemort, il avait commencé à avoir sérieusement peur pour sa vie et son futur. Heureusement que son autre lui n’avait pas permis une telle chose en l’aidant à s’échapper du Ministère puis en convainquant qui de droit de l’envoyer ici, au pays de Galles, avec les dresseurs de Dragons.
- Alors, ça va ? demanda Charlie en plongeant un bout de pain dans sa soupe avec gourmandise.
Harry étira son épaule un peu endolorie.
- Ouais, il est assez réceptif aux ordres en fin de compte. Un peu cabotin et joueur, mais c’est de son âge… on a besoin qu’il soit prêt pour quand ?
- Pour quand il sera prêt. Hors de question de gâcher un dressage, quoi qu’exigent nos grands pontes. On aura l’air bien si un de nos dragons décide de croquer des membres de l’Ordre à la place des Mangemorts.
- Ouais, c’est vrai, vu sous cet angle…
Harry avait tendance à oublier qu’ils étaient en guerre. Lui n’avait jamais connu la guerre et ses parents non plus, Voldemort ayant été mis hors d’état de nuire avant d’avoir causé plus de quelques meurtres isolés et deux attentats ratés.
Ici, au beau milieu de quasi nulle part (après tout, on était au pays de Galles), à l’air libre toute la journée à soigner et dresser des dragons, il se sentait à sa place. Et il se sentait utile. Après avoir pris en partie connaissance de l’état de ce monde, il avait haï le fait de rester sans rien faire à longueur de journée - bon, il n’avait pas précisément rien fait, son entraînement d’Animagus étant soudainement devenu une priorité - et la proposition de Dumbledore de l’envoyer bosser dans l’équipe de Charlie l’avait enchanté.
Cela lui permettait en plus de prendre ses distances vis-à-vis de Serpy. Ce n’était pas qu’il n’aimait pas son autre lui, mais il y avait quelque chose de dérangeant à parler à un soi-même qui n’avait pas eu la même histoire. Toutes ces questions de « et si » lui revenaient alors sans cesse à l’esprit et il savait que l’autre avait le même problème.
Et puis il y avait l’autre problème. Il y avait Draco Malfoy. C’était perturbant de savoir que son alter ego était homosexuel alors que lui n’avait jamais eu le moindre doute sur son hétérosexualité. Mais justement, le fait de voir les deux hommes main dans la main - quand ils pensaient que personne ne les regardaient, par exemple - ou plus simplement échanger un regard ou un sourire plein de sous-entendus et d’affection, c’était perturbant. Diablement perturbant.
Et la question du « et si » revenait à la charge. Et si j’avais eu un Draco Malfoy dans mon monde, je serais casé avec lui aujourd’hui ?
Il ne voulait pas savoir. Définitivement. Même par pure curiosité.
Charlie se leva pour aller remplir son bol de soupe au grand chaudron sous la tente principale et Harry le suivit des yeux. Il était en fin de compte assez différent du Charlie de son monde, plus grave et moins enclin à la plaisanterie. Tout cela s’expliquait largement par les évènements de ce monde. Harry devait parfois se faire violence pour ne pas évoquer un souvenir d’enfance avec lui. Ce Charlie-là avait montré une certaine curiosité vis-à-vis de la famille Weasley dans l’autre monde, mais ils s’étaient vite rendu compte que l’un comme l’autre étaient gênés par l’évocation de ces souvenirs qu’ils n’avaient finalement pas en commun alors que c’était si aisé de le croire. De ce fait, Harry évitait le sujet.
Et puis, ce Charlie entretenait une relation avec un inconnu qui le hibouait régulièrement. Il n’avait jamais vu Charlie réagir comme un adolescent amoureux dans son monde, mais ici, lorsqu’un certain hibou débarquait, le roux disparaissait un bon moment, le temps de lire une longue lettre. Quand il revenait, il avait toujours un mal de chien à faire disparaître son grand sourire idiot.
Mue par la curiosité, Harry avait un jour réussir à piquer une des lettres. Ça s’était révélé être neuneu et guimauvé à souhait, mais le plus intéressant avait été le nom de l’envoyeur.
Un certain Kingsley.
Les pédés couraient les rues dans ce monde…
- Demain on va chercher de nouveaux dragons, déclara soudain Charlie sans prévenir.
- Attend, on va les mettre où ? Y’a déjà presque trop de locataires, ici…
- Un type du ministère doit venir. Jim va le baratiner comme il faut et il nous accordera de nouveaux terrains.
- Je fais confiance à Jim, acquiesça Harry avec un sourire.
James Potter et toutes ses aventures palpitantes dans Poudlard pouvaient aller se rhabiller, Harry avait trouvé plus fanfaron et plus bluffeur que son père : Jim Stogart. Ce Cracmol était aussi la personne la plus douée qu’il avait jamais vue pour causer aux dragons, dans ce monde comme dans celui d’où il venait.
- Seulement, ce type fait partie de ceux qui ne devraient pas te voir, alors on va aller faire un petit tour.
- Ok, fit Harry en hochant la tête.
Ce n’était pas la première fois que Charlie l’éloignait du campement pour ce genre de raison, mais habituellement Harry se retrouvait de corvée de course dans le village moldu le plus proche. Cette fois-ci la ballade allait être autrement plus intéressante.
- On va où ? demanda-t-il en se levant pour aller se chercher un bol de soupe lui aussi, ayant terminé sa Bieraubeurre.
- Les Alpes italiennes.
- Sérieux ? C’est super chouette, là-bas. Par contre il doit pas y avoir beaucoup de dragons sauvage, à part dans la réserve d’Aoste mais ils sont vachement surveillés…
Charlie émis un reniflement moqueur.
- Y’a pas de réserve.
- … ah.
Encore une différence entre leurs deux mondes…
Harry se rassit et entreprit de faire un sort à sa ration.
- On part à quelle heure ?
- 4 heures. Mets ton réveil…
- Chef, oui Chef !!
¤¤¤
Harry s’étira avec délices en prenant un gros bol d’air frais. Le soleil se levait de l’autre côté de la vallée, dardant ses premiers rayons sur leur petit groupe. Lui et Charlie étaient accompagnés de deux autres dresseurs. De ce fait, il ne restait plus grand monde au camp principal et c’était pourquoi ils devaient faire vite pour trouver des dragons et prélever quelques individus.
Charlie n’avait pas jugé bon de prévenir les autorités italiennes sorcières, tout du moins pas de manière officielle - ils n’auraient pas pu utiliser un Portoloin pour venir jusqu’ici sans un appui quelconque à l’intérieur du pays de toute façon - et Harry, s’il avait eu quelques cas de conscience à savoir qu’ils contournaient joyeusement la loi à chaque fois qu’ils entreprenaient quelque chose, avait fini par prendre l’habitude.
Pour le moment il profitait du paysage, de la vallée encore endormie, de la fraîcheur de l’air un peu humide de rosée - mais la température n’allait pas tarder à remonter, il le savait. Il y avait plusieurs villages s’étendant sous leurs pieds, reliés par des routes moldues. Bien que la vallée de l’autre côté du col et les plateaux avoisinants soient dissimulés par magie, il n’y avait pas d’habitation sorcière dans la zone. Ce qui arrangeait leur affaire.
- Bon, fit Charlie. Le but est de trouver une harde et de récupérer quelques individus parmi les plus réceptifs. L’ennui c’est qu’on ne sait pas où ils sont et on n’a que jusqu’à demain, alors je propose qu’on se sépare en deux groupes.
- C’est pas un problème, mais c’est le genre de milieu où on trouve surtout des Cornelongues Roumains et ils sont sensibles aux émissions magiques. Il suffit de lancer un lumos à proximité d’une harde pour qu’elle déguerpisse - ou qu’elle attaque, au choix, indiqua Matt en attachant la sangle de son sac sur son ventre.
- Ah oui, pas de sort lancé et pas de sortilège actif, c’est ça ? demanda Harry en redescendant du rocher sur lequel il s’était perché afin d’admirer la vue.
- Yep, deux jours de marche en montagne avec ton sac sur le dos, Potter, ricana Rollay, le plus âgé de leur groupe.
Harry haussa les épaules avec un petit sourire en coin.
- J’te prends quand tu veux, pépé…
- Je prends Potter avec moi, indiqua Charlie, coupant court à la boutade.
Harry hocha la tête ainsi que les deux autres. Il n’avait rien a dire contre la répartition des équipes et pour tout dire était plutôt soulagé ; tant qu’il évitait certains sujets avec Charlie il n’y aurait aucun problème, mais il n’avait pas beaucoup d’atomes crochu avec Matt et Rollay empestait la fumée de ses cigarillos et le vieux vin à longueur de temps - au point, sans doute, de faire fuir les dragons dans un rayon de deux kilomètres.
Ils étudièrent les cartes pendant quelques minutes le temps de revoir les zones de recherche de chaque équipe et de se définir un point de rendez-vous, avant de se séparer.
Harry et Charlie marchèrent en silence pendant un moment, le roux ouvrant la marche sur le petit sentier qu’ils suivaient - et qui disparaîtrait sans doute bientôt. Ils étaient dans l’ombre de la montagne et la rosée rendait le sol glissant sous leurs pieds, mais Harry savait qu’il regretterait bien vite l’état du chemin en milieu de journée, quand le soleil les brûlerait sans pitié.
- Hmm, Charlie ? appela-t-il au bout d’un moment.
- Oui ? répondit son aîné d’un ton un peu absent.
- Je viens de me souvenir d’un truc… enfin, je sais pas si ça s’applique à ce monde mais…
Charlie s’arrêta et se retourna en soupirant.
- Accouche, qu’est-ce qu’il y a ?
- Dans mon monde, il y avait aussi des Pansedefer Ukrainien dans la réserve.
- C’est pas une réserve, ici… lui rappela Charlie avec toutefois une petite hésitation.
- Je sais, mais… mais je ne suis pas sûr qu’ils aient été importés… je crois qu’ils avaient migré depuis l’Europe de l’Est sans aide extérieure…
Charlie prit une inspiration et marmonna un juron.
- Et ben si y’en a, j’espère que Matt et Rollay n’auront pas de problème avec ces trucs…
- Le point positif, c’est qu’ils sont assez lents par rapport à d’autres espèces comme les Dent-de-Vipères ou les Cornelongues… fit Harry comme s’il récitait un cours.
- Et le point négatif, c’est que les femelles matures atteignent un poids de six tonnes, grogna Charlie. Tu aurais pu te souvenir de ce détail avant.
Harry se contenta de lui emboîter le pas sans répondre au reproche. Il aurait mieux fait de se taire, finalement…
- Je ne suis venu qu’une seule fois ici, et j’avais sept ans, se contenta-t-il d’indiquer.
Charlie ne répondit rien et l’ambiance resta assez lourde pendant un long moment, jusqu’à ce que le soleil inonde l’endroit où ils se trouvaient. A partir de cet instant il faisait bien trop étouffant pour penser encore à leur petite altercation.
Ils marchèrent plus de trois heures sans croiser le moindre indice indiquant la présence de dragon. Charlie consulta la carte un certain nombre de fois afin de ne pas sortir par inadvertance de la zone cachée aux moldus et leur fit quitter le chemin à plusieurs reprises.
L’atmosphère devint rapidement étouffante. Tous deux transpiraient sous leur sac à dos, le souffle court tout en sachant qu’ils ne pouvaient pas se permettre de vider leur gourde juste pour se rafraîchir. Le chant des insectes, des grillons et des cigales pour la plupart, était assourdissant.
Finalement, ils firent une courte pause au pied d’une grande façade rocheuse. Harry se laissa tomber avec délice sur une pierre, massant ses mollets douloureux. Heureusement que ses chaussures, déjà bien rôdées, lui épargneraient des ampoules…
- Il va falloir qu’on grimpe ça, annonça Charlie en remettant sa gourde dans son sac, tout en désignant la façade au-dessus d’eux.
Harry leva les yeux et siffla.
- Sans magie, bien sûr…
- Sauf en cas de réel besoin, si tu te casses la gueule je vais pas te regarder tomber comme un abruti ! lança Charlie avec un sourire en coin.
- Je suis pas sûr d’être celui qui se cassera la gueule… renchérit Harry avec un petit air de défi.
Charlie ricana doucement. L’effort à fournir les avait quelque peu calmés et le roux ne lui en voulait plus de ne pas s’être souvenu du ‘détail’ des Pansedefers. De toute manière ils n’avaient encore rien trouvé - à se demander s’il y avait bien des dragons en liberté dans le coin.
Harry leva la tête pour contempler la falaise tout en prenant une dernière gorgée d’eau. Elle n’avait pas l’air d’être un obstacle insurmontable, n’étant pas particulièrement à pic, mais il devinait que certains passages risquaient d’être quelque peu ardus, surtout à cause des gravières glissantes et traîtresses et autres éboulis. Il hocha la tête sur le côté. Dommage qu’il ne soit pas seul, il aurait bien expérimenté sa forme Animagus là-dessus, même s’il ne la maîtrisait pas encore très bien.
Ils attaquèrent l’escalade et il s’avéra rapidement que Harry avait le pied le plus sûr et était le plus rapide. Charlie n’était pas en reste, lui aussi avait fait du Quidditch dans sa scolarité, étant de ce fait peu sensible au vertige, et il possédait une souplesse que Harry n’avait pas. Cependant, comme Harry était celui qui se débrouillait le mieux, il apparut rapidement évident qu’il soit en tête.
Harry appréciait cette confiance que Charlie plaçait en lui, le laissant choisir le chemin le plus approprié. Sans doute que sa forme Animagus nouvellement découverte influençait un peu sur son intuition dans ce cas…
Tout à son escalade, Harry laissa quand même ses pensées dériver un peu. Ici, entre le ciel et la terre et dans l’immensité des montagnes, il se sentait vraiment lui et pouvait presque croire qu’il était rentré dans son monde. Que la personne qui marchait derrière lui n’était pas ce Charlie si différent tout en étant identique, que ses parents l’attendaient à la maison avec sa sœur et le chien.
Il soupira. Il était tellement seul… pourtant il aurait aimé être vraiment seul en cet instant. Il aurait aimé que Charlie ne soit pas derrière lui, il aurait aimé pouvoir s’asseoir sur un rocher, les pieds se balançant dans le vide et le dos collé à la paroi, pouvoir lever les yeux vers le ciel et laisser l’air de la montagne l’ébouriffer un peu plus. Il aurait aimé pouvoir laisser remonter l’animal en lui et finir l’escalade sous cette forme, pouvoir tester enfin au grand air cette apparence au lieu de se contenter de quelques minutes ça et là quand il parvenait à s’isoler.
Il avait été sidéré de la facilité avec laquelle il s’était transformé. Cela faisait déjà quelques années qu’il avait commencé l’entraînement d’Animagus sous la houlette de son père, de Sirius et même parfois de Peter. L’idée de pouvoir venir avec eux et Remus les nuits de pleine lune l’avait emballé, mais ensuite ses obligations l’avaient rattrapé. Il y avait eu la formation, les stages loin de la maison, il y avait eu les amis et les sorties, et il avait négligé l’entraînement. Ce n’était pas non plus comme si Remus avait absolument besoin de sa présence à lui de toute façon…
Mais depuis qu’il avait passé la porte… ce qui avait été une lubie était devenu une sorte de priorité. Sa forme Animagus était devenu le seul atout qu’il possédait face à son alter ego si fort et si entraîné, face à ce Harry qui avait été maltraité et avait vécu tant d’horreur, face à ce Harry désigné du doigt par une prophétie.
Caché dans sa chambre du ministère, puis à l’écart du camp des dresseurs de dragons de l’Ordre, il avait réussi en quelques semaines ce qu’il préparait depuis des années. Il n’arrivait pas encore à la tenir très longtemps mais se transformait sans problème.
Et il ne tenait pas à ce que ça se sache - encore qu’il n’aurait pas été très étonné d’apprendre que Dumbledore était au courant. Directeur de Poudlard ou ministre de la Magie, ce type semblait avoir des yeux derrière la tête…
Il se concentra à nouveau sur ce qu’il faisait. Ils devaient traverser un éboulis pour atteindre une zone plus stable et plus praticable sur laquelle ils avanceraient rapidement vers le sommet, et ils firent une petite pause avant d’attaquer le tronçon sensible.
Charlie inspectait en silence une égratignure sur son mollet qui devait le gêner un peu tandis que Harry fixait les rochers en face. Un mouvement attira son regard et il fronça les sourcils pour ajuster sa vue ; une marmotte sortit de sa cachette pour se redresser de toute sa hauteur, inspectant les alentours, avant de continuer son chemin pour disparaître un peu plus loin. Harry sourit.
- Qu’est-ce qu’il y a ? demanda Charlie.
- Y’avait une marmotte, là-bas.
- Hmm… ça risque de vouloir dire qu’il n’y a pas de dragons dans la zone…
- Les marmottes, c’est un peu petit pour nourrir des Cornelongues… quant aux Pansedefers, je suis même pas sûr qu’ils les remarqueraient… fit remarquer Harry en haussant les épaules.
- C’est vrai, des chamois seraient plus appropriés pour leur régime alimentaire… on a vu des chamois depuis qu’on est là ?
- Au tout début, de l’autre côté de la vallée... fit Harry en hochant la tête avant de sourire.
Si pas de chamois voulait dire présence de dragons, ils avaient des chances de trouver ce qu’ils cherchaient une fois le plateau atteint.
- Bon, on y va ! lança-t-il en commençant la traversée de la gravière.
Charlie le suivit avec un peu de distance pour éviter qu’ils ne se rentrent dedans, si jamais il venait à aller plus vite que lui et à le rattraper.
Ils glissèrent plusieurs fois mais jamais plus que sur quelques dizaines de centimètres et il ne fallut pas longtemps avant qu’ils n’avancent avec une certaine assurance. Peut-être avec trop d’assurance…
Un juron étouffé fit stopper Harry qui manqua s’étaler dans le mouvement.
- Charlie ? appela-t-il.
Seul un bruit de glissement lui répondit. Il grommela en finissant par se stabiliser et risqua un coup d’œil par-dessus son épaule. Charlie était presque allongé de tout son long, continuant de glisser lentement sur les graviers. Harry glissa sa main vers sa ceinture avec précaution pour saisir sa baguette.
- Charlie ? Besoin d’un coup de main ?
- Nan… ça va aller… pas de magie, bordel, tu vas faire fuir les dragons !
Harry baissa sa baguette avec réticence, se retenant de lui signaler qu’il n’y avait peut-être rien sur le plateau qu’ils essayaient d’atteindre. Mais Charlie ne parvenait pas à faire stopper sa glissade. Les galets en entraînaient d’autres et au train où ça allait le glissement allait finir par atteindre l’endroit où se trouvait Harry.
- Ça s’arrêtera pas !! cria Harry. Je vais te… !
Mais il n’eut rien le temps de faire. Le glissement s’était soudain amplifié et Harry bascula en arrière, son coude cognant violemment une pierre. Il lâcha sa baguette avec un cri de douleur, voyant Charlie glisser de plus en plus rapidement vers l’à pic de la falaise, complètement impuissant.
- Malédiction ! s’exclama-t-il avant de se redresser pour s’élancer dans la pente à la suite de Charlie.
- Charlie ! Accroche-toi aux cornes !!
- Quoi ?!
- Accroche-toi aux cornes !!
Il ne lui laissa pas le temps de se poser plus de question. En un ‘plop’, Harry avait pris sa forme Animagus et bondissait dans l’éboulis, réussissant à atterrir près de l’endroit où se trouvait Charlie sans la moindre difficulté. Il pencha la tête vers le roux qui, après une trop longue seconde de stupéfaction, finit par agripper solidement les cornes larges et annelées.
En une seule secousse, Harry avait redressé Charlie sur ses pieds et, s’assurant qu’il se tenait correctement, fit barrage de son corps pour l’entraîner vers un sol plus stable, heureusement dans la bonne direction.
Charlie se laissa tomber sur le sol, les jambes et les bras en sang à force de râper contre les pierres, et leva un regard ahuri sur l’Animagus qui étiraient sa nuque - mine de rien, le roux n’était pas un poids plume.
- Une chèvre… murmura Charlie.
Harry baissa la tête dans sa direction, cornes en avant, l’air menaçant.
- Ok, ok ! Pas une chèvre !! Une sorte de… bouquetin… ou de mouflon…
Plop.
- Un bouquetin, indiqua Harry en s’asseyant sur une pierre. Enfin, je crois. J’ai jamais vraiment eu la possibilité de vérifier. Mais il me semble que les mouflons sont plus petits et n’ont pas les mêmes cornes…
- Bordel… marmonna Charlie. Je savais pas que…
- Personne ne le sait, le coupa Harry. Charlie, s’il te plait… j’aimerais… j’aimerais que ça reste entre nous…
Charlie eut un rire qui sonnait faux.
- Les Animagus sont sensé s’enregistrer et…
- Mais je ne suis même pas de ce monde. Je penserai à m’enregistrer quand je serai rentré chez moi…
Charlie resta silencieux un moment avant de finalement, lentement, hocher la tête.
- D’accord, finit-il par acquiescer. Je ne dirais rien. Mais si un jour je me trouve dans une situation telle que je suis obligé d’en parler ou de le révéler, je ne te promets pas de faire un effort, lui signala-t-il.
Harry sourit. Ça lui était déjà largement suffisant.
- De toute façon, c’est pas comme si je pouvais botter le train de Voldemort avec ça, renchérit-il.
Charlie éclata de rire sous l’image mentale du mage noir se faisant poursuivre par un bouquetin et Harry ne tarda pas à le suivre avant de finalement se redresser.
- Je vais chercher ma baguette, je l’ai lâché avec toutes ces conneries…
Il y eu un nouveau ‘plop’ et un bouquetin s’élança joyeusement dans l’éboulis, avançant avec habileté sur la caillasse instable. Harry était aux anges, pouvant enfin utiliser sa forme animagus librement dans un milieu qui s’y prêtait. Le pied sûr, il zigzagua dans la gravière un moment avant de retrouver sa baguette et c’est presque avec regret qu’il retourna à l’ombre des rochers où Charlie s’était installé.
Le roux était en train de nettoyer les nombreuses blessures de ses jambes et de ses bras avec un baume sorti de son sac.
- J’ai encore du mal à tenir ma forme, indiqua Harry en se rapprochant. Comment ça va ?
- J’ai rien de cassé ou de foulé, je m’en tire plutôt bien, se contenta de répondre Charlie, mais il était visible que ses nombreuses écorchures ne lui faisaient pas du bien.
- Tu sais quoi ? Je pense qu’on va rester ici un petit moment, le temps que tu te soignes un peu mieux que ça et qu’on mange un morceau. On continuera après.
Charlie ouvrit la bouche pour contester mais le regard de Harry finit par le dissuader de continuer.
- D’accord. Mais dis-moi, continua-t-il tandis que Harry s’installait. Comment ça se fait que tu aies décidé de devenir Animagus ?
Harry hésita quelques secondes. Après tout cette partie de son histoire était commune à celle de Serpy et il ignorait ce que Charlie en savait.
- Je… c’est une partie de mon histoire que j’ai en commun avec l’autre Harry et… je sais pas trop si je peux t’en parler comme ça…
- Tu veux dire que lui aussi… ?
- Pas que je sache, non. Mais… bon, tu connais Remus Lupin ?
- Ouais, bien sûr…
- Et tu sais que c’est un…
- Un loup-garou ? Je suis au courant, indiqua Charlie avec un sourire.
Harry hocha la tête.
- Les nuits de pleine lune, un Animagus peut accompagner un loup-garou sans se faire bouffer tout cru, et c’était mon but à l’origine. Mais bon, avec les études et tout ça… j’avais un peu fait traîner mon entraînement. Je ne l’ai vraiment repris qu’en arrivant ici parce que… et bien… ça pouvait me servir… finit-il d’une petit voix.
Charlie hocha la tête et Harry mordit dans son sandwich à pleines dents. Il avait presque l’impression de retrouver son ami, soudain…
¤¤¤
Un peu plus d’une heure plus tard, tous deux s’étaient remis en marche et arrivèrent enfin au niveau du plateau qu’ils tentaient d’atteindre. Bénéficiant d’un bon point de vue surélevé sur ce qui se trouvait derrière, ils s’arrêtèrent, le souffle court, et admirèrent la vue, un sourire grandissant sur leurs visages.
- Des Pansedefers… souffla finalement Charlie.
Harry se contenta d’acquiescer en hochant la tête, ne pouvant retenir un immense sourire devant la vision du groupe de dragons nonchalamment étalés sur les rochers en contrebas. Leurs écailles grises prenaient des reflets argent au soleil, faisant presque croire à la présence d’une mare de métal liquéfié au milieu de la caillasse.
Des squelettes d’animaux, blanchis par le temps, recouvraient le sol tout autour d’eux. Aucun ne bougea malgré le fait que le vent devait leur apporter l’odeur de Charlie et de Harry, mais les deux humains n’étaient, après tout, que d’insignifiantes petites choses à côté d’eux.
- Les Mangemorts n’ont qu’à bien se tenir… finit par murmurer Harry.
Les dragons étaient magnifiques, superbes et immenses. Les Magyars étaient bien plus meurtriers et dangereux que les Pansedefers, mais ces derniers, plus grands et plus lourds, pouvaient être tout aussi redoutable dans un combat.
Harry ressentit une pointe de culpabilité à l’idée d’utiliser des créatures si magnifiques dans une guerre mais, malheureusement, ce n’était pas à lui de décider de ce genre de chose.
- Bon, lança Charlie. Je t’attache à un rocher et tu fais la chèvre ? Avec un appât, ce sera facile d’en choper un !
Harry le fixa d’un regard torve.
- Tu veux un coup de boule ?
Ils restèrent silencieux un instant avant d’éclater de rire de concert. En contrebas, une longue tête argentée aux yeux rouges se tourna dans leur direction d’un air ennuyé.
(Fin)
Notes :
Le Cornelongue Roumain (Romanian Longhorn) a des écailles vert foncé et de longues cornes d’or avec lesquelles il embroche ses proies avant de les rôtir. Leur sensibilité à la magie est une particularité que j’ai inventé pour l’occasion ;p
Le Pansedefer Ukrainien (Ukranian Ironbelly) est le plus grand des dragons, pouvant atteindre un poids de six tonnes. Ses écailles sont d’un gris métalliques, ses yeux d’un rouge foncé et ses griffes particulièrement longues et meurtrières.
(Source : Les Animaux Fantastiques, Newt Scamander)
Shinia : le bouquetin (Capra ibex) est un ruminant de la famille des bovidés. Il a un corps trapu et massif mais est pourtant très habile dans les parois rocheuses de haute montagne. Il peut atteindre 170cm de long et 140kg. Les deux sexes portent des cornes recourbées en forme de sabre, celles des mâles étant très fortes, ornées de bourrelets et pouvant atteindre une longueur de 1 mètre. Des combats pour la hiérarchie sociale chez les mâles ont lieu par choc frontal de deux individus, mais sans élan comme chez le mouflon. La majorité des colonies se situe au-dessus de la limite des arbres (étage alpin-nival) jusqu’à 3200m d’altitude. Les boucs atteignent leur maturité sexuelle vers l’âge de…
Harry : HE OH !! Les lecteurs n’ont vraiment pas besoin de savoir ça !!
Shinia : t’es sûr ? é_è
Harry : certain !! … et moi non plus j'ai pas besoin de savoir ça !! ¬_¬
Shinia : d’ici à ce qu’on découvre que tu es un bouc gay… ^.^
Harry : je t’emmerde !!! XD
Shinia : ma pauvre biquette… car oui, le bouquetin est un proche cousin des chèvres, mouarf !!
Harry : tu veux un coup de boule ?
(Source : cours de Faunistique des Vertébrés de la Suisse, Pr Mahnert, 2003)
Il y a plusieurs dessins que je vais pouvoir vous mettre, maintenant ^^
A plus la foule! (et j'aime toujours autant les commentaires, hein, vous le savez!! ^o^)