La première faille (1)

Jul 16, 2005 22:26

Titre : La première faille (1)
Auteur : Shinia Marina
Timeline : juin 2002, monde Cinq puis Quatre
POV : Cinq

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Harry Potter était un homme heureux. Il était difficile de trouver un mot plus adapté. Remontant le chemin avec son meilleur ami Ron Weasley, leurs balais sur leurs épaules et le chien zigzaguant devant eux, ils profitaient tous deux du retour au village pour discuter encore et encore de leur après-midi, des coups échangés et des derniers potins qu’il est certes difficile de hurler quand on est sur un balai avec le vent dans la figure.
Les deux jeunes hommes avaient encore les joues rougies par l’effort et le souffle un peu court, ce qui ne les empêchait pas de chahuter joyeusement.
Bientôt, une maison cossue apparut au détour du chemin et tous deux s’arrêtèrent devant le portillon toujours ouvert.
- Tes parents ne sont pas là ? fit Ron en avisant du menton la porte d’entrée fermée.
A cette époque de l’année, elle était d’ordinaire ouverte.
- Ils sont allés cherché Alex à Londres, répondit Harry en descendant son balai de son épaule et tendant la main pour caresser machinalement une rose odorante dépassant de la haie.
- Ah oui ! s’exclama Ron en se frappant le front de la main. J’avais oublié quel jour on était. Temps béni que celui du premier jour de vacances… fit-il en souriant bêtement.
- J’aurais eu du mal à oublier, Maman n’a pas arrêté de courir partout ce matin pour préparer le repas de ce soir et faire le ménage dans la chambre d’Alex. T’as eu de la chance que je réussisse à m’échapper !!
- Je serais venu te kidnapper… dit Ron, pince sans rire, en posant une main sur l’épaule de son ami.
- D’habitude c’est plutôt moi qui te sauve la mise…
Ron ne répondit rien à cela - que répondre ? - se contentant de frapper Harry sur l’arrière du crâne.
- Je vais rentrer alors, avant que ma mère n’envoie la cavalerie, lança le roux.
Harry acquiesça avec un sourire. Il était pourtant loin le temps où les aînés Weasley étaient envoyés en renfort chez les Potter pour déloger Harry, Ron et Ginny de leur cachette dans le bois tout proche, mais ça restait un sujet de plaisanterie.
Tout comme les fiançailles arrangées entre Harry et Ginny, rendues caduques lorsque les deux concernés y avaient opposé leur veto quelques années plus tôt ; malgré la puberté, ni l’un ni l’autre ne se voyait épouser son ami d’enfance. Plus personnellement, Harry devait avouer avoir un frisson d’horreur à l’idée de passer sa vie avec Ginerva Weasley. Il tenait à la garder intacte, sa vie, justement…
Harry et Ron se saluèrent et, une fois que son ami eut transplané, Harry s’autorisa un soupir satisfait. Si la journée n’avait pas particulièrement bien commencé - le retour d’Alex après trois mois d’absence depuis les dernières vacances rendant Lily Potter absolument insupportable en ‘ménagère addict’ - l’après-midi passé à s’échanger des Souaffles avec Ron l’avait remarquablement bien détendu. Il n’avait pas vu son ami depuis plusieurs semaines, celui-ci venant de passer un certain temps en stage quelque part en Afrique pour les besoins de sa formation. Ron avait pratiquement suivi le même chemin que son frère aîné Bill, à la différence qu’il n’allait sans doute pas travailler pour la Banque Gringott au final - quelques années plutôt il avait vexé, sans le vouloir, un gobelin de la banque et il était connu que ceux-ci avaient la rancune tenace.
Harry rangea son balai dans le réduit qui lui était réservé dans le vestibule, près de celui de son père, avant de se déchausser et de monter dans sa chambre, laissant le chien retrouver seul le chemin de sa niche et de sa gamelle d’eau. Son t-shirt lui collait à la peau et, bien que la maison soit naturellement fraîche grâce à ses murs épais et quelques sorts bien placés, il mourrait de chaud. C’est donc tout naturellement qu’il alla prendre une douche, profitant des derniers instants de calme dans la maison.
Moins d’une heure plus tard, il était confortablement installé dans le grand salon à lire son magazine de Quidditch quand une gerbe de flammes vertes apparurent dans la cheminée avant de cracher, dans l’ordre, sa mère, deux énormes valises, un porc-épic survitaminé hurlant quelque chose ressemblant fort à « yahoooooooooooooooou !!! », une cage vide - heureusement pour son locataire - et finalement son père.
Harry n’eut pas le temps de mettre son magazine à l’abris qu’il disparut de ses mains. Un regard à sa cadette lui appris qu'Alexandra Potter venait de le réquisitionner pour son usage personnel.
- Hey ! Rends moi ça, sale peste !!
Alex lui tira la langue d’un air goguenard avant de s’éloigner avec son butin en sautillant.
- Harry ! c’est comme ça que tu salues ta sœur après tout ce temps ? s’indigna sa mère.
- ALEEEEEEEEEEEEEX !!! hurla Harry en se levant d’un bond pour la poursuivre.
Il ne fit que deux pas avant d’être coupé dans son élan par le poids d’une valise dans son estomac. Harry lança un regard qui se voulait meurtrier à son père mais qui ne réussit qu’à être larmoyant. La valise était vraiment lourde…
- Monte ça en haut au lieu de persécuter ta frangine… fit son père avec un clin d’œil.
- On se demande qui est persécuté dans cette baraque, marmonna Harry en réponse tout en s’exécutant.
Il eut un instant une envie de se rebeller au fond de la gorge, mais il s’abstint finalement de tout commentaire. Ce n’était pas non plus comme si, à presque vingt deux ans et squattant toujours chez ses parents, il avait vraiment droit de dire quoi que ce soit. Pas non plus comme si ses parents allaient le mettre dehors à grands coups de pieds dans le derrière, mais bon…
De toute façon, ni Lily ni James Potter n’était dupe, et son magazine reviendrait bien assez vite entre ses mains. L’instant d’après, Harry se souvint qu’il n’avait pas renouvelé le sort permettant de faire revenir ses affaires dans la chambre de leur légitime propriétaire, celui-ci étant inutile quand sa sœur était à Poudlard.
- Malédiction…
Ça signifiait qu’il allait devoir aller le chercher lui-même… et Alex ayant atteint ses dix-sept ans au mois de mars, il devait à présent s’attendre à une certaine résistance. Mais pourquoi le temps devait-il s’écouler ? Pourquoi Alex ne pouvait-elle pas rester une espèce de petite poupée chouinarde facile à ligoter quand les parents avaient le dos tourné ?
La vie était vraiment injuste.

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- … c’était un vrai coup d’éclat ! Tous le monde hurlait et applaudissait si fort que j’ai cru que les gradins allaient s’effondrer, c’était… c’était génial, le pied total !!
Harry acquiesça avec un petit sourire, laissant sa sœur lui raconter pour la quatrième - ou peut-être cinquième - fois depuis la veille au soir le match de Quidditch qui avait clôturé la saison à Poudlard, et dans lequel Gryffondor s’était distingué par un jeu époustouflant.
Enfin, époustouflant du point de vue de la grandiose Gardienne qui avait bloqué des dizaines et des dizaines de Souaffles tout en communiquant pratiquement par la pensée avec les autres membres de l’équipe pour mener le match d’une main de maître.
Ce qu’il y avait de bien avec Alex, c’est que dans sa bouche le moindre fait banal se transformait en aventure palpitante. Elle avait apparemment hérité ce don de leur père.
- Et toi, tu t’es toujours pas fait bouffer ? Quand est-ce que tu te décideras à me laisser ta part d’héritage, hein ? finit-elle par lancer sans prévenir en donnant un coup de coude dans sa direction qu’il évita avec souplesse.
- Uniquement quand je saurai de source sûre que tu ne pourras pas en profiter… le jour où tu te seras cassé la gueule de ton balai et que tu te seras brisé le dos par exemple… fit-il avec un sourire en coin.
Le manche de l’Eclair de Feu qu’elle avait reçu après ses BUSEs passa à quelques centimètres de son crâne, juste assez près pour décoiffer le peu qu’il y avait à décoiffer. Il répliqua avec un pokage de doigt de maître, faisant glapir sa sœur qui se jeta sur lui dans le but de lui arracher ses lunettes.
Riant, il réussit finalement à se dégager d’elle et partit en courant sur le chemin, rapidement poursuivit par une furie poussant de joyeux hurlements vengeurs et par Titus qui voyait là un jeu comme tant d’autres. Harry s’enfonça dans le bois qui bordait le grand champ servant de terrain de Quidditch improvisé depuis qu’il était tout petit et… se cassa la gueule sur un petit portillon qui n’avait rien à faire là.
Harry cligna des yeux, sonné, des feuilles mortes plein le champ de vision et une bosse pointant le bout de son nez sur son front. Il se releva avec quelques précautions, essayant d’ignorer le rire tonitruant d’Alex qui s’appuyait contre un arbre pour ne pas tomber à la renverse et les aboiements du chien.
- Alors ça, ça !! C’est la meilleure, mwawawaaaa !! Faut changer tes lunettes mon vieux !!! hurlait-elle entre deux tentatives infructueuses pour reprendre son souffle.
- Malédiction… grommela-t-il en époussetant son pantalon avec humeur, avant de balancer un coup de pieds vengeur dans un des poteaux de la porte. Qu’est-ce qu’elle fout là au milieu de nulle part cette saloperie, aussi !!
C’était une petite porte en bois toute simple ; les deux poteaux l’encadrant étaient recouverts de quelques ronces et des herbes folles avaient poussé à sa base. Elle n’était reliée à rien et n’avait rien à faire là.
Il ne se rappelait d’ailleurs pas de l’avoir déjà vue ici, et pourtant Merlin savait combien de fois Ron, Ginny et lui étaient venus jouer dans le coin étant enfants. Une porte paumée au milieu de nulle part, ils s’en seraient sûrement souvenus.
- Y’a pas que tes lunettes qu’il faut changer… murmura Alex.
Harry tourna la tête vers sa sœur pour rétorquer quelque chose de bien vexant, mais stoppa dans son élan en croisant son regard.
- Quoi ? fit-il.
Alexandra était plus sérieuse que jamais. Harry ne savait pas s’il devait s’en inquiéter ou non…
- Contre quoi tu t’énerves ? y’a rien ici… contre quoi tu as donné un coup de pied ?
- Tu te fiches de moi ? grommela-t-il en cherchant sa bosse du bout des doigts, avant de grimacer quand il l’eut trouvée.
Il repoussa Titus du plat de la main, celui-ci s’étant approché pour renifler son maître avec curiosité.
- Tu vas pas me faire croire que tu es tombé à cause de ça ? fit Alex en montrant une branchette du doigt, seule chose dans un rayon de cinq mètres pouvant prétendre être capable de causer la chute de quelqu’un - mais certainement pas de quelqu’un ayant des pieds aussi grands que ceux de Harry Potter.
- Mais non crétine ! C’est cette pu…
Il ne termina pas sa phrase, ne pouvant que rester planté comme un ahuri en fixant l’endroit où le petit portillon se trouvait quelques instants auparavant à peine.
Il tourna la tête vers sa sœur qui haussa les sourcils avec l’air de penser des kilomètres de bonnes choses sur son état mental.
- Mais… mais y’avait une petite porte, là, un genre de portillon de jardin, tu sais !! je te jure Alex, je me suis cassé la gueule dessus, je suis carrément passé par-dessus et ma bosse fait un mal de chien BORDEL !!
- T’es sûr que t’as rien fumé de suspect ces derniers jours ?
- Tu crois que je serais suicidaire au point de fumer à proximité de dragons ? Je te ferai pas ce plaisir !! cracha-t-il d’un ton qui n’avait rien d’amusé.
Harry tourna le dos à sa sœur et entreprit de rechercher les traces de la porte, des trous dans la terre où se trouvaient les poteaux de soutien, un tas de feuilles mortes dérangées, n’importe quoi du moment que ce soit quelque chose prouvant qu’il y avait bien eu cette porte ici !!
Mais il n’y avait rien. Rien d’autre que les traces laissées par sa chute, et sa chute seule. Il y avait le regard à la fois dubitatif et moqueur de sa sœur mais il n’avait rien à lui montrer, rien du tout.
Il commença à se dire qu’il avait peut-être halluciné. Parce que c’était la seule explication satisfaisante dans l’état actuel des choses. Mais pourtant…
Il secoua la tête et prit une inspiration. Puis :
- Tu y a cru ? fit-il en direction de sa sœur avec un sourire mi-figue, mi-raisin.
Il y eu un mélange de soulagement et d’irritation sur le visage d’Alex.
- Crétin fini, fit-elle en lui flanquant une baffe imaginaire.
Ils s’éloignèrent vers le champ pour aller faire un peu de Quidditch tel qu’il l’était initialement prévu, le chien en profitant pour farfouiller dans les buissons à la recherche de quelque chose d’intéressant. Harry se retourna avant de perdre de vue l’endroit où il était tombé. Il n’y avait pas plus de porte que l’instant d’avant.
Il faudra que je tire ça au clair…

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Harry repensa à ce portillon toute la journée, ne parvenant pas à se concentrer sur autre chose, ce qui fit particulièrement plaisir à Alex qui remporta tous leurs défis de Quidditch. Harry était pourtant bon sur un balai, il avait joué comme Poursuiveur depuis sa deuxième année et Gryffondor avait gagné la course trois ans de suite quand il était dans l’équipe, mais Alex se préparait, elle, à une carrière professionnelle.
Au printemps, elle avait même participé à une présélection pour l’équipe des Mugpye et même si rien n’était signé, elle avait été remarquée par le Poursuiveur vedette de l’équipe. Harry n’avait plus cessé d’entendre parler de ça depuis, ce qui le rendait assez grognon quand sa sœur était dans les parage. Mais honnêtement, il était fier de sa frangine.
Lui aimait bien le Quidditch, mais ne se voyait pas sur un balai jusqu’à la fin de ses jours. S’occuper de dragons était bien plus excitant…
Harry soupira en se retournant dans son lit. Il n’avait pas sommeil et diverses choses tournoyaient dans son crâne. Il devait écrire à Charlie pour confirmer le jour et l’heure de leur rendez-vous dans la semaine à venir, il devait aller à l’école moldue du village le lendemain ; l’école changeait de bâtiments et il s’était proposé pour donner un coup de main pour déménager les meubles, les tables et les chaises. Ça ne lui ferait pas de mal non plus de se replonger une dernière fois dans les locaux où lui et sa sœur avaient fait leurs petites classes - Lily avait tenu à ce qu’ils aillent dans une école moldue, ce qui ne l’avait pas empêché de faire les quatre cents coups avec Ron Weasley et Neville Longdubat pendant les vacances scolaires…
Se retournant une fois encore, il fixa d’un air peu engageant le réveil légèrement lumineux sur sa table de chevet. Sans ses lunettes il était bien incapable de lire l’heure qu’il était et de toute façon ne voulait pas le savoir.
D’où venait cette porte ? Essayer de penser à autre chose n’aidait finalement pas à oublier son étrange aventure de la matinée. Alex n’avait pas arrêté de se moquer de lui et le récit de sa meeeeeerveilleuse chute et de son explication pour le moins inhabituelle avait bien fait sourire son père qui avait estimé que son fils aurait bien besoin de cours de rattrapage dans le domaine des excuses bidon.
Ce qui avait orienté la conversation sur l’une des innombrables aventures des Maraudeurs dans leur jeune temps. Harry aimait beaucoup son père, franchement, mais il se serait bien passé d’entendre cent cinquante fois les mêmes histoires… heureusement que les acolytes n’avaient pas été là ce midi. Pris à part, les quatre hommes étaient super sympa. Ensemble, ils avaient l’air d’avoir à nouveau quinze ans…
Pour en revenir à cette porte… raaaaah !!! mais il n’arriverait pas à se la sortir de la tête, bon sang !! Pourquoi Alex ne l’avait-elle pas vu ? Pourquoi lui l’avait vu et pas sa sœur ? Pourquoi s’était-il cassé la gueule là-dessus ??

Ça sentait le coup fourré à plein nez. Ginny ? Ce n’était pas son genre - le genre de Ginny était plutôt de métamorphoser ses caleçons en trucs bien gluant - et il n’avait de toute façon rien fait dernièrement pour mériter quoi que ce soit. Les jumeaux ?? Pas trop leur genre non plus, pas assez subtil ni assez imaginatif. Restait Ron. Mais honnêtement, ça faisait des années qu’ils avaient cessé ce genre de plaisanterie stupides tous les deux.
Il prenait le problème à l’envers. Lui seul avait vu la porte - à moins que Alex se soit fichu de lui, mais ça aussi c’était peu probable, il était capable de distinguer l’innocente moquerie de la vraie surprise sur le visage de sa sœur - et il était tombé dessus dans tous les sens du terme avant que celle-ci ne disparaisse.
Quelques heures plus tôt, alors qu’il prenait sa douche avant le souper, il avait remarqué les bleus marquant son abdomen. Des bleus qui n’auraient pu être fait que s’il avait percuté en pleine vitesse, disons, un petit portillon de jardin… et comme il ne s’était de toute manière pas pris le moindre Souaffle dans le bide aujourd’hui…
Il n’avait pas rêvé cette saloperie de porte.
Et il avait été le seul à la voir…
Poussant un grognement rageur, Harry repoussa ses draps d’un bon coup de pieds, sauta hors de son lit et s’habilla rapidement, avant de sortir le plus discrètement possible - il ne tenait pas non plus à réveiller toute la maisonnée.

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Marcher sur le chemin lui avait fait du bien. Il faisait frais, pas assez cependant pour justifier qu’il enfile le pull qu’il avait noué autour de sa taille au cas où. La lune était presque pleine et il eut une pensée pour Remus qui devrait subir ses tourments dans un jour ou deux. Bien sûr, entre la potion Tue-Loup et la présence de ses amis Animagus, la condition du Loup Garou s’était particulièrement bien arrangée par rapport à ce qu’il subissait dans sa jeunesse.
Harry eut un sourire. Bientôt il accompagnerait son père et ses amis les nuits de pleine lune. Mais il n’en était pas encore là.
Il se renfrogna en arrivant près du bois. Sous les feuillages, la lumière de la lune ne suffisait plus à éclairer correctement et il alluma sa baguette pour voir où il mettait les pieds.
La porte était là. A la même place que plus tôt dans la matinée. Avec ses deux poteaux de soutien, ses ronces et ses herbes folles. Harry frissonna. Il ne savait pas vraiment de quoi cela venait, mais l’endroit ne lui semblait plus aussi inoffensif que lorsqu’il venait y jouer étant enfant. Peut-être était-ce les rayons de la lune traversant le feuillage et faisant des taches de lumières bleutées sur la mousse du sous-bois. Peut-être était-ce la présence de cette porte qui le narguait de toute son illogique existence.
Hésitant, Harry s’avança avec précaution, comme si le portail risquait de lui exploser à la figure, avant d’en faire le tour. Il posa une main sur le dessus. La sensation était celle à laquelle il s’était attendu, celle du bois frais à la peinture légèrement écaillé, un peu humide à cause de la rosée. Il déglutit sans trop savoir pourquoi. Que se passerait-il s’il passait la porte ? Se passerait-il seulement quelque chose ?
Il haussa les épaules. Il ne pourrait pas le savoir s’il n’essayait pas, pas vrai ?
Il n’y avait qu’un petit loquet pour tenir la porte fermée. Impulsivement, il tendit la main dans sa direction et le tira, avant de pousser le battant.
Il y eu un léger couinement venant des gonds.
Le cœur battant, Harry passa la porte.
Rien. Il n’y eut rien. Pas de grand flash de lumière, pas de roulement de tambour ou quoi que ce soit d’autre. Harry passa une main sur son visage et souleva son t-shirt pour vérifier qu’il ne lui avait pas poussé des cornes ou des écailles ou tout autre appendice ridicule.
Mais non. Il n’y avait rien. Rien pour expliquer la présence de cette porte et rien n’indiquant qu’elle servait à quoi que ce soit. Machinalement, il referma le battant et remit le loquet en place avant de rentrer chez lui. Il ressentait vraiment le besoin de dormir, soudain, et se mit à souhaiter son lit avec force.

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La porte avait fait quelque chose, réalisa Harry après une bonne minute d’inactivité cérébrale. C’était la seule explication logique, la seule qui explique ça. Ou alors, si c’était une plaisanterie, elle était menée d’une main de maître.
Car il faudrait un maître pour faire disparaître Godric Hollow, son jardin, son muret et son petit chemin, pour faire disparaître la fontaine de sa mère et les saules, la terrasse avec la grande table en bois, la niche du chien… tout…
Harry sentit sa respiration s’accélérer et sa vision se brouiller. Incapable de rester debout et immobile, il se laissa tomber sur le bord du chemin, ignorant les cailloux qui lui blessèrent les genoux. Il ôta ses lunettes d’une main tremblante et se frotta les yeux convulsivement.
Sa. Maison. Avait. Disparu.
Il remit ses lunettes et prit une inspiration, s’obligeant à se calmer. Il se leva, les jambes encore peu assurées, mais ignora cet état de fait pour enjamber le fossé qui le séparait du terrain où aurait dû se trouver sa maison. Les herbes étaient hautes, encore bien vertes. Il y avait un grand buisson d’épineux plus ou moins au centre et Harry, en s’approchant, le reconnut avec un coup au cœur. C’était le gros buisson d’églantines qui avait trôné au milieu de la pelouse pendant des années avant que sa mère ne se décide à l’enlever ; devenu trop grand, il envahissait l’espace.
Mais ce buisson-là était sauvage, n’avait jamais été taillé ou soigné. Ou alors, pas depuis des lustres…
Harry tourna un peu sur lui-même. Avait-il remonté le temps ? Mais il savait que ce n’était pas le cas avant même de finaliser sa pensée. Godric Hollow telle qu’il la connaissait avait été construite plus de deux siècles auparavant, sur les ruines d’un petit manoir plus ancien encore. Le buisson d’églantines n’était pas là depuis tout ce temps…
Il fit quelque pas dans les herbes hautes, manquant se prendre les pieds dans quelques ronces rampantes. Un bruit de craquement l’intrigua et il se baissa, pour remonter à hauteur de ses yeux un vieux morceau de tuile rouge.
Du même rouge que celles de Godric Hollow…
La maison est détruite… réalisa-t-il avec effarement. Sa poitrine se serra et il cligna des yeux pour en chasser les larmes qui y avaient élu domicile, avant de secouer la tête.
La porte… c’était la faute de cette foutue porte. Lâchant le morceau de terre cuite, il s’élança en direction du chemin. Il fallait qu’il reparte d’ici, il fallait qu’il rentre chez lui. Qu’il repasse la porte… il s’étala de tout son long quelques mètres plus loin et, se retournant, eut un haut le cœur en réalisant que ce qui avait causé sa chute était un morceau de mur dont l’intérieur avait brûlé.
Il se releva comme s’il était poursuivi par le diable lui-même et courut plus vite qu’il n’avait jamais couru. La poitrine lui brûlait quand il revint, à bout de souffle, à l’endroit où se trouvait la porte. Où s’était trouvée la porte…
- Oh non, non !! hurla-t-il en la cherchant des yeux, tournant sur lui-même, serrant sa baguette dans la main, unique point d’ancrage à sa réalité.
La porte n’était plus là. La porte ne l’avait pas attendu, elle n’allait pas le ramener chez lui. Une vague d’horreur le traversa et il ne put rien faire pour empêcher les larmes de couler. Ses parents, sa sœur, ses amis… est-ce qu’il était le seul humain à des lieux à la ronde, ici ? Est-ce que le village moldu existait, est-ce que l’école déménageait encore ?
Il s’adossa à un arbre, le souffle court. Il se laissa glisser contre l’écorce rugueuse, les paumes contre ses yeux fermés, essayant de se retenir de pleurer comme un gamin.
Non, non, non… ce n’était pas possible, la porte devait bien être quelque part, tout près peut-être, le narguant, se moquant, attendant qu’il se décide à la chercher, à se ridiculiser en pleurant et en hurlant comme un bébé.
Il se releva d’un bond et fixa l’endroit où elle aurait dû être. Elle avait disparue le matin même et était bien revenue, non ? Il suffisait d’attendre, d’attendre qu’elle réapparaisse. Car elle allait réapparaître. Elle devait réapparaître…

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Le matin prit Harry par surprise. Les chants des oiseaux et le soleil levant le réveillèrent de concert et il sursauta.
Il s’était endormi, enroulé en chien de fusil dans les feuilles mortes au pied d’un arbre, à quelques mètres à peine d’où devait se trouver la porte. La porte n’était pas là. Il eut un instant de colère vis-à-vis de lui-même en se rendant compte qu’elle était peut-être apparue quelques instants lorsqu’il dormait. Peu importe. Il attendrait encore.
Un gargouillement lui tordit l’estomac. Il l’ignora.
Il avait soif aussi. Il l’ignora.
Sa vessie était pleine. Il l’ignora.
Ses yeux le brûlaient à force de toujours fixer le même point. Il les ignora.
Il piqua du nez et releva la tête brusquement, clignant des yeux. Ça n’allait pas. Ça ne servait à rien. La porte ne revenait pas.
Que faire ? Harry repoussa l’envie de pleurer qui lui étreignait la gorge. Ce n’est pas ça qui allait l’aider de toute manière. Rester là n’allait vraisemblablement pas l’aider non plus. Il fallait qu’il se bouge ses fesses, qu’il fasse quelque chose d’utile. Qu’il cherche la porte. Elle avait dû changer de place après qu’il l’ait passé. Mais où pouvait-elle être maintenant ?
Il ne la retrouverait pas seul. Il avait besoin d’aide. Harry se releva avec peine et s’étira avec quelques précautions ; son dos était endolori par cette nuit dans les feuilles mortes et il renifla machinalement. Il sortit du bois d’un pas un peu automatique, sans trop prêter attention à où il mettait les pieds, trébuchant dans les branches mortes, et rejoignit le chemin.
Il se retrouva à nouveau devant le terrain en friche où aurait dû se trouver Godric Hollow. Que faire ? Où aller ? Il songea un instant à transplaner directement au Terrier mais se retint. Qui sait ce qu’il allait trouver là-bas, des ruines aussi ? Une autre maison ?
Et Poudlard… Poudlard existait-elle encore ?
Il déglutit. Il n’y avait pas trente-six moyens de s’en assurer…
Il transplana.

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Le soulagement qui lui étreignit le cœur lorsqu’il vit la haute silhouette de Poudlard se découper dans le paysage fit apparaître un sourire béat sur son visage. Poudlard était là, Poudlard n’était pas une ruine vieille de plusieurs années comme l’était sa maison. Et Poudlard était aussi un peu comme sa maison, en fin de compte…
Il poussa un soupir de soulagement avant de s’avancer résolument dans le domaine de l’école. Aucun bruit ne s’élevait de la haute bâtisse et il s’en inquiéta quelque peu avant de se souvenir que c’était maintenant les vacances d’été - en espérant que ce soit le cas ici aussi…
Il hésita quelques instants devant les hautes portes du château avant de frapper. Il entendit l’écho de ces coups se perdre dans les couloirs et eut un petit sourire amusé avant de s’appuyer sur les battants pour les ouvrir.
Le Grand Hall était identique à ses souvenirs. Les mêmes statues, les mêmes tapisseries, le même sol dallé. La même odeur de vieilles pierres pleines de vie.
- Monsieur Potter, fit une voix grinçante bien trop près de son oreille.
- HYAAAH !!! hurla Harry en bondissant un bon mètre plus loin.
Rusard eut un mouvement de recul surpris, comme s’il ne s’était pas attendu à une telle réaction venant de lui.
- Monsieur Rusard… gémit Harry en faisant un sourire contrit - mais néanmoins crispé. Vous m’avez fait peur…
Rusard grimaça quelque peu, laissant apparaître ses chicots jaunes sur le côté de sa mâchoire.
Beeeeeeerk… eut le temps de songer Harry avant de sentir avec horreur un truc se frotter contre ses jambes. Il baissa le regard pour constater que ce n’était pas ce à quoi il s’était attendu. Deux yeux verts plongèrent dans les siens, lui donnant l’impression dérangeante de lire en lui comme dans un livre ouvert. La frimousse intelligente du jeune chat n’avait rien à voir avec celle horrible et mauvaise de Miss Teigne.
Alex m’avait pas dit que le vieux avait changé de chat… songea-t-il en suivant des yeux la silhouette souple qui alla s’enrouler avec grâce autour des jambes de Rusard. Il se secoua quand il se rendit compte qu’il n’avait pas quitté l’animal du regard et que le concierge s’impatientait - sans toutefois sembler oser lui demander de s’expliquer.
- Heu… est-ce que le professeur Dumbledore est ici ? demanda finalement Harry.
Jamais il n’avait vu une telle expression d’incrédulité chez Rusard et Harry se demanda si l’homme n’avait pas fait une attaque ou quelque chose de plus ou moins équivalent.
- Vous ne trouverez pas Albus Dumbledore ici, monsieur Potter, finit pas dire le concierge du ton doucereux avec lequel il argumentait les punitions qu’il estimait juste pour les élèves irrespectueux du règlement.
Pour sa part, Harry estimait avoir expérimenté ce ton assez souvent pendant sa scolarité, merci pour lui.
- Et où est-ce que je pourrais le trouver, s’il vous plait, monsieur ? demanda-t-il avec une certaine effronterie.
Ce n’était pas comme si Gryffondor risquait de perdre des points par sa faute après tout, puisqu’il n’était plus élève à Poudlard depuis des années.
Rusard eut une sorte de reniflement moqueur et peut-être un peu incrédule.
- Vous avez plus de chance de trouver monsieur le Ministre au Ministère, monsieur Potter, indiqua-t-il d’une voix doucereuse.
Harry s’étouffa. La chat miaula une moquerie quelconque.
- Bonne journée, monsieur Potter… susurra Rusard.

¤¤¤

Dumbledore.
Ministre.
Okay.
Bien sûr, pas de problème. Zen. Tout est normal.
Dumbledore était ministre ?
- Malédiction… gémit-il en atteignant les limites du domaine de Poudlard.
Il doutait que qui que ce soit de son entourage ait oublié de lui dire une telle chose. Il sentait venir les embrouilles à grands pas. Rectification. Il était dans les embrouilles jusqu’au cou depuis qu’il avait passé cette saloperie de porte. Depuis qu’il avait vu cette saloperie de porte… depuis qu’il lui était rentré dedans.
- Bordel, je veux rentrer chez moi… murmura-t-il au bord du désespoir.
Il secoua la tête dans une tentative infructueuse de se remettre les idées en place. Ça ne marchait malheureusement pas très bien, mais au moins il évitait de se poser trop de question. Il avait la sensation que se poser trop de question ne serait pas une bonne idée pour la sauvegarde de sa santé mentale.
- Bon, le Ministère… marmonna-t-il pour lui-même en se concentrant pour transplaner dans l’Atrium.
Il se demanda vaguement si c’était une bonne idée de transplaner, après tout il ne savait pas trop ce qui pourrait lui tomber sur le coin de la figure. Si Dumbledore était Ministre, Snape était peut-être chef de la Division des Aurors.
Il eut une grimace à cette pensée. Peut-être que finalement, aller expliquer son problème au prof… à Dumbledore n’était pas une si bonne idée que ça. Mais que faire d’autre ? Où aller ? S’il savait où trouver ses parents ou son parrain, il irait immédiatement. Mais il n’y avait rien là où James et Lily Potter auraient dû vivre et il n’était pas sûr de pouvoir trouver Sirius à son appartement du Chemin de Traverse.
Le Ministère, donc.
Advienne que pourra.
Harry transplana directement dans l’Atrium. Il était déjà venu plusieurs fois - pour passer son permis de transplaner, pour diverses affaires administratives ou simplement pour voir son père qui était Auror - et, retrouvant ses marques, il jeta un coup d’œil à l’affreuse fontaine qui trônait au milieu de l’endroit. Enfant, les statues du centaure et de l’elfe l’avaient terrifié… il eut un petit sourire à ce souvenir tout en se dirigeant avec une certaine assurance jusqu’au guichet de la sécurité.
L’agent en poste le regarda s’avancer avec une certaine incrédulité.
- Monsieur Potter ? s’étonna-t-il. Il y a un problème ?
Harry cligna des yeux. Il ne s’y était pas attendu. Il se demanda une seconde si l’homme ne l’avait pas pris pour son père, après tout ce ne serait pas la première fois que cela arrivait, mais James Potter avait tout de même vingt ans de plus que lui et à une aussi courte distance les gens ne pouvaient guère s’y tromper.
Il décida de ne pas trop chercher à savoir. Il fallait qu’il trouve le prof… Dumbledore. Après il serait toujours temps de piquer une petite crise d’hystérie.
- Heu… est-ce que… monsieur Dumbledore est là ?
- Et bien, oui, comme toujours… répondit l’agent avec un air perplexe.
- Ah… bon… merci, fit-il en rougissant quelque peu, se sentant relativement idiot.
Harry s’éloigna de l’homme qui ne semblait pas trouver utile de vérifier sa baguette. Il n’allait pas s’en plaindre, mais bon…
- Il n’a pas l’air plus grand que d’habitude ? entendit-il dans son dos.
Il cligna des yeux mais décida qu’il-ne-voulait-pas-savoir.
Il entra machinalement dans l’ascenseur en même temps que trois autres sorciers qui le saluèrent, avec entrain pour l’un d’eux, et avec un signe de tête pour les deux autres. Il grommela un « bonjour » gêné en baissant la tête. Il ne les connaissait même pas ces types !! Ils descendirent trois niveaux plus bas et il hésita un instant avant de se souvenir que le bureau du Ministre se trouvait au premier niveau. Normalement. Il pouvait s’attendre à tout…
Finalement la porte de l’ascenseur s’ouvrit et, devant la porte décorée et dorée, une gargouille gardait l’entrée.
- Malédiction, marmonna-t-il.
Combien de fois avait-il essayé de trouver le mot de passe du bureau de Dumbledore quand il était gosse ? Et sans jamais y arriver bien sûr.
- Avez-vous rendez-vous monsieur Malédixion ? demanda poliment la gargouille.
Harry se demanda si éclater d’un rire hystérique, là, maintenant, tout de suite, serait approprié.
- En fait, non, mais… il faudrait que je voie le prof… Monsieur le Ministre, c’est très… urgent.
- Vous n’avez donc pas rendez-vous, fit la gargouille sur un ton de reproche.
- Non, mais… il faut que je lui parle, s’il vous plait, je suis venu de loin et c’est vraiment très urgent et…
La gargouille secoua la tête de droite à gauche avec un air quelque peu contrarié.
- J’annonce monsieur Malédixion, alors ?
- Hein ? Non, non ! Je suis le fils de James Potter, il travaille ici !
Enfin, j’espère, songea-t-il en se mordillant la lèvre. Qui sait ce qui pourrait encore lui tomber dessus ? Tout semblait aller de mal en pis depuis qu’il avait passé cette fichue porte.
La gargouille cligna des yeux et sembla réfléchir très sérieusement à ce qu’il venait de dire.
- Vous êtes donc Harry Potter, soupira-t-elle.
- Ben vi…
La gargouille l’annonça avant de pivoter sur elle-même pour dégager le passage, et Harry s’avança avec hésitation dans le grand bureau qui lui faisait face. Il n’était pas entré très souvent dans l’antre du Directeur de Poudlard - certainement moins que son père et ses acolytes - mais l’ambiance générale semblait être la même, du moins à première vue.
De nombreux tableaux recouvraient l’un des murs et le suivirent des yeux tandis qu’il s’avançait. Baissant la tête, il constata que son jeans n’était pas un exemple de propreté après une nuit passée dans les feuilles mortes, et il entreprit de le frotter du plat de la main pour le nettoyer.
- Bonjour Harry, que me vaut cette visite matinale ? Fit une voix douce qu’il reconnut immédiatement.
Harry bondit pour se retrouver face à Dumbledore ; le vieil homme était tel qu’il se souvenait de sa scolarité, quoique apparemment habillé de manière plus riche - mais c’était peut-être une idée qu’il se faisait.
- Pro… Monsieur… balbutia-t-il, soudainement incapable de dire quoi que ce soit.
Il aurait voulu exprimer son soulagement à trouver enfin une figure connue - Rusard ne comptait certainement pas - et exposer son problème afin que l’homme trouve une solution, mais rien ne sortit.
- Quelque chose ne va pas ? demanda poliment Dumbledore.
- Je… je suis désolé de venir vous voir monsieur, mais je ne savais pas vers qui me tourner, je… je ne comprends plus rien, je ne sais pas ce qui se passe ! Je croyais vous trouver à Poudlard, et ma maison a disparu, et cette foutue porte aussi et elle ne voulait pas réapparaître et je suis complètement…
Il s’interrompit le temps de prendre une inspiration hachée.
- Je suis complètement paumé, croassa-t-il finalement.
Il releva les yeux sur Dumbledore, attendant de l’homme qu’il remette tout en ordre en quelques paroles et un petit geste, tel qu’il se devrait de le faire. Mais Dumbledore n’ouvrit pas la bouche, il resta là à le fixer avec une sorte d’intérêt mêlé à de la curiosité. Il s’écoula de longues secondes d’agonie avant que Harry, n’en pouvant plus de ce silence, n’appelle :
- Monsieur ?
- Asseyez-vous monsieur Potter, proposa doucement Dumbledore en lui présentant un fauteuil du geste de la main.
Harry s’exécuta, se rapprochant pour cela du vieil homme qui le suivit des yeux avec un intérêt tout calculé. Il se laissa tomber dans le confortable fauteuil avec un certain soulagement ; il n’était pas certain que ses jambes l’auraient porté beaucoup plus longtemps. Il se frotta les yeux de la paume de ses mains, épuisé.
- Pour commencer, pourriez-vous reprendre du début ? Calmement je vous prie, demanda Dumbledore en s’installant dans son grand fauteuil derrière son bureau.
- Je… oui. Hier matin je suis aller faire un peu de Quidditch avec Alex. Ma sœur, Alexandra Potter, précisa-t-il devant le haussement de sourcil de Dumbledore. Et en chemin je suis… tombé sur une porte, enfin une espèce de petit portillon de jardin, mais tout seul au milieu de bois, raccroché à rien, vous voyez… et… j’arrivais pas à dormir cette nuit alors je suis retourné voir ce truc et… je sais pas pourquoi j’ai fait ça, je l’ai ouvert et je l’ai traversé. Il s’est rien passé sur le coup, rien du tout, j’ai rien vu, rien entendu, rien senti. Mais quand je suis arrivé à la maison, elle était plus là…
- Votre maison…
- Godric Hollow.
- Vraiment ?
Le ton de Dumbledore était presque amusé et Harry se demanda s’il devait s’en inquiéter.
- Qu’avez-vous fait ensuite ?
- Je suis retourné dans le bois, pour repasser la porte, dit Harry comme on s’excusait. Mais elle avait disparu. Je l’ai cherchée, je me suis dit qu’elle allait revenir alors j’ai attendu et… mais j’ai attendu toute la nuit et elle n’est pas revenue. Et la maison n’est toujours pas là, et… je suis allé à Poudlard mais on m’a dit que vous étiez Ministre et… mais depuis combien de temps vous êtes Ministre, au fait ?
- Cela fait quatre ans, monsieur Potter.
- Ah. Je doute qu’on ait oublié de me dire un truc dans ce genre… fit-il avec résignation.
C’était officiel, il était tombé dans la quatrième dimension.
- Cela me semble difficile, en effet, sourit Dumbledore avec une certaine indulgence.
- Est-ce que j’ai fait un saut dans le futur ou quelque chose comme ça ? demanda brusquement Harry, l’idée venant de lui traverser l’esprit.
- J’en doute, rétorqua Dumbledore. Le Harry que je connais a 21 ans, presque 22, et nous sommes le 30 juin 2002.
Harry cligna des yeux.
- Le Harry que vous connaissez… ? murmura-t-il, incrédule.
Le regard de Dumbledore se fit grave soudain, et Harry frissonna quand l’homme se pencha dans sa direction pour demander d’une voix presque menaçante :
- Qui êtes-vous ??
- Mais, mais… haleta Harry. Je suis Harry Potter, monsieur, je ne comprends rien…
Dumbledore fronça les sourcils. Il ne semblait pas vouloir le croire et Harry était foutu. Il allait finir atomisé sous la puissance du sorcier avant d’avoir pu comprendre ce qui lui arrivait et pourquoi il était ici et pourquoi cette saloperie de porte n’avait pas voulu réapparaître quand il avait voulu rentrer chez lui.
Il ferma les yeux, s’attendant à être avadakedavré dans les secondes à venir, mais il n’entendit qu’un chant mélodieux avant qu’un poids agréable ne se pose sur ses genoux. Il souleva une paupière prudente pour découvrir que le phénix de Dumbledore s’était confortablement installé sur ses cuisses et le fixait avec affection. Il poussa une trille joyeuse avant de s’enrouler sur ses genoux, Harry s’attendant presque à l’entendre ronronner.
Il cligna des yeux, ahuris, avant de penser à lever le regard vers Dumbledore. Le vieil homme le fixait avec une surprise non dissimulée et peut-être un peu de soulagement aussi.
- Très bien, finit-il par dire. Je m’en remets au jugement de Fumseck, monsieur Potter.

(à suivre)

La deuxième partie viendra plus tard... vous avez le droit de commenter!! ^o^

one-shot, monde 4, monde 5

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