Jun 27, 2008 14:51
Salazar se réveilla ce matin-là, chatouillé par les rayons joueurs de l’aube. Battant des paupières, il émergea d’un lourd sommeil par la chaude lumière sur son visage. Un vent léger anima sa cape en de doux plis. Une chaude odeur de terre finit par le convaincre qu’il ne s’agissait pas d’un rêve, mais bel et bien d’une aube délicieuse. Lorsqu’il tenta de se lever, il fut d’abord surpris de remarquer quelles avaient été ses conditions de sommeil. Il était accroupi sur le sol et enserrait un arbre dans ses bras. Sa tête reposait contre l’épais tronc.
Se détachant de son végétal oreiller, il frotta longuement sa joue creusée par l’écorce. Il gratifia la nature d’un bâillement sonore. Il étira ses bras et ses épaules, puis se releva en s’aidant des creux du bois. Une fois debout, son visage se posa une nouvelle fois contre le tronc, déjà lassé par l’effort de se lever de si bon matin.
Il lui semblait sentir la résine affleurer sous l’écorce. Au creux de son arbre, il décida de réfléchir aux évènements qui l’avait, une fois de plus, conduit à se réveiller sans savoir où il se trouvait.
Tout d’abord, je constate que le jour vient juste de poindre. Nous sommes le matin. Fantastique. Ensuite, je reconnais ce chêne, il se trouve à une centaine de pas de ma grotte. Par conséquent, je sais où je me trouve. Merveilleux. De plus, aucun bruit ne venant perturber mes tympans, je n’ai nul besoin de me retourner pour savoir que Godric n’est point là. Enfin une heureuse nouvelle. Mais comment en suis-je arrivé ici ?
« Aie ! »
Le jeune sorcier n’eut pas le temps de s’interroger. De son nez, un filet de sang gicla, et s’écoula désagréablement sur ses lèvres. Salazar s’épongea doucement à l’aide d’un mouchoir qu’il conservait dans ses manches.
Après une petite enquête mentale sur son propre corps, il constata qu’il ne ressentait nulle douleur. Il se sentait plutôt en forme. L’écoulement nasal cessa rapidement. Salazar s’appuya de nouveau contre l’arbre.
Je me souviens parfaitement du jour où Godric est arrivé, notre beuverie, notre combat…
Il caressa sa tempe où une bosse diminuée subsistait.
Hier matin, je sais que je me suis réveillé dans un état de fraîcheur disons contestable, et que nous avons discuté. De quoi ?
Salazar scruta les sillons du bois qui couraient devant ses yeux. Faire ressurgir les souvenirs de la veille était incroyablement pénible. Une brume épaisse avait envahit des zones de sa mémoire.
Je lui ai révélé que je parle le fourchelangue. Oh non…
Le mage grimaça de dégoût et cogna du poing l’innocent chêne.
Là, je saisis pourquoi ce fut si difficile de me rappeler tant de honte…
Après avoir marmonné une douzaine d’insultes entre ses dents, Salazar reprit son travail de mémoire.
Passons le détail de cette faiblesse de ma part…Revenons plutôt aux informations importantes : Godric m’a parlé de la formidable réputation que mes poisons ont à travers tout le pays…KssKss… Je n’ai pas tout perdu à le rencontrer ce bougre… Maintenant, je sais que je ne suis plus très loin de l’excellence dans les arts obscurs…KssssKsss….
Tout à son autosatisfaction désormais, le jeune homme fantasma un moment sur son avenir de maître du monde.
Et après… Euh… Je me suis levé ici. Non, c’est impossible. Il s’est passé quelque chose entre temps.
Un vide de ténèbre emplissait l’esprit de Salazar. Ce n’était pas de l’ignorance pure et simple, il ressentait la lourde présence d’un vide aux dimensions intersidérales. Son incapacité à appréhender ses propres souvenirs le laissait perplexe.
Réfléchissons mieux. Nous avons parlé un moment et ensuite…
« Aie! Mais ! »
De nouveau le sang s’était mis à couler dans son nez. Le flot d’hémoglobine avait jailli avec une puissance égale à la soudaine douleur sur son front.
Salazar épongea du mieux qu’il pu l’épais liquide rouge de son visage. Faisant fi de ce contretemps, il continua sa plongée dans le noir oubli.
Il m’a raconté une longue histoire sur…sur…
Salazar s’écroula sur ses genoux en un cri étouffé. Une violente vague déversait le sang en de gros bouillon ; Le jeune homme tenait pathétiquement son nez meurtri au creux du mouchoir.
Levant la tête pour arrêter l’écoulement, il ressentit l’affreux goût de rouille couler à l’arrière de sa gorge. Il se pencha à nouveau vers ses jambes, recroquevillées entre les racines. Une barre de douleur lui traversait le crâne.
Mais qu’a-t-il donc pu se passer pour me provoquer un tel saignement de nez ? Il faut que je me souvienne !
Un nouveau relent enserra plus fort son front. L’hémoglobine ne cessait de couler, dépassant le cadre du tissu imbibé et se répandant sur ses mains et sa tunique. Salazar avait l’esprit de moins en moins clair, épuisé par la purge sanguinaire.
Bon d’accord, sale nez rebelle. Je ne chercherais pas à savoir ce qui s’est passé. Pour l’instant.
Détachant sa cape, il s’en servit pour s’éponger et retrouver un semblant de propreté.
Il se reposa un instant aux creux de l’arbre puis, au moment où il allait se lever pour se rendre dans sa grotte, il remarqua sur le sol, bloqué dans une racine, une petite forme étrange.
Il tendit les doigts vers elle et l'attrapa avec deux doigts. Lorsqu’il la rapprocha de ses yeux, il se raidit de surprise.
Mais que fait donc ici le saucisson que m’avait jeté dessus ce Gryffondor la première fois que nous nous sommes vus ?
Comme il avait renoncé à toute réflexion sérieuse avant d’avoir atteint le confort de sa caverne, Salazar se contenta de l’épousseter et de le caler dans sa ceinture. Il se leva enfin, agrippant les creux du bois de ses mains.
Il se retourna, prêt à s’engager dans la direction qu’il connaissait si bien. Son pied resta en l’air, figé dans la surprise. Ses yeux s’écarquillèrent en grand. Sa mâchoire tomba et sa bouche ne se referma pas.
Le seul arbre encore debout était celui qui lui avait servi de support jusqu’à l’instant présent.
Tous les végétaux avaient été arrachés, brûlés, décapités. Certains arbres avaient été retournés, et des racines zébraient le ciel à la place des branches. D’immenses roches inclinées reposaient sur une lande noire, sans herbe. Sur le côté, au contraire, des centaines de monticules de terre faisaient onduler le sol pareillement à des vagues en haute mer. Une fraîche bourrasque l’aspergea de poussière. Une odeur de terre retournée pesait sur le décor apocalyptique.
Salazar tenta de reconnaître ces anciens marécages mais même les étangs n’étaient plus à leurs places. Les étranges monticules ronds jouxtaient des sillons remplis d’eau noirâtre, lignes brisant le sol à perte de vue. Toute une partie du marais s’était figée en sculptures sombres, cadavres d’arbres ou d’animaux frappés par la foudre, glacés par un gel surnaturel qui ronge les chairs.
Ce désastreux paysage était baigné d’une douce lumière de matinée, indifférente aux formes hideuses qu’elle caressait. Les marais où s’animaient tant de vies animales et végétales s’étaient fixés en un décor immobile. Seuls quelques branchages emmêlés s’agitaient sous le souffle du vent.
Le jeune homme avançait chancelant parmi tous ces souvenirs mis à terre. Sa jeune vie entière gisait en un étrange phénomène dont il ignorait la cause. Cependant, il en devinait aisément les conséquences.
Dans un élan de panique, Salazar courut dans la direction où devait se trouver son refuge. Il n’y avait nulle trace de la colline qui abritait sa caverne. Tout était rasé, emporté, balayé, disparu…
Salazar tomba à genoux. Levant ses paumes vers le ciel, il s’écria :
« Merlin noooon ! Mes livres ! Mes chaudrons ! Mes belles potions ! »
Il se recroquevilla sur le sol et martela de ses poings avec toute la colère de son impuissance :
« Et mon chapiiitreuuu ! »
Le jeune mage était prêt à céder au désespoir. Mais un souvenir fulgurant le fit sursauter.
Ma cachette. Elle est dans ce chêne. Mon trésor. Peut-être que….
Le sorcier Serpentard se releva d’un bond et s’élança de toutes ses jambes vers l’unique être vivant des environs. Il courut à perdre haleine, franchissant cadavre et débris sans y prendre garde. Il se retourna à peine lorsqu’il reconnu le tronc déchiqueté d’un pommier situé normalement à 3 lieues de là. Les fruits verts éparpillés tout autour contrastaient étrangement avec cet endroit de mort. Il arriva à l’arbre au trésor, celui-là même où il s’était réveillé. Il fit rapidement le tour de son immense base.
Il allait se saisir de la branche permettant de grimper jusqu’à sa cachette quand il fut une fois de plus pétrifié de surprise.
Sur le bas branchage reposait Godric en un pitoyable état. Il gisait, inconscient, allongé en travers de la branche. Des plaies couvraient entièrement ses bras et son visage.
Salazar recula de quelques pas devant le spectacle. Une des mains pendante du chevalier avait la chair à vif. Son armure se détachait en lambeaux. Sur le sol, exactement en dessous de lui se trouvait son épée. Mais si la poignée brillait encore des joyaux incrustés, la lame n’était plus qu’un simple éclat. La mise en scène de ce linceul était tout aussi bien héroïque qu’invraisemblable. Pourtant, malgré l’esthétique mortuaire parfaite, Godric n’était pas mort : on pouvait entendre son souffle calme ainsi que le léger babillement des gens profondément endormis.
A cette constatation, Salazar sentit poindre un léger désappointement, qui passa rapidement à une exaspération noire.
« Tu es encore en vie, toi ! » cria-t-il à l’intention du blessé.
Le mage se saisit d’une pomme verte se trouvant prés de ses pieds. Il la balança sur Godric.
« Je parie que tu es le responsable de tout cela ! »
Le jeune homme se rua sur un autre fruit qu’il jeta de toutes ses forces. Elle atteignit le sorcier blond sur le côté et ce dernier émis un grognement en retour, sans toutes fois s’éveiller.
Salazar sauta de pomme en pomme et les gratifia toute d’un sort semblable, inventant par là même la lapidation fruitière.
« Qu’est-ce que tu as fait à mes beaux marécages! Infâme créature !»
Un projectile frappa les pieds de Godric.
« Je suis sur que c’est de ta faute ! »
Le fruit vert atterrit sur la figure de l’inconscient, et s’explosa à moitié sur la branche en éclaboussant le pauvre visage de jus. KsssKss… Encore, c’est trop amusant…
Une salve de pommes bien visées fit tressauter le corps qui émit quelques faibles plaintes.
« Et en plus, ne t’approche pas de ma cachette secrète ! »
Un ultime lancer fit basculer Godric. Il chuta de quelques pieds pour s’écraser sur le sol en un bruit mat. Salazar leva les deux bras et poussa un puissant et féroce cri victorieux. Je suis le meilleur !
Le jeune mage s’approcha doucement du chevalier qui reprenait conscience dans une grimace. KssKss…Pauvre être faible…Il est temps de reprendre mon dû. Je veux plus de ta cape, ce n’est qu’un lambeau maintenant. Par contre le béret….
Salazar lui vola son chapeau. Il ôta un peu de poussière, gratta sommairement le sang séché et le plaça sur son crâne en un sourire diabolique. KssKss… Je suis un être dur et sans pitié…KssKsssKss... Otez-vous de mon chemin, manant!
Puis, prenant bien soin de se servir de Godric comme marchepied, il grimpa sur la branche libérée puis continua sa montée vers la cachette qui gardait ses richesses.
Mon trésor… Tout ce que je suis… Tout ce qu’il me reste…
fic,
quand godric rencontra salazar