Le son pop rock

Jan 25, 2007 22:03

Quand j'étais plus jeune, mon grand rêve était de travailler dans le milieu de la musique, genre être journaliste, pour pouvoir recevoir tous les jours des cadeaux dans mon courrier. Même si souvent, la réalité n'est pas toujours conforme à ses fantasmes (pour un disque de Sufjan Stevens, combien de compiles moisies de jeunes artistes à dreadlocks certifiés Talents Fnac?). Aujourd'hui le fantasme du journaliste musical a vécu : avec une connexion internet et Soulseek, c'est tous les jours Noël et on n'est même pas obligé de se farcir le dossier de presse du dernier Carla Bruni.

Mardi soir, mon boss est venu me voir avec une invit' pour un concert privé organisé par la radio RTL2. L'affiche n'était pas des plus excitantes : Olivia Ruiz, Louis Bertignac et Keane. Bonjour, je suis le coeur de cible d'RTL2, j'ai 35 ans et j'écoute de la musique en sourdine dans ma C2 en rentrant du travail, mais j'aime le rock'n'roll, tant que ça me fait pas trop mal au dos et aux oreilles. J'adooore Moby, boire du lait au Starbucks et me coucher pas trop tard, je fais des dîners entre amis où l'on s'écoute l'album de Ayo en parlant des primaires du Parti Socialiste. En un mot, je suis chiant comme la pluie, et toutes les cartes UGC du monde ne pourront rien y faire car je suis comme ça, j'écoute RTL2. Hum.

D'une certaine façon, mon fantasme de "cadeaux" se réalisait sous mes yeux, mais v'là le cadeau... Ceci dit, j'aime beaucoup Keane, qu'il serait dommage de caricaturer en groupe mièvre et cucul, car il faut bien reconnaitre qu'ils ont un talent certain. En plus le chanteur a le mérite d'avoir écrit la seule chanson à sauver du dernier album de Gwen "Yodiyo-itouuuu" Stefani. Et le concert était à l'Olympia, une salle "mythique" pour les Parisiens parait-il. Moi je me souviens juste d'un super concert de Garbage là bas, où Shirley Manson s'était faite envahir sur scène par un fan déchaîné, elle tentait de le virer, je ne sais plus ce qu'il essayait de faire (lui agripper la cuisse?), et elle fut obligée d'arrèter de chanter pour lui dire "Easy... EASY !!" d'un ton ferme de dominatrice SM. C'était très drôle.

Oui donc ce concert. Il faut d'abord préciser que pour me rendre sur les lieux, j'ai failli mourir compressé dans le métro sur la ligne 8. Je ne savais pas que le soir cette ligne était aussi bondée, je suppose que les Parisiens sortent je ne sais où. On était tellement serrés que j'avais ma main posée sur le torse d'un mec (un vieux moche évidemment) et je pouvais plus la bouger, c'était assez dégueu comme ambiance.
Arrivé à l'Olympia, je tombe sur un autre gars de mon boulot, un mec du service commercial assez sympa et chaleureux, c'est le premier Parisien sympa et chaleureux que je rencontre (dans le sens sympa comme les mecs du Nord, qui te tapent sur l'épaule alors qu'ils te connaissent depuis une heure), et ça m'a fait plaisir.

Olivia Ruiz débarque sur scène et je pense que je ne changerai pas d'avis sur cette personne. Elle m'indiffère totalement. On aura beau me parler de charisme, de présence sur scène, pour moi c'est juste une "fille sympa" (et encore, est-elle vraiment aussi cool dans la vie, j'ai de gros doutes) qui fait son truc avec conviction, mais manque cruellement de personnalité. Elle interprète ses tubes gnan-gnan pas désagréables au demeurant, elle fait son petit tour de chant, crée une complicité avec son public, le minimum que l'on puisse demander à une artiste finalement, alors pourquoi tout le monde trouve ça trop incroyable? Elle chante deux ou trois chansons en espagnol, et là on sent bien qu'elle fait référence à un univers que les bobos doivent pouvoir décrypter (les films d'Almodovar? "L'auberge espagnole"?), mais qui m'évoquent plus un concert de Shakira que tout autre chose.

J'ai tenu 2 ou 3 chansons de Louis Bertignac et j'ai fini par battre en retraite au bar. Louis Bertignac, bon, respect pour le guitariste blablabla, bête de scène, mec intègre, tout ça, vous diront les quarantenaires dont la jeunesse a été bercée par Téléphone et Police, le sommet de la branchitude et de la classe dans les années euh, anciennes. Mais on est en 2007 et ce vieux grigou sent quand même un peu la naphtaline, même si son public de fans était venu en masse. Trop étrange cet univers de gens qui hurlaient "Vas-y Louis" comme si c'était genre Brian Molko à un congrès de gothopouffes du 11e. J'imagine les fans de Louis Bertignac chez eux en train d'écouter ses vieux concerts enregistrés à l'époque sur leurs cassettes "BASF chrome"...

Je fais l'impasse sur un groupe de merdeux qui s'appelait BP Zoom, du punk français puant signé sur Universal (et après on se demande pourquoi les majors perdent du fric), et je parle du groupe Keane et ensuite je vais me coucher car il est bien tard et j'ai fait 15 pauses pour écrire ce post. Donc je m'attendais à voir débarquer une ribambelle de mecs dépressifs, un chanteur effacé et triste. Keane, c'est un peu les chochottes du rock anglais, ça se lamente et tout est joué au piano, ouin, je me sens largué dans ce monde de brutes, ouin j'ai mouillé mon lit. C'est très beau et j'adhère à 200%, je me suis passé leur premier album en boucle quand il est sorti. C'est bien mieux que Coldplay, plus sincère, plus mélodique, plus assumé, plus tout. Eh bien figurez-vous que Keane sur scène, c'est wock'n'woll. Le chanteur est très sûr de lui et de l'effet que ses chansons déclenchent sur l'auditeur. Il bondit sur scène, se contortionne, il n'est pas très gracieux certes, avec une dégaine à la Christophe-de-la-Nouvelle-Star, mais on ne peut avoir que de la sympathie pour Keane.

Entre les plateaux, papi Zégut racontait sa vie : (Désignant une caisse en bois pourrie dans un coin de la salle) "Et cet ampli, Hendrix a joué dessus, waw quoi". Oué, waw... Je vais me coucher.
Previous post Next post
Up