Chapitre VI

Nov 23, 2009 20:36


- Mais pourquoi il est la celui-là ?!

La nuit était doucement tombée sur la ville et le manoir Le Noir. Peu à peu, les hôtes étaient montés se coucher, seuls ou par petits groupes. Les plus jeunes, tel que Kishin ou Aglaée, avaient été les premiers mis au lit. Cette fois ci, la petite fille avait sagement obéi sans protester et taper du pied, et ses parents avaient été surpris par cette soudaine docilité qu’ils n’avaient jamais aperçu chez l’enfant. Ils ne s’imaginaient pas un instant que la petite fille se relèverait dans la nuit avec un plan bien précis en tête. Ce plan, Miko en était aussi informé, et se devait de le suivre. Il avait été très content des confidences de sa cousine et comptait bien participer à l’expédition nocturne avec elle, bien qu’il ne sache pas exactement le but à atteindre et les objectifs à remplir.

Si Aglaée en avait avant tout parlé à Miko, c’était parce qu’il était gentil, fiable et que son âge - quinze ans quand même- lui permettait d’avoir conscience de ses actes. Le risque qu’il répète le secret confié ou laisse échapper une indication sur leur expédition était presque nulle, contrairement à Shiro. Du moins, c’était ce qu’elle pensait. Son cousin aux cheveux rouges, lui, ne l’avait pas vraiment interprété de cette manière. Pour lui, cette fameuse « quête » était un vrai jeu, et pour que ce soit amusant, il fallait être plusieurs. Miko avait donc fait part de ce secret, classé pourtant confidentiel par Aglaée, à Yuui. Le garçon de quatorze ans, assez discret parmi tous ses cousins excentriques, avait tout de suite accepté. Il ne savait pas du tout ce qu’ils allaient faire cette nuit pourtant.

Les deux garçons étaient donc arrivés ensemble à la grande surprise et un grand damne d’Aglaée qui dû admettre que Miko n’était peut-être pas le meilleur confident au final et qu’elle aurait dû prendre Kishin. Le trio était donc rassemblé dans la salle de bains des servants du manoir, dans la pénombre. Yuui remarquait cependant que la petite fille avait croisé les bras et affichait un air mécontent. Miko crut bon de se justifier.

- J’ai pensé qu’à trois, ce serait plus sympa, tenta t-il en souriant.

- Je te faisais confiance, répliqua Aglaée. Elle se retourna vers le garçon aux cheveux blancs. Tu ne l’as dis à personne j’espère ?

- Non, personne, s’empressa de répondre le prince. J’ai aussi ma lampe.

- Bon, se résigna la petite fille, tu peux venir. Je préviens, c’est moi qui commande.

- Pourquoi est-ce toi qui commande ?, ronchonna Miko.

- Car c’est moi qui aie trouvé le trésor !

- C’est toujours toi qui commande.

- C’est toujours moi qui aie les bonnes idées. Bien, garde à vous !

Les deux enfants se résignèrent à la contredire et se redressèrent comme des soldats. Aglaée se racla la gorge et passa devant eux comme si elle faisait une inspection. Elle finit par se positionner au, mit ses mains derrière son dos et adopta une posture et une tonalité de sergent donnant des ordres.

- L’objectif de notre expédition nocturne est crucial. Il vous faudra être discret et ne pas faire de bruit. Je vous ai demandé des lampes torches, je vois que vous les avez. Ne les allumez que quand je le dirai. Nous nous rendons dans une salle obscure du troisième étage. La, je vous ferai partager une de mes découvertes de la matinée. Estimez vous heureux d’être ici et au courant de ces confidences. Maintenant, allons-y, j’ouvre la marche, et Miko la fermera.

Les deux enfants acquiescèrent silencieusement. Ils trouvaient que leur cousine en faisait un peu trop mais n’osèrent pas le dire. Aglaée ouvrit tout doucement la porte de la salle de bain, regarda furtivement dehors et leur fit signe de venir. Ils longèrent le couloir du premier étage, marchant sur la pointe des pieds. La montée de l’escalier se fit dans la pénombre la plus totale. La petite fille ne voulait pas allumer les lampes de peur d’attirer les regards de quelqu’un passant par la. Certaines marches grinçaient dangereusement, et les trois aventuriers durent encore ralentir l’allure. Miko, le dernier, pensait qu’à ce rythme, ils seraient au troisième étage quand l’aube se lèverait. Il regarda sa montre, elle indiquait plus d’une heure du matin. Cela faisait déjà trente minutes qu’ils s’étaient donné rendez-vous dans la salle de bain.

Les dernières marches semblèrent les plus courtes. Au bout d’un moment, ils accélérèrent un peu le pas. Finalement, les trois enfants arrivèrent en haut et virent que les volets de cet étage avaient été fermés, ce qui plongeait l’endroit dans le noir. Aglaée les autorisa à allumer les torches et ils commencèrent à avancer. Elle illuminait le chemin grâce à son faisceau pour être sur de ne pas rencontrer d’obstacles. Il arrivait parfois que le parquet grince sans qu’ils sachent pourquoi. Les trois aventuriers venaient de passer la première porte quand un bruit de craquement se fit entendre. Ils se retournèrent d’un trait et guettèrent l’entrée qui donnait sur l’escalier. Quelqu’un venait.

Paniqués, les enfants éteignirent leurs lampes et Aglaée s’engouffra sans plus attendre dans la pièce qu’ils venaient de dépasser. Elle ne voulait certainement pas que son beau plan tombe à l’eau à cause d’un fouineur. La salle était sombre mais facilement reconnaissable, il s’agissait de celle qui servait au regroupement mensuel des hôtes. Ils entendirent de nouveau un bruit significatif, un léger grincement de parquet retentissant. L’inconnu venait de pénétrer au troisième étage. Yuui déplaça quelques chaises et se baisa pour se faufiler sous la tables. Les deux autres le suivirent et refermèrent leur cachette improvisée. Les chaises étaient assez serrées et la table assez basse pour qu’en entrant on ne puisse pas remarquer les enfants. En revanche, si jamais l’inconnu se baissait, il les verrait.

Aglaée espérait fortement que ce trouble-fête n’entrerait pas. Elle se demandait qui ça pouvait être. Miko regardait la porte, silencieusement, priant pour qu’une force invisible fasse qu’elle reste fermée. Malheureusement, elle s’ouvrit, tout doucement, et il pu apercevoir une paire de chaussons noirs. L’inconnu resta sur le seuil puis s’avança et ferma très délicatement la porte. De leur position, les enfants arrivaient à distinguer le bas d’un pantalon aux couleurs claires et un bout de robe de chambre assez pâle. La lumière blanchâtre de la lune ne permettait pas de reconnaître une gamme de ton en particulier. Le personnage longea la table lentement et vint se poster devant l’une des armoires au fond de la salle et resta quelques minutes devant. Les cousins n’osaient pas faire un geste, respiraient lentement, calmement et pour eux, chaque seconde semblait durer une éternité. Finalement, l’inconnu referma les battants de l’armoire et repartit avec la même démarche délicate sur la pointe des pieds.

Aglaée attendit que les bruits du parquet grinçant s’éloignent pour ne plus être qu’un murmure. Un grand silence de quelques secondes s’installa, puis Miko souffla un grand coup pour évacuer le stresse. Il jeta un regard inquiet à ses camarades et poussa à nouveau les chaises pour sortir. Aglaée fit mine de s’étirer et regarda la porte, anxieuse. Elle laissa ses deux compagnons émerger et remettre tout en place avant de les interroger du regard. Aucun d’eux n’avait envie d’engager la conversation, et cet inconnu avait refroidi leurs envies d’aventure.

- A vos avis, c’était qui ?, demanda Yuui en chuchotant.

- Aucune idée, souffla Aglaée. On verra bien demain matin qui a ce genre d’ensemble.

- Chaussons noirs, pantalon et robe de chambre claires, continua Miko, je pencherai pour une femme.

- Je ne pense pas, répliqua la petite fille, il n’avait pas une démarche assez élégante.

- Ah ouais ? Franchement je ne vois pas la différence, répondit le garçon aux cheveux rouges.

- Je suis d’accord avec Miko, ajouta Yuui.

- Vous comprendrez quand vous serez plus grands. Les vrais hôtes, eux, savent faire la différence.

- Hâte de voir ça, marmonna Miko en levant les yeux au ciel.

Les trois sortirent de la pièce et rallumèrent leurs lampes en silence. La suite du chemin se fit rapidement, ils n’avaient aucune envie de retomber sur des inconnus insomniaques farfouillant dans des armoires. Aglaée s’arrêta au bout d’un moment et ils surent qu’ils étaient arrivés à destination. La petite ouvrit doucement la porte. Depuis son passage dans ma matinée, rien n’avait changé. Leurs torches en main, ils effectuèrent le même parcours tordu à présent dépoussiéré. Les deux garçons n’apercevaient toujours pas leur trésor et commençaient à se demander si Aglaée n’avait pas inventé toute cette histoire. Les obstacles franchis, ils virent enfin le petit coffre que leur cousine désignait avec son faisceau doré. Ils se baissèrent et s’approchèrent. Elle l’ouvrit. Le précieux album était encore la. Elle le prit tendrement sous les yeux ébahis de ces cousins qui ne voyaient qu’une pile de livres et de feuilles en vrac.

- C’est quoi comme trésor ?, hasarda Miko.

- Je ne sais pas exactement, répondit Aglaée. Je suis tombée dessus ce matin. Il ya pleins de photos anciennes dans cet album ! Je n’ai pas encore ouvert les autres cahiers mais ça va surement nous renseigner sur nos papounets. Ils sont si mystérieux parfois.

- Pas faux, continua Yuui. Surtout Mikai. On ne sait pas tellement d’où il vient, il a débarqué un jour chez nous, introduit dans la famille par mamie. Je ne sais même pas si mon père savait qu’il avait un autre frère.

- Tonton Milo ne l’apprécie pas beaucoup j’ai l’impression, renchérit Miko. Peut-être que ça va nous aider à comprendre.

Agalée se rappela de la photo familiale. La première photo où Mikai apparaissait, une photo où Milo avait à nouveau ces regards lourds de sous-entendus et de haine. Elle voulait à tout prix tenter de savoir pourquoi, et comptait bien le découvrir ce soir.

- Allez on y va ?, demanda Aglaée.

- C’est parti, répliqua Yuui en retroussant les manches de son sweat bleu.

Tout de suite, la petite fille ouvrit l’album et passa les vingt premières pages qu’elle connaissait déjà. Elle tomba sur une photo de Kishin. Il devait avoir dix ans, s’éteint déjà teint les cheveux et s’était enfoncé dans le canapé en affichant un air contrarié -le seul air qu’Aglaée connaissait en réalité, sauf quand i l y avait des clientes-. Miko regarda par-dessus son épaule et apprécia énormément le cliché. Il aimait beaucoup son petit frère rebelle. Il prit ensuite un cahier bleu et commença à le feuilleter. Un papier glissa. Il le prit entre ses mains et l’examina. Il s’agissait d’une dissertation, la matière il n’en avait aucune idée, qui parcourait deux copies doubles. Le garçon n’eut pas le courage de la lire et trouva le nom de l’auteur en survolant rapidement : Hikaru Le Noir, avec un beau 18/20 marqué en rouge et des commentaires de la même couleur précisant que c’était la meilleure copie. On lui avait toujours dit que son oncle était intelligent et soigné, mais jamais Miko n’en avait eu de preuves concrètes. Quant à son père, on évitait de parler de ses jeunes années.

- Hé, venez voir ça, chuchota Yuui, juste à côté. Je crois que j’ai trouvé deux cahiers assez intéressants.

Intrigués, Aglaée et Miko s’approchèrent. Les deux recueils en question appartenaient à Kami et Milo Le Noir, leurs noms étant marqué sur la couverture. En tournant les pages, ils se rendirent compte que c’étaient des carnets de notes et de remarques. Chacun avait des notes moyennes voire déplorables. Quant aux remarques des professeurs sur leur mauvais comportement, il y en avait tellement qu’ils avaient dû rajouter des pages en plus. La plupart des mots concernaient des oublis, des devoirs non faits, des agissements en classe et en particulier un grand nombre d’heures séchés.

- Wahou, ils séchaient beaucoup d’heures de cours, remarqua Aglaée. ET aux mêmes moments à chaque fois.

- Ils étaient bien différents de Tonton Hikaru, répondit Miko. Tata Galenn aussi n’était pas une mauvaise élève d’après ce qu’on nous avait dit.

- C’étaient des rebelles, répondit Yuui. Mamie devait être assez fatiguée de devoir élever deux enfants aussi espiègles et désobéissants.

- Ils sont pires que Kishin, ironisa le garçon aux cheveux rouges. Même lui semble être un ange comparé à ces deux tornades.

- En tout cas, ils semblaient vraiment très proches, continue la petite fille. Pas comme maintenant.

Cette remarque véridique fit retomber une atmosphère pesante sur le petit groupe. Ils regardaient par terre, pensant aux conflits secrets mais présents qui à présent encerclaient la famille. Si seulement tout pouvait redevenir comme avant. Enfin, Aglaée avait du mal à imaginer Milo gambadant dans les prés en tenant Mikai et Kami par la main. C’était une vision certes drôle, mais impossible et quand bien même un peu pitoyable.

- Ne vous en faites pas, reprit-elle pour redonner du moral à ses troupes. On va découvrir pourquoi est ce qu’ils sont comme ça, on va régler le problème et tout sera comme avant !

- Tu as raison, renchérit Yuui, ne nous laissons pas abattre. Moi je dis on devrait se trouver un nom.

- Excellente idée !, approuva Miko d’un hochement de tête. Mais j’ai pas d’idées.

- Bon, je pense pas que ce soit très original, mais en attendant de trouver mieux, que diriez vous du AMY ? Les trois lettres de nos prénoms.

- Pas mal ! En attendant de trouver un nom qui flanque la frousse, voici le AMY -nom provisoire-.

- Yeah !, acquiesça Yuui. Bon, on continue ?

Les deux autres hochèrent la tête et chacun replongea dans ses bouquins. Yuui ferma les deux carnets mais ne les remis pas dans le coffre, ils pourraient toujours servir. Celui qu’il prit ensuite n’était pas très intéressant. Un cahier d’exercice de mathématiques, avec des griffonnages un peu partout. Miko continua de feuilleter l’ouvrage bleu mais lui non plus ne l’aidait pas. Il le ferma en soupirant et en prit un autre. Aglaée s’était décidée à sauter les photos d’eux petits pour entrer directement dans le vif du sujet. Elle était passée dans la partie des clichés en noir et blancs. Le premier fut celui d’un grand champ de blé pris en plongée. On arrivait parfaitement à distinguer quatre formes gambadant gaiement. Leurs têtes dépassaient à peine celle des céréales, ils avaient l’air si mignon. La petite fille su assez aisément repérer Galenn, elle tenait une ombrelle et avait pris la tête de la petite file. Ensuite, elle ne réussit pas à identifier les trois autres enfants, ce qui la chagrina un peu. Elle passa à la suivante. Cette fois, c’était au bord d’un ruisseau et les progénitures Le Noir s’amusaient. Galenn avait pris sa robe à deux mains et était entré dans l’eau qui lui arrivait jusqu’en haut des chevilles. Hikaru avait apporté une maquette de bateau et s’amusait à la faire flotter, assis sur les cailloux. Kami avait tressé ses cheveux, avait aussi les pieds posés dans l’eau et arrosait avec gaité son petit frère Milo qui ripostait sans retenu. C’est une photo très drôle car les expressions des deux jeunes garçons étaient indéfinissables. Ils riaient, et Aglaée se rendait compte que, sans ses lunettes, le jeune roux ressemblait énormément à son aîné, plus que jamais.

Les photos suivantes racontaient toujours la même chose. La complicité entre les deux frères semblait presque intouchable. Aglaée les passa rapidement. Elle se demandait si une seule photo de Mikai existait en noir et blanc. Il voulait voir une photo de lui petit. Au fur et à mesure que les clichés défilaient, les quatre enfants prenaient de l’âge. Et sans qu’elle s’en rende compte, la petite fille arriva à la fin. Sur la dernière photo, seuls Kami et Milo étaient présents. Ils étaient environ âgés de vingt ans, peut-être un petit peu plus pour l’aîné. L’endroit était familier pour la petite fille, il s’agissait de la terrasse du manoir. Devant chacun d’eux, une tasse posée avec une part de flan à côté. Les deux souriaient sans retenue. La petite fille fut déçue. Elle ne verrait jamais Mikai enfant et souriant. En continuant de regarder cette photo, un doute lui vint soudain. Le Kami de la photo lui semblait très légèrement différent. Elle ne savait pas comment l’expliquer, ni même comment décrire cette impression de malaise. Elle sortit la photo de l’album et revient à la page d’avant. Il s’agissait d’une photo des quatre adolescents accoudés au balcon. Sur ce cliché, Kami n’était pas différent. Aglaée avait du mal à comprendre, elle se tourna vers Miko.

- Viens voir. Tu ne trouves pas papa différent sur cette photo ?

Miko examina les deux clichés en silence, perplexe.

- Je ne vois pas de différences.

- Je dois rêver alors, tenta t-elle de se convaincre.

- C’est vrai que je commence à somnoler. Et je ne trouve vraiment rien.

- Et toi Yuui ?

- Rien non plus. J’en suis à mon quatrième cahier, je commence à croire qu’on ne saura jamais.

- Mikai n’apparait pas du tout. Jamais son nom est énoncé, il n’y a vraiment rien. Je me demande comment ça peut-être possible.

- Pourquoi a-t-il disparu pendant si longtemps ?, questionna Aglaée. A-t-il seulement existé. On aurait pu croire qu’il était parti en voyage avant notre naissance, mais la, c’est le vide.

- C’est à la fois désespérant et fascinant, commenta Yuui. On continue quand même ?

- Il ne reste plus beaucoup de cahiers, j’en ai fini avec l’album donc je vais vous aider. Quelle heure est-il ?

- 2h30 du matin, répondit Miko.

- Déjà ! Je propose qu’on s’arrête vers 3h00. Le temps qu’on range et qu’on reparte, on arrivera vers 3h30 dans nos chambres. Demain, personne ne doit se douter de quelque chose, donc il faut qu’on soit en forme.

Les deux garçons hochèrent la tête. Ils refermèrent leurs livres peu intéressants et les posèrent à côté d’eux. Des petites piles commençaient à se former un peu partout. Aglaée regarda dans le coffre, il ne restait que trois ouvrages. Elle les prit et les distribua. Ils les ouvrirent en même temps et se plongèrent dedans. Yuui tomba sur un cahier ayant appartenu à sa tante Galenn. Elle parlait de l’école, de ses frères, de ses journées. C’était un peu comme un journal intime mais l’auteur ne mettait jamais en avant ses sentiments personnels et préférait relater des anecdotes. Elle en fit une très drôle racontant qu’un jour Hikaru avait tenté d’attraper du poisson à mains nus et que cette tentative avait lamentablement échouée car il n’était pas du tout discret. Bien que cette ouvrage ne donne aucune information importante, Yuui le lut jusqu’à la fin, se retenant de rire à haute voix pour ne pas déconcentrer ses compagnons.

Aglaée eut moins de chance. Le cahier qu’elle tenait était mal tenu, et l’écriture était tellement déformée qu’elle ne pouvait déchiffrer qu’un mot sur deux. Elle soupira et tenta de repérer des mots clés. Impossible, mais elle ne voulut pas abandonner et continua. Ce fut Miko qui trouva le livre le plus intéressant des trois. Tout d’abord surpris par la façon dont les choses étaient racontées, il s’habitua et décida de faire partager sa trouvaille après avoir lu quelques pages. Il lut une ligne à voie haute.

- A présent, nii-san et moi possédons un secret. Mais il m’a interdit de le dire, alors je ne l’écrirai pas. C’est mignon.

- Très intéressant, répondit Aglaée, heureuse de pouvoir lever le nez de son bouquin illisible. Il y en a d’autres comme ça ?

- Surement, attends je cherche… Aujourd’hui, j’ai fait de la pêche avec nii-san et les autres. Hikaru-nii est très mauvais à la pêche, mais on a bien rigolé. J’aime les échanges que nii-san et moi avons. Les autres ne comprennent pas, ça m’amuse.

- Galenn parle aussi de cette journée, commenta Yuui. J’ai son journal dans les mains, mais il n’y a rien de bien intéressant, juste des histoires très drôles.

- Ces deux livres me semblent capitales. Bien, j’annonce que l’aventure s’arrête ici. On range tout et on part se coucher. Vous emmenez ces deux ouvrages avec vous, et je prends l’album, je n’ai pas fini de le regarder.

Les cousins hochèrent la tête et commencèrent à replacer les nombreux cahiers et feuilles éparpillés partout dans la malle. La tâche s’annonça plus facile que prévu mais la fatigue s’empara vite d’eux. Après avoir tout rangé, les aventuriers refirent le même chemin dans le sens inverse. Le retour leur sembla à tous moins long. Arrivés au premier étage, ils longèrent le couloir et se séparèrent à la chambre d’Aglaée. Celle de Yuui était quelques portes plus loin et celle de Miko juste en face. La main sur la poignée de sa porte et l’album sous le coude, elle décida de s’exprimer une dernière fois en temps que chef.

- Je suis fière de vous, aventuriers ! Surtout, ne parlez de notre expédition à personne et cachez ces livres dans un endroit sur. Bonne nuit, à demain. On en profitera pour démasquer notre trouble-fête.

- Bonne nuit, dirent en cœur les deux garçons, avant de se retourner et de partir.

Aglaée leur sourit et entra dans sa chambre. Aussitôt la porte refermée, elle chercha un endroit pour cacher l’album. Elle opta pour le petit espace à peine visible mais bien présent qui se situait sous l’une de ses bibliothèques. Après l’avoir mis en sécurité, elle s’allongea sur son lit. La fatigue accumulée la plongea bientôt dans un profond sommeil, et le rêve qu’elle fit cette nuit était rempli de folles aventures avec ses deux compagnons et ses nombreux autres cousins, parents, oncles, tantes et grands-parents.
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