Ode pour Gredoune / Rentrer à la maison - PG - Harry/Ron

Feb 24, 2009 21:59

Ode pour la Valentine : gredoune
Titre : Rentrer à la maison
Cupidon : Buddhaformattie
Couple/Personnage : Harry/Ron
Rating : PG
Nombre de mots : 5.146
Disclaimer : L'univers de Harry Potter est à J.K. Rowling.
Mot de la Valentine :Chère Valentine. Tu voulais du fluffy, je peux dire sans crainte qu'il y en a. Cependant, dans ma grande honte ta demande d'un "Ron qui réconforte Harry" a aussi amené un peu de angst. J'espère que tu me le pardonneras et que cela te plaira quand même. J'espère que tu passeras un bon moment avec cette fic. Joyeuse Saint-Valentin à toi !



Ronald Weasley n'avait jamais rêvé de devenir une femme au foyer. Tout petit, il avait rêvé d'être Ministre de la Magie, Auror, Médicomage, joueur de Quidditch pour les Canons ! Il avait rêvé de tout ça et de bien plus encore, comme le faisaient tous les petits sorciers qui avaient échappé à la première guerre contre Voldemort. A y repenser, il n'avait donc jamais rêvé d'être un héros de guerre... ni le meilleur ami du Sauveur, de ce petit garçon mystérieux qui peuplait parfois les légendes qui se racontaient entre mères de famille, autour d'un thé. Il n'avait jamais rêvé qu'il tomberait amoureux de lui, non plus, mais ça...

Non, il n'avait jamais rêvé de devenir une femme au foyer. Et pourtant, c'était ce qu'il avait l'impression d'être, ce soir. Il n'y avait jamais pensé avant. Peu importait le nombre de fois où Harry était rentré tard, épuisé ou à bout de nerfs, Ron avait toujours été là à son arrivée pour lui changer les idées, cuisiner, le mettre au lit après avoir pansé les blessures que lui infligeait parfois son entraînement d'Auror. Il avait regardé Harry s'épuiser. A essayer de devenir le meilleur des Aurors. A se battre vainement pour réhabiliter Sirius et Snape. A passer le plus de temps possible avec Teddy. A rencontrer les petits enfants malades de Sainte Mangouste, quel cliché ! A s'entretenir avec des familles brisées et déchirées de sorciers qui voulaient tout de même le remercier d'avoir mis fin à tout. Harry ne s'arrêtait plus. Ce n'était plus du désespoir, ce n'était plus de la frénésie, c'était de la folie. Hermione, sa mère, McGonagall, Hagrid... Tous avaient essayé de le lui expliquer. Tous avaient essayé de montrer à Harry qu'il fallait qu'il s'arrête. Qu'il fallait qu'il vive. Et il les avait rejetés, tous. Refusant la paix qu'il avait pourtant tant attendue. Refusant le repos qu'il avait tant mérité. Ron, lui, n'avait rien dit. Il avait laissé sa patience s'user jusqu'à la corde. Laissant ses sentiments pour Harry le brouiller avec Hermione quand il avait refusé de se mettre du côté de celle-ci pour le bien d'Harry. Laissant l'agacement se changer en ressentiment face à l'absence, le ressentiment se changer en colère.

Jusqu'à ce soir. Dans la cuisine de Grimmauld Place, il tournait en rond depuis des heures, attendant qu'Harry finisse sa mission héroïque du jour. Le bruit de l'horloge, le son de la marmite bouillonnante, les allers-et-venus inutiles de Kreacher ponctués par ses commentaires murmurés, tout venait nourrir sa colère. Si Hermione avait été là, il aurait probablement crié un tas d'âneries à plein poumons. C'était enfantin et ils ne le faisaient plus vraiment maintenant, surtout depuis qu'Hermione avait décidé de retourner à Poudlard pour y compléter sa dernière année. Mais ça l'aurait soulagé, au moins. Là, la tension montait en lui sans qu'il ne puisse rien faire d'autre que de trouver de nouveaux motifs pour l'alimenter. Et puis, Kreacher avait marmonné quelque chose à propos de Weasley et de ses talents à tenir un foyer, comme cette chère madame Molly. L'elfe voyait sûrement cela comme un compliment, mais pas Ron. Ces mots l'écrasèrent mieux qu'une chape de plomb ne l'aurait fait. Alors, c'était ce qu'il était devenu ? Il était là, seul, tous les soirs, à attendre qu’Harry rentre. Espérant, qu'un jour, quand Harry irait mieux, ce dernier serait peut-être capable de voir qu'ils avaient une chance d'être heureux ensemble, plus qu'en simples colocataires. Il était devenu la petite femme d’Harry Potter, le Sauveur. Ça, c'était du destin ! Enfermé à Grimmauld Place comme une bonne sorcière de sang-pur fidèle et digne de son mari !

Sauf qu'Harry n'était pas son mari, ni son amant d'ailleurs. Et que Ron n'était pas une bonne sorcière ! Ce n'était plus possible, ça ne pouvait continuer comme cela plus longtemps. Il devait gagner un peu de dignité, bon sang ! Quand Harry rentrerait, ils auraient une conversation tous les deux. Et cette fois-ci, il ne mâcherait pas ses mots ! Il fallait que ça s'arrête, et vite. Harry ne jouerait plus très longtemps au héros désintéressé ! Ron ne pouvait pas continuer à être seul, fou d'inquiétude et si pathétique. Il était un héros de guerre ! Pas le petit toutou du héros suprême !

Et Harry rentra, alors que l'horloge sonnait minuit. Les cris du portrait de la mère de Sirius annoncèrent son arrivée et Ron se tendit. Harry passa la porte de la cuisine, ses traits criant sa fatigue et sa lassitude. Il avait pleuré. Ron le savait. Il savait toujours lire les signes sur le visage d’Harry. Hermione avait dit, dans un passé qui lui semblait maintenant ne plus lui appartenir, qu'il avait la capacité émotionnelle d'une cuillère à café. Plus tard, elle avait ajouté que c'était étonnant, cette faculté qu'il avait d'occulter les sentiments des autres... mais jamais ceux d'Harry. Elle avait encore eu raison, et vraiment, cela aurait dû le mettre encore plus en colère.

Cependant, les yeux rougis d’Harry se relevèrent vers lui, se plantèrent dans les siens. Et sa colère retomba comme un soufflé raté. Au diable sa dignité ! Il ne pourrait jamais hurler sur Harry. Il l'aimait tant. Trop peut-être mais, peu importait. C'était plus fort que lui, ça lui en faisait mal aux tripes. Il n'était rien sans Harry. Il avait besoin de prendre soin de lui, d'être là pour lui. C'était viscéral. Il ne cherchait plus comment c'était arrivé. Comment Harry était passé de son meilleur ami jalousé à sa moitié jalousement protégée. Comment lui, Ronald Weasley, était passé de future star du Quidditch à femme au foyer. Tout cela n'avait aucune importance. Harry était la seule chose qui comptait. Ron tendit la main en avant, hésitant. Suivant les soirs, suivant les épreuves de la journée, Harry était beaucoup plus tendre et câlin qu'il ne l'avait jamais été avec personne... ou plus renfermé. C'était selon. Petit garçon en manque d'amour ou petit garçon farouche. Avec le temps, Ron avait appris à comprendre et à aimer les deux. Et généralement, les larmes appelaient la tendresse, pas l'effacement.

Bingo ! pensa-t-il lorsque que la main d'Harry rejoignit la sienne, hésitante. Ron tira Harry à lui, sachant que ce dernier n'osait jamais rien réclamer de lui-même. De ses bras musclés, Ron vint former un cocon autour du corps frêle d'Harry, le serrant contre son torse avec une tendresse maladroite. Ils étaient toujours un peu hésitants. Harry sembla réaliser progressivement ce qui lui était offert. Comme souvent, il resta figé encore quelques secondes dans l'étreinte, avant de s'accrocher à Ron avec toute la force de son désespoir. Ron porta une de ses mains aux cheveux de son ami, les rassurant tous les deux en perdant ses doigts dans la tignasse désordonnée. Il retint le baiser qu'il mourrait d'envie de déposer sur la cicatrice qui marquait le front si pâle. Il se borna à passer et repasser sa main dans la chevelure épaisse d'Harry, attendant que celui-ci soit prêt à refaire face, à dîner un peu et à affronter une nuit probablement ponctuée de cauchemars. Il fut patient... jusqu'à réaliser qu'Harry s'était endormi là, contre son torse, une de ses mains recroquevillée sur son t-shirt, l'autre accrochée à sa hanche.

Une fois Harry porté jusqu'à sa chambre et confortablement installé sous les couvertures, Ron s'assit au bord du lit pour reprendre son manège dans les cheveux bruns. Il ne pouvait pas arrêter de le toucher. Il ne pouvait pas briser ce léger contact. Pas ce soir. Pas après qu'il s'était préparé à hurler sur Harry pour sauver les derniers lambeaux de sa fierté oubliée. Pas après avoir formé la résolution de faire bouger les choses. Pour lui. Mais surtout pour Harry. Parce qu'il ne pouvait pas continuer à le regarder faire n'importe quoi. Et qu’Harry ne pouvait pas continuer à jouer au héros.

Il fallait qu'il trouve quelque chose. La colère, Hermione avait essayé. Les plaintes, ça avait été Molly. Le conseil paternel était venu d'Hagrid. Les réprimandes avaient été menées par McGonagall. Et pourtant, ils en étaient toujours au même point. C'était dingue ! Personne n'y était préparé. Harry avait toujours voulu avoir une vie tranquille, loin de sa célébrité. C'était un jeune homme parfois tête brûlée, qui n'hésitait pas à être égocentrique, parfois. Il n'avait jamais adhéré à son rôle de héros, avant. Personne n'avait prévu qu'après la guerre qu'il s'y jetterait corps et âme pour noyer une culpabilité incompréhensible en continuant de jouer les bons samaritains.

Ron savait qu'il tenait la paix et le bonheur d'Harry entre ses mains maintenant. C'était angoissant, et si impressionnant. Il lui fallait une solution et vite. Alors, il fit ce que toute personne censée aurait fait à sa place, ce que toute personne en manque de confiance ferait, aussi.

Il envoya Pigwidgeon à Hermione.

******

Quelques jours plus tard, Ron attendait, inquiet, installé à une table au fond des Trois Balais. Il avait été étonné qu'Hermione lui propose de se voir face à face si rapidement et en pleine semaine. Apparemment, s'appeler Hermione Granger lui laissait quelques passe-droits à Hogwarts. Il ne savait pas vraiment à quoi s'attendre. Il n'avait pas eu l'occasion de la revoir depuis qu'elle s'était brouillée avec Harry et lui, un peu plus de deux mois auparavant. Il lui avait tout de même envoyé un cadeau et une petite carte pour Noël. Il espérait que cela jouerait en sa faveur. Elle avait toutes les raisons d'être en colère, et c'était d'autant plus inquiétant, qu'elle n'avait pas besoin de tout ça, habituellement, pour l'être. Il se leva d'un bond en entendant Mme Rosmerta saluer sa meilleure amie. Merlin que c'était bon de la voir, souriante, son sac plein de livres sur l'épaule. Avant aujourd'hui, il n'avait pas vraiment réalisé à quel point avoir Hermione avec eux lui avait manqué. Il aurait bien eu envie de traverser la salle pour la soulever du sol et planter un baiser sur son front. Il voulait s'assurer qu'elle ne comptait pas lui arracher la tête avant, cependant.

Il lui fit un petit signe de la main, inutile pourtant car elle l'avait déjà repéré. Il la laissa approcher sans rien dire, un peu honteux et dépité, triturant ses mains avec nervosité. Hermione eut la seule réaction qu'il n'avait pas attendue. Après lui avoir offert un sourire tendre, la jeune femme se rapprocha, se plantant sur la pointe des pieds pour passer ses bras autour de son cou. Elle resta là quelques secondes, temps qu'il mit à profit pour l'enlacer. Décidément, c'était bon de retrouver Hermione. Sa meilleure amie. Sa grande sœur... ou petite, suivant les contextes, il n'avait pas encore bien décidé. Lorsqu'ils se séparèrent, elle planta un baiser sur sa joue avant de s'installer face à lui autour de la petite table de café. La gentillesse avec laquelle elle le regardait le mettait mal à l'aise. Il se sentait coupable de lui avoir tourné le dos. Simplement, quand il s'agissait d'Harry, il ne voyait plus personne. Il se sentait proprement stupide maintenant. Il commanda une Bièraubeurre et ne put se retenir de taquiner Hermione quand elle choisit un chocolat chaud. Gloussant, elle lui frappa gentiment le bras.

- Alors comme ça, s'appeler Hermione Granger a du bon ?

Il ne s'étonna pas qu'elle comprenne sans réfléchir de quoi il voulait parler. Il savait que commencer sur un sujet léger l'aiderait à moins bafouiller quand serait venu le temps de parler du reste.

- Seulement dans les cas de force majeure. Tu ne doutes pas, bien sûr, que je n'utiliserai jamais mon droit illimité à sortir d'Hogwarts sans une excellente raison. Nous ne voudrions pas compromettre mes études et ma réputation, n'est-ce pas ?
- Non, bien sûr que non. Mais quand même ! En plein après-midi ? Si tu commences à sécher les cours, je ne donne pas cher de ta réputation !

Son air outré lui fit tellement de bien que Ron ne put s'empêcher d'éclater d'un rire sincère. Elle grommela quelques mots où il crut distinguer "imbécile" et "meilleur ami". Les choses se présentaient bien. Elle se reprit rapidement.

- J'avais cours avec McGonagall.
- Oh.

Okay, il avait probablement l'air stupide maintenant, mais elle avait l'habitude. En tout cas, ça expliquait quand même pourquoi il avait pu la voir si rapidement. Hermione avait dû dire à la Directrice qu'ils avaient besoin de parler d'Harry. S'appeler Hermione Granger à Hogwarts était utile. Mais vouloir sauver Harry Potter, là, donnait tous les droits. Il conclut d'un ton blasé :

- Étonnant qu'elle ne t'ait pas envoyé à Grimmauld Place le soir même !
- Elle a essayé, avoua-t-elle, contrite.
- Je... je suis désolé Hermione, ajouta-t-il très vite, honteux.
- Je sais. Moi aussi, tu sais. Tu ne pouvais pas laisser Harry, je suis contente que tu ne l'aies pas fait même ! Comment vas-tu ?

Il haussa les épaules, laissant échapper une petite grimace peinée. Ce n'était pas la peine de s'inventer des excuses, elle savait déjà qu'il ne l'aurait pas fait venir si les choses allaient bien. D'un ton qu'il essaya de garder plat, il lui raconta rapidement ce qu'avaient été leurs vies à Harry et lui ces derniers mois sans elle. Ce n'était pas très agréable de ressasser tout ça, surtout que ces derniers temps, il ne semblait pas capable de faire autre chose. Après avoir tout expliqué en détails, il en vint à son projet, à l'objet de ce rendez-vous.

- Je crois que je sais ce qu'il lui faut.
- Et qu'est-ce que c'est ?! ... Désolée.

Le ton d'Hermione avait été dur et agressif. Il ne s'en offusqua pas. Il savait que ça paraissait irréel que lui, Ron Weasley, trouve une solution à laquelle personne d'autre n'avait pensé. Simplement, il était sûr de lui. Ça semblait si évident maintenant qu'il y pensait ! C'était inquiétant qu'ils n'y aient pas pensé avant. Doucement, il laissa sa main rejoindre celle d'Hermione sur la table. Il la serra tendrement, lui souriant tristement. Il devait lui expliquer son raisonnement, il voulait voir si la grande Hermione parvenait aux mêmes conclusions que lui, ce qui l'aurait grandement rassuré.

- Je crois qu'Harry a besoin de rentrer à la maison.

Le silence s'étira quelques secondes, Hermione semblait perplexe. Ron allait s'expliquer plus avant, exposer ses observations quand une lueur s'alluma dans les yeux de la jeune fille. Sa bouche s'entrouvrit et elle y plaqua rapidement sa main.

-Oh mon dieu, Ron ! Oh mon dieu ! Le seul endroit qu'il semble craindre est celui dont il a, en fait, le plus besoin. Dire que je cherchais à comprendre Dumbledore depuis des semaines ! J'ai pensé à tout, Godric's Hollow, Privet Drive, le cimetière où est enterré Jedusor Senior. J'ai pensé à tout Ron ! A tout sauf à Hogwarts ! Je suis stupide, tellement stupide ! Si Dumbledore n'était pas aussi mystérieux aussi ! Pense-t-il que c'est un jeu ? Pourquoi ne pas nous l'avoir dit il y a des mois ! Oh mon dieu, Ron !

Elle était bouleversée et semblait sur le point de craquer sous le poids de la culpabilité qui l'assaillait soudain. Il attrapa ses deux mains, fermement, avant de la gronder fermement. Lui aussi s'en voulait de ne pas y avoir pensé, mais quoi, ce n'était pas le moment de perdre du temps à remuer tout ça !

- Hermione ! Personne n'y a pensé. Personne. Et personne ne peut dire que ça va fonctionner. Il n'est pas revenu ici depuis la Grande Bataille. Même pas pour la reconstruction. Peut-être que mon idée est complètement foireuse, tu sais que c'est possible. Personne ne sait comment Harry réagira. Mais je vais le faire. Je dois le faire. Je dois prendre soin de lui, Hermione. Mais tu dois m'aider. S'il te plaît.

Ils se regardèrent, longtemps, perdus sans ce morceau d'eux-mêmes qu'était Harry. Il le fallait, oui. Hermione sécha ses larmes, refusant de se laisser abattre. Il leur fallait un plan et ça, elle pouvait le leur fournir. Il était temps de se mettre au travail.

******

Quelques semaines plus tard, quand Hermione lui donna le feu vert pour emmener Harry à Hogwarts, Ron n'était plus sûr de rien. Au départ, il avait voulu recevoir de l'aide pour monter son propre plan. Cependant, Hermione et McGonagall étaient des femmes têtues et à partir du moment où elles avaient cru en ce projet, elles ne lui avaient plus rien laisser choisir. Son idée ? Reléguée en plan de secours ! Un petit Portkey le suivrait dans sa poche et les emmènerait dans une salle retirée du château où Ron pourrait mettre son idée à exécution... si les choses dérapaient seulement ! Il avait dû le promettre. Les deux femmes lui avaient répété encore et encore l'intérêt pour Harry de pouvoir parler avec le portrait de Snape dans le bureau directorial, de pouvoir se recueillir sur la tombe blanche de Dumbledore, ou de se retrouver confortablement installé dans la salle commune des Gryffindors. Quand il leur avait opposé ses arguments, elles lui avaient souvent reproché de ne pas savoir ce qui était bon pour Harry ou pas.

Et il les avait crues... plus ou moins. Personne n'arrivait à lui retirer l'idée que, pour Harry, cela serait en faire trop, trop tôt. Bon sang ! Harry avait refusé d'approcher d'Hogwarts depuis des mois alors qu'il avait toujours considéré ce lieu comme sa maison. Il n'allait pas soudainement sourire devant l'absurdité que cela constituait et se dire : bien sûr, allons affronter tous mes démons ! Les semaines passant, l'idée qu'il connaissait Harry mieux que personne s'était aussi faite une place dans son esprit. Après tout, qu'avaient vu McGonagall et Hermione de la souffrance d'Harry ? D'accord, il était peut-être un peu injuste avec Hermione, mais il était persuadé d'être le seul à penser toujours à Harry avant de penser à lui-même. Il était amoureux de lui, le protégeait du mieux qu'il pouvait depuis leurs onze ans. Elles n'avaient aucune idée du lien qui les unissait ! Là encore, il était injuste avec Hermione, se répétait-il, elle avait tout partagé avec eux, ne les avait jamais quittés. Plus que tout, il répugnait à faire souffrir Harry. Il savait qu'il avait pris la bonne décision en acceptant d'essayer de le sortir de son comportement destructeur. Simplement, à l'idée qu'il pourrait infliger à Harry des choses que ce dernier ne voulait pas affronter, et même en sachant que c'était pour son bien, Ron perdait confiance.

Cependant, quand le signal d'Hermione apparut ce soir-là, il s'en tint tout d'abord au plan des deux femmes. Harry était à la maison, heureusement. Il mangeait calmement un plat que Ron lui avait cuisiné dans la journée pour prendre des forces avant d'attaquer l'entraînement physique nocturne qu'il s'était préparé. Ron dut lui promettre, lui mentir, qu'ils seraient revenus à temps pour qu'Harry puisse suivre son programme d'entraînement. Alors seulement, le jeune homme glissa sa main dans celle de Ron et accepta de se laisser transplaner à destination.

L'arrivée les déstabilisa quelques secondes, pourtant, Ron se retint de lâcher la main d'Harry, se préparant à toutes ses réactions. Ce dernier semblait complètement perdu, il regardait autour de lui sans comprendre. Le chemin de terre, les lumières d'Hogsmeade au loin, la grande grille et les lumières de Hogwarts. Rien ne semblait s'imprimer dans son esprit alors qu'il continuait de regarder partout autour de lui. Pendant ce temps de flottement, les doutes de Ron revinrent l'assaillir, ce n'était pas ce qu'il fallait à Harry, il en était de plus en plus sûr. Il devait prendre soin d'Harry, il ne devait pas se tromper. Prendre soin d'Harry, c'était sa seule et unique obsession. Entourant les épaules frêles d'Harry de ses bras, il vint plaquer son torse contre son dos, forçant Harry à faire face au château. Les mains d'Harry vinrent automatiquement agripper celles de Ron sur ses épaules, les serrant douloureusement. Ce furent les chuchotements du Sauveur qui finirent de convaincre Ron. Il s'était attendu à la colère, à la fuite, à cette attitude méprisante qu'Harry avait servie à toutes les personnes qui avaient essayé de le secouer. Il ne s'était pas attendu à des supplications.

- Non... Ron... NON ! Ramène-moi. S'il te plaît. RON ! S'il te plaît...

En un instant, ce fut décidé. Il ne pensa même pas qu'il brisait sa promesse, n'eut même pas le temps de se dire qu'il s'en fichait. Instinctivement, il resserra sa prise sur Harry d'un bras, libérant le second pour fouiller dans sa poche. Prendre soin d'Harry. Il devait le faire. Quelques secondes plus tard, ils disparaissaient de l'entrée de Hogwarts.

Quasi-instantanément, ils se matérialisèrent dans la petite salle que Ron avait préparée. Dans le coin, un canapé confortable et des couvertures, au cas où Harry aurait besoin d'être câliné. Dans une boîte sur le côté, quelques albums photos (dont celui qu'Hagrid avait offert à Harry des années auparavant et un autre que Ron avait constitué de photos d'eux deux très récemment sans oser le montrer à Harry) et quelques babioles qui les aideraient à reprendre pieds si besoin était. Et face à lui, il l'espérait, son meilleur allié. Enfin, si Harry acceptait d'ouvrir les yeux. Dans tous les sens du terme. Ce dernier était toujours entre ses bras, et ses deux mains s'agrippaient désespérément à ceux-ci. Ses yeux étaient complètement clos. Ron essaya de le rassurer.

- Harry, vieux, y'a que toi et moi ici. Ouvre les yeux. Promis, y'aura personne d'autre, ouvre les yeux.

Ron continua à lui murmurer des paroles sans queues ni têtes pendant quelques instants, cherchant à le rassurer. Harry finit par ouvrir les yeux et, comme il l'avait fait précédemment, jeta des coups d'œil inquiets autour de lui. Il haussa un sourcil surpris devant l'amoncellement de couvertures sur un vieux canapé et devant la boîte. Son regard vint ensuite effleurer le grand miroir en face de lui. Réalisant ce que c'était, Harry essaya de se dégager de l'étreinte, apparemment en colère.

- Le Miroir du Riséd ? Qu'est-ce qu'on fout ici Ron ? C'est quoi ces conneries ? A quoi tu joues ?

Ron soupira, partagé entre l'agacement et l'inquiétude. Il resserra ses bras autour du corps d'Harry, s'assurant que ce dernier ne pourrait pas partir pour le moment. Il essaya de jouer sa meilleure carte, espérant qu'Harry continuerait à se comporter comme il l'avait fait depuis des mois. Il modula son ton, espérant le rendre le plus doux et le plus tendre possible.

- Tu ferais quelque chose pour moi, Harry ?
- Oui. Tu sais que je le ferais. Quoi ?
- Regarde dans ce miroir Harry, s'il te plaît. Dis-moi ce que tu vois...
- Ron ! Arrête ça, c'est stupide. Je n'ai besoin de rien. Je sais pas pourquoi tu t'sens obligé de faire ça, j'sais pas ce qu'Hermione t'a mis dans la tête, mais j'vais bien, j'ai besoin de rien.
- Harry...
- Je ne veux pas regarder dans ce miroir, Ron.
- Harry... s'il te plaît... fais-le pour moi...

Harry soupira, clairement agacé. Cependant, il se tourna vers le miroir, de son attitude insolente qu'il avait si souvent montrée, avant. De cet air qui vous disait "T'as gagné ! T'es content ? Tu m'emmerdes !" Ron retint un soupir de bonheur devant cette réaction qui, il le réalisait maintenant, lui avait tant manqué. Plongeant son regard dans le miroir, Harry ouvrit la bouche, mais ne dit rien. Ron se doutait qu'Harry s'apprêtait à lui dire qu'il y voyait ses parents, sa famille, heureuse et ensemble, comme cela avait été le cas lors de leur première année. Ron s'était douté que c'était une des possibilités. Mais, apparemment, la chance était de son côté. Harry semblait déstabilisé, le contenu du miroir avait forcément dû changer. Ron espérait être en mesure de procurer à Harry ce qu'il y voyait, maintenant. Il espérait être en mesure de le rendre heureux. Il savait que son plan semblait plus foireux que celui d'Hermione. Maintenant, ça lui apparaissait clairement. Merlin savait ce qu'Harry pouvait bien voir dans ce foutu miroir ! Mais quoi que ce soit, il faudrait aider Harry à l'obtenir, ou à le dépasser. Il le devait.

- Je... je nous vois.
- Nous ? essaya de demander Ron, espérant que sa voix ne trahisse pas trop son trouble.
- Je suis au centre, Teddy me tient la main. Et toi, tu te tiens de l'autre côté, ton bras autour de ma taille. Et ... oh ...
- Quoi ? Qu'est-ce que tu vois Harry ? l'encouragea Ron, doucement.
- Tu m'embrasses.

Harry était rouge écarlate à présent. Pourtant, il n'essaya pas de se détacher de Ron. Son regard était complètement absorbé par le miroir, par ce qu'il y voyait. Ron le prit par les épaules, le forçant à faire volte-face.

- Je t'embrasse Harry ?
- Oui.

La voix d'Harry n'était plus qu'un murmure à présent. Il regardait ses pieds, n'osant relever la tête vers Ron. Celui-ci ne lui laissa pas le temps de s'inquiéter, pas le temps de trouver un moyen de se défiler. Il sauta sur l'occasion. C'était plus qu'il n'avait jamais même espéré. C'était inattendu et miraculeux. Mais, peu importe, il comptait en profiter sans se poser de questions ! Peut-être même qu'Hermione avait trafiqué ce foutu miroir, franchement, ça lui était égal ! Doucement, il déposa ses lèvres sur le front d'Harry, avec tendresse, comme il avait eu envie de le faire depuis des mois.

- Comme ça ?
- Non.

Ron effleura encore quelques secondes son front avant de laisser ses lèvres descendre sur une des joues rouges de son vis-à-vis. Il déposa un second baiser, ici.

- Non.

Délicatement, avec quelques hésitations et en essayant de contenir sa panique, Ron laissa une main glisser sur le visage d'Harry jusqu'à atteindre son menton, qu'il souleva sans brusquerie. De son autre bras autour de la taille svelte, il rapprocha le corps d'Harry avant de simplement venir déposer ses lèvres sur les siennes. Le gémissement de soulagement douloureux qui quitta les lèvres d'Harry secoua Ron. Le jeune homme venait de littéralement se jeter contre lui, croisant ses bras derrière sa nuque, s'accrochant à lui comme un naufragé. Ron ne le lâcha pas, resserrant au contraire sa prise, prêt à tout offrir à Harry. Il continua d'embrasser son ami, avec douceur, sans précipitation, calmant le besoin désespéré dont celui-ci faisait preuve. Ron se détacha d'Harry quelques instants, juste le temps d'atteindre le canapé, s'installant dessus avant d'attirer son nouvel amoureux sur ses cuisses. Là, il s'employa à le noyer de tendresse, pendant un temps indéfini qui aurait très bien pu être l'éternité.

- Tu sais quel jour nous sommes, Ron ? finit par rompre le Survivant.

Ron se contenta de le fixer, perplexe. Quelle était cette question ? Ils devraient parler de leurs sentiments, des problèmes d'Harry à gérer l'après, de leur futur et de tas de choses plus ou moins désagréables et Harry lui demandait quel jour c'était ? Depuis combien de temps Ron avait-il perdu la notion du temps, trop empêtré dans son inquiétude pour Harry, de toute façon ?

- Nous sommes le 14 février Ron...
- Et ?
- Ron ! C'est la Saint-Valentin.
- Ah oui tiens, remarqua-t-il d'un ton badin. Je ne m'en étais même pas aperçu.
- Tu veux dire que tu n'as pas fait tout ça pour ça ?
- Quoi ? Bien sûr que non ! J'ai fait tout ça pour toi, bêta ! Comment aurais-je su ce que tu verrais dans ce foutu miroir ? Je n'en avais aucune idée. Je voulais juste que tu arrêtes, je voulais juste que tu penses un peu à toi.
- Mais je...
- Non, le coupa Ron. Tu sais bien que non. Aujourd'hui, c'était pour t'apprendre à être un peu égoïste, pour te faire comprendre que tu avais droit au bonheur. Si en plus, c'est la Saint-Valentin et que je découvre que tu n'as besoin que de moi et de Teddy ! C'est parfait !
- Oui, c'est vrai, gloussa Harry, un peu perturbé quand même.

Ron passa une main dans les cheveux d'Harry, lui souriant. Celui-ci lui rendit son sourire, timidement. D'un geste de la tête, il désigna la boîte qui les attendait sur le sol, pressé apparemment de changer de sujet. Ron hocha la tête, lui donnant son autorisation. Il savait que tout n'était pas réglé, mais après tout, il ne pouvait décemment pas gâcher leur première Saint-Valentin, n'est-ce pas ? Et puis, Harry allait aller mieux maintenant, ils auraient tout leur temps pour en parler et tout régler, doucement mais sûrement. Harry se leva, et Ron soupira en le sentant quitter son étreinte, ce qui leur arracha ensuite à tous deux un gloussement. Harry s'empara rapidement de la boîte avant de revenir se pelotonner contre son amoureux.

- En tout cas, ne put s'empêcher de taquiner Harry, vous et la Saint-Valentin, c'est quelque chose ! Vous l'érigeriez presque en tradition familiale !
- Oh ! Mais vous êtes insolent mon bon monsieur, gloussa Ron, qui, décidément, gloussait beaucoup. Tu es vraiment ingrat Harry, j'aurais pu t'offrir un nain chantant moi aussi !
- Mais tu as préféré m'offrir le bonheur, tu ne te compliques pas vraiment la tâche, hein... conclut Harry, d'un petit sourire timide.
- Tu sais bien que j'aime pas m'embêter, j'suis feignant, lui répondit Ron, embrassant à nouveau son front au passage.

Ils s'attaquèrent à la boîte, dévoilant les photos et quelques objets qui y traînaient. Harry, impérieux, réclama de voir l'album qui lui était inconnu en premier. Comme si Ron pouvait lui refuser quoi que ce soit. Ils le parcoururent, gloussant, souriant ou soupirant de bonheur face aux souvenirs. Quelques pages avant la fin, Harry leva la tête et sembla se jeter à l'eau, fixant son regard dans celui de son rouquin.

- Maintenant que nous sommes ici, je vais avoir quelques petites choses à régler hein ?
- Oui, mais ce n'est pas pressé. Crois-moi, je t'ai épargné le plus fatiguant, si tu savais ce que McGo et Hermione avaient prévu pour toi.
- Tu as enfreint l'avis d'Hermione, Ron ? J'en connais un qui ne fera pas le malin demain matin, plaisanta Harry, essayant peu discrètement, une fois de plus, de changer de sujet.

Non, il ne voulait pas savoir ce qui avait été prévu. Il ne voulait pas se souvenir de tout ce qu'il avait à régler ici. Des excuses qu'il devait et des choses qu'il apprendrait à laisser derrière lui. Pas maintenant, pas face à ce bonheur tout neuf. Il offrit un petit sourire penaud à Ron, espérant que ce dernier continuerait à le comprendre comme il semblait si bien le faire depuis toujours. Ce qui lui sembla être le cas quand son amoureux se pencha sur lui, balayant ses cheveux de ses doigts, se contentant de lui apprendre ce qu'il savait déjà. Quand le moment serait venu, Ron serait là.

cupidon: buddhaformattie, 2009, perso: harry, cadeau: fanfic_2000_mots_et_+, rating: pg, perso: ron

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