Remus regardait
la lame XVIII de son jeu de tarot en fronçant les sourcils.
Cela faisait peut-être plusieurs années qu’il n’avait pas pu observer la pleine lune sans aussitôt avoir un « léger problème de fourrure » mais tout de même, il trouvait la représentation assez étrange. Il était presque certain, en forçant ses souvenirs d’enfant et en laissant sa peur panique de côté, que l’astre n’avait pas un visage si débonnaire. Pas plus qu’il n’irradiait une pluie colorée à la manière d’une boule à facette. Et il se rappelait encore moins que les écrevisses aimaient prendre un bain de lumière sous ses rayons.
« Mooony ? Mooonnn…y ! Mmmmmoooony… Moonyny ! »
Au bout de la quinzième fois, Remus releva enfin une tête agacée vers celui qui vocalisait à pleine voix.
« Quoi, Sirius ?
- …Non, rien. »
Ca, c’était le jeu préféré de son camarade. En particulier le matin, quand James était à la douche, et que personne n’essaierait de l’étrangler au bout de deux secondes.
Peter, allongé sur son lit, soupira fort en gribouillant dans son Goblinou Magazine. Sirius regarda avec dédain le magazine puéril du garçon mais n’essaya pas de le lui voler : après « l’incident » de la dernière fois, plus personne ne dérangeait jamais Peter avant qu’il ait fini ses jeux de points à relier. Il y a certaines choses sur lesquelles on ne plaisante pas, tout de même. L’infini potentiel d’amusement des points à relier était un de ces sujets délicats.
Mais visiblement les révisions de Remus ne faisaient pas partie de ces choses tabous et Sirius bondit à côté de lui en faisant grincer les ressorts du matelas de tout son poids.
« Tu fais quoi Moooooony ?
- Je révise mes arcanes de tarot. Ou du moins j’essaye.
- Oh la lune ! C’est une facile à se souvenir celle-là ! » Il arracha la carte des mains et la colla à cinq centimètres du visage de son camarade en commentant « Tiens regarde, là, il y a toi et puis là il y a moi, tu peux pas te tromper » Il désigna les deux canidés du dessin « Et là, on voit les enceintes de Poudlard, tu crois que tu te souviendras ? Et là c’est le lac, le même que dehors et … »
- Et l’écrevisse ? Tu vas trouver quoi pour l’écrevisse ? » Grogna Remus en récupérant brusquement sa carte.
Sirius prit un air indulgent en secouant la tête, et annonça comme s’il s’expliquait à un débile profond :
« Oh Moony, il faut que tu comprennes, c’est ce qu’on appelle le« symbolisme » ! C’est pas vraiment toi sur le dessin, tu sais… »
Il lui tapota même le crâne avec un peu de pitié dans ses « pov’mooony… il a pas compris… » et Remus, fulminant, se demanda si on pouvait ouvrir la gorge de quelqu’un avec le tranchant des lames de tarot.
Peter, pris de pitié, on ne sait pour lequel des deux, proposa :
« Remus, tu veux pas faire les jeux de capture de mots avec moi au lieu de réviser si tôt le matin ? »
Mais l’entrée de James dans le dortoir l’empêcha de répondre. Vêtu seulement d’une serviette et sans ses lunettes, il avait visiblement oublié de se sécher. Les gouttes dégoulinaient en abondance depuis sa crinière et inondaient le parquet sans qu’il ne semble s’en rendre compte. De toutes façons, les trois maraudeurs avaient fait l’expérience une fois ou deux : James était incapable de s’éveiller s’il n’avait pas ses lunettes sur le bout du nez. Il pouvait vraiment somnoler toute la journée en cas d’absence. Heureusement que Lily ne s’était pas encore rendu compte de cette faiblesse de taille chez lui.
Remus pris peur quand James se dirigea vers la mauvaise malle de vêtements et il lui tendit rapidement ses lunettes.
« Oh salut Remus ! »
James se releva aussitôt, désormais conscient du reste du monde et passa une main dans ses cheveux pour les ébouriffer comme il se doit tant qu’ils étaient encore humides.
« Prongs, il faut que tu m’aides ! »
Sirius attrapa aussitôt son meilleur ami par les épaules et ce dernier haussa un sourcil.
« Pour quoi faire, Sirius ? »
Même James se méfiait du jeune Black le matin, lorsqu’il était à son potentiel maximum de torture mentale.
« C’est Remus… Il a envie de voir la pleine lune sans avoir son petit problème de fourrure et… » Sirius arracha la serviette « Il faut que tu y mettes du tien ! »
N’importe quel être humain aurait eu pour réflexe de se cacher les parties intimes ou d’essayer de récupérer le vêtement volé.
Mais pas James.
Il avait fallu râler des mois durant pour qu’il cesse de faire du naturisme dans leur dortoir.
Potter se gratta le ventre en baillant pour toute réponse et Sirius le poussa en direction du lycanthrope. Remus tenta tant bien que mal de ne pas paraître effrayé face à cette nouvelle blague un peu trop nue à son goût.
« Ceci » Sirius retourna James et indiqua les fesses « …est ce qu’il y a de plus ressemblant à une pleine lune. C’est presque rond, c’est blanc et je propose donc que nous nous vengions de la vraie lune qui t’embête sur cette copie-ci. »
Sur ces mots, il mit une grande claque sur le postérieur.
« Aieeuh ! Padfoot, espèce de tapette flamboyante ! Je t’interdis d’abîmer ma merveilleuse anatomie avec tes sales pattes ! Va te trouver un autre arrière-train à tripoter, bougre de sodomite !
- O mère prudence, jamais je ne songerais avec luxure à tes orbes pâles, t’inquiètes ! La partie la plus charnue de ta morphologie ne ferait envie qu’a une momie franchement ! Faudrait manger un peu Prongs ! »
Evidemment Sirius essaya de lui pincer la chair pour prouver ses dires et James en contrepartie tenta de le fouetter avec la serviette récupérée.
Mais la bataille cessa rapidement : James partit récupérer ses affaires dans sa malle en toute hâte et, ô miracle, alla se changer dans la salle de bain. Il grogna tout du long et on l’entendit continuer à haute voix une fois à l’intérieur.
Peter tourna la tête vers ses deux camarades et murmura avec étonnement :
« Je rêve ou il est franchement gêné, là, Sirius ?
- Pff, je crois que ça a un rapport avec le fait que Evans lui a dit hier qu’il avait une tête de cul… Du coup il a pas du apprécier que je critique le sien… »
Aussitôt le garçon s’élança vers la salle de bain et se mit à gratter à la porte en gémissant :
« Prooooongs, je suis désooolé ! Ne me détestez pas, toi et tes fesses ! Je te jure, vous allez très bien ensemble ! Je construirais même des statues géantes en leur honneur si tu me pardonnes ! Prooongs ! Je t’assure, elles sont merveilleuses et très rebondies, on dirait une brésilienne d’ailleurs et… »
Sirius continua sans s’arrêter durant de longues minutes et Remus, déjà traumatisé par cette journée qui commençait à peine, se demanda bien comment les deux s’y prenaient. Pour constamment se faire des crasses, se bousculer et s’adorer tellement en même temps.
Lui ne pourrait jamais avoir ce genre de relations boute-en-train s’il était nu avec un Sirius qui lui pinçait les fesses !
Oh.
Oh.
Qu’est-ce qu’il venait de penser là ?
Evidemment juste à cet instant-là Sirius lui offrit un immense sourire en continuant sa tirade :
« Je taillerais dans le marbre le plus pur les voluptés de tes courbes Prongs ! Le monde entier viendra admirer ton profil grec de derrière et je devrais apporter des sels à Evans et Mac Gonagall lorsqu’elles auront vu à quel point tes merveilleux appendices sont… »
La porte s’ouvrit en grand sur un James habillé et décoiffé de près et relevant son ami d’une poigne de fer, il cloua ainsi la litanie sur ses fesses :
« J’ai compris Padfoot. Tu me voues un cul-culte et ça ne m’étonne pas de toi, chien renifleur et romain de la première heure ! Bon, on va manger maintenant ? »
Peter sortit le premier du dortoir en secouant la tête, plus intéressé par la perspective du petit déjeuner que par le spectacle de Sirius. Lequel était toujours emporté dans son rôle.
« Oui mon adonis de Prongs ! Je te suis où tu veux ! Toujours et jamais ! »
- Merlin Sirius, plus gay tu meurs…
- Ah non ! Sinon Moony serait déjà six pieds sous terre ! »
La bouche de Remus tomba ouverte, poussant un puissant cri silencieux d’indignation qui, retranscrit, aurait pu se traduire par « !!! »
Et James, sans prendre la peine de se retourner vers le susnommé, conclut en quittant la pièce:
« Ah oui, c’est vrai. Mais il triche : il a un cardigan.
- Pas faux ! »
Sirius lança par contre un clin d’œil à Remus avant de suivre en direction de la grande salle, laissant la pauvre lycanthrope seul, dans le dortoir et dans la plus grande confusion.
EDIT : un drabble par
shinrin_namida ! Avec le pairing Remus/cardigan ! :D ah, j'aime offrir des cadeaux pour en recevoir en retour
Remus resta planté devant le miroir du dortoir un après-midi entier, s'étudiant sous toutes mes coutures -c'était le cas de le dire. Il tira sur la veste en tricot, la réajusta ici, et là, et sa moue allait grandissante.
Mais qu'est-ce qu'ils reprochaient à son cardigan...? C'était... c'était confortable, pour commencer. Ensuite, il était très beau, ce vêtement, tout de même! Une merveilleuse nuance de brun clair, et doux, avec ça, qui vous enveloppait tout entier sans vous étouffer. Et puis... ...Est-ce que c'était sa faute s'il avait froid, lui, avec juste un maillot de corps et une chemise? Enfin quoi, on avait bien le droit à une petite laine! Ca ne voulait pas dire qu'il... qu'il...
Et d'abord, c'était totalement faux, ça n'avait rien à voir! .........Enfin c'était ce qu'il espérait. Mais avec le bol qu'il avait, personne ne l'avait prévenu, et les cardigans étaient effectivement réservés à... ......à une certaine catégorie de la population.
Comme toujours dans un tel moment de doute, il se tourna vers ses grands et seuls vrais amis: les Livres. En l'occurence, les recueils de vieux numéros de LePapageno Monsieur, trouvés dans la Réserve, Merlin seul savait pourquoi.
Ce qu'il y trouva le réconforta d'abord.
"Ainsi pour ne pas passer inaperçu et supplanter tous les rivaux potentiels, il s’avère plus que judicieux de s’habiller en harmonie avec les effluves de la mode. Nos amies de la gent féminine ne manqueront pas de remarquer notre prestance." Ce qui se combinait admirablement bien avec un article sur les cardigans déclarant que ces vêtements permettaient de "mettre en exergue chacun des atouts de notre anatomie". Ah! Et voilà, il suffisait de faire l'addition, le cardigan était un vêtement parfaitement normal!
Il se sentit vaguement déçu, eut un hoquet de surprise horrifiée en constatant sa réaction première.
Toujours était-il que.... qu'en fait, son choix du cardigan était parfaitement logique. C'était même... euh... tout à fait approprié pour séduire les demoiselles, apparemment. .......Génial. ...Enfin sans doute.
Et puis zut, il n'y pouvait rien s'il ne pouvait pas se contenter d'avoir l'air sexy et à croquer en portant seulement une chemise, comme Sirius. Ou en ne portant rien du tout, dans le style de James. Etait-ce sa faute s'il n'avait pas ce ventre merveilleusement plat, cette peau finement hâlée, ces muscles délicatement sculptés, et cette taille élancée qu'on aurait eu envie de...
Remus eut un nouveau hoquet, et se dépêcha de remettre le nez dans le recueil.
Ce qu'il y trouva cette fois lui planta dans le coeur un doute affreux.
Le journaliste continuait de décrire les cardigans, en faisant des modèles "assouvissant avec adresse les différentes aspirations de ces messieurs". Et un peu plus loin, la phrase qui tua vraiment Remus: "le plus important c’est que l’habit dont nous nous revêtons se doit de refléter fidèlement nos goûts".
Cette nuit là, ses rêves furent peuplés de James les fesses à l'air, de Peters enveloppés dans une laine douce, très douce, et de Sirius vêtus et tout et pour tout d'un carigan, s'en servant pour caresser les fesses de James, et faire des choses qui réveillèrent Remus le souffle court, à cinq heures du matin.
Le cardigan fut enfermé dans la commode pour le reste de la semaine.