"L'agent secret", par Graham Greene
Pour la catégorie "Espionnage" de bingo_livres
Roman, environ 250 pages. D. est un ancien universitaire dans un pays en guerre civile (probablement l'Espagne, mais il n'y a aucun nom, que des concepts, c'est un roman psychologique plutôt que politique), envoyé par la faction de gauche de son pays pour négocier l'achat de charbon à des industriels anglais.
Tout le long, il est complètement paranoïaque, et c'est révélé être justifié. On essaie, par tous les moyens, de l'empêcher d'accomplir son but. C'est un personnage initialement non-violent, qui est là pour éviter les mauvaises rencontres, et n'y arrivera pas, et il y aura des dommages collatéraux.
J'aime son côté intellectuel, son traumatisme, ses opinions sur la Chanson de Roland et son évolution psychologique, je déteste son sexisme, vague mais très frustrant (en particulier sa façon de mépriser les femmes masculines) qui me semble être celui de l'auteur et pas un défaut écrit là exprès.
Le scénario est bien fait, pas le genre "on ne comprend pas ce qui se passe depuis le début", plus le genre "on n'a aucune idée de ce qui va se passer après". La romance est moyenne, avec une femme beaucoup plus jeune, mais pas centrée du tout sur le désir, plus sur la possibilité d'avoir confiance en quelqu'un dans un monde de paranoïa.
Intéressant, mais pas spécialement marquant.
7/10
"Guardian", par Priest
Pour la catégorie "Un livre long" de bingo_livres
Roman, environ 750 pages sur ma liseuse. De la fantasy chinoise avec une romance entre hommes. Cela commence comme de la fantasy urbaine, avec une sous-branche de la police qui s'occupe des phénomènes surnaturels, qui emploie quelques humains et pas mal de créatures surnaturelles. Il y a un côté comédie de bureau, alors qu'ils essaient de négocier avec les enfers, et de retrouver des artefacts ancestraux qui ont été "perdus". Et puis le personnage principal, la tête de ce bureau qui est aussi le "Gardien" a une romance, et il y a des histoires de vies antérieures, et des fois cela passe de la fantasy urbaine à la réécriture des mythes de création chinois.
Le scénario est sympa et laisse en haleine, même si des fois il faut se concentrer pour comprendre ce qui se passe, et je ne sais pas s'il faut blâmer la traduction ou mon background limité en fantasy chinoise. Ne pas comprendre tout ce qui se passe donne de l'intérêt à une potentielle relecture, mais c'était aussi frustrant pour moi.
L'humour ne me fait pas rire - tellement centré sur "un personnage a été promu par népotisme et est profondément incompétent, aussi, le chat est obèse". Ces deux personnages ont des arcs cool, donc ce n'est pas pleinement du mépris, juste de l'humour pas drôle.
Les deux personnages principaux dans la romance sont cool à voir agir, ensemble et séparément, mais aucun n'est un de mes préférés de tous les temps, ni dans les héros ni dans les personnages secondaires. La romance est intéressante, mais je ne me suis pas surprise à les shipper pleinement. Ce qui n'est pas grave ! Parce que c'est un de ces cas de romance m/m où le scénario est assez complexe pour qu'on puisse s'y intéresser sans être là pour la romance.
C'était bien, mais je crois que, vu la passion de certains de mes amis, je m'attendais à encore mieux.
8/10
"Concert animal" et "The Blinding Star", par Blanca Varela
Poésie, environ 50 pages en bilingue, et comme ses autres recueils étaient introuvables en français, j'ai acheté une édition anglaise où il y en avait plus. Et oui, maintenant je peux lire non seulement de la poésie écrite en anglais, mais de la poésie traduite en anglais !
Lire ses poèmes est un peu frustrant. Il y a de belles images, mais cela donne l'impression qu'on ne comprend pas tout, et la dernière ligne n'est jamais ce qu'on attend. Est-ce que c'est du pur surréalisme, là pour les images, ou est-ce qu'il y a un sens plus profond ? Par contre, ils semblent de plus en plus familiers, de plus en plus profonds, au fur et à mesure qu'on les relit.
Mourir chaque jour un peu plus
couper ses ongles
ses cheveux
ses désirs
apprendre à penser à ce qui est petit
et à ce qui est immense
aux étoiles les plus lointaines
et immobiles
dans le ciel
taché comme un animal qui fuit
dans le ciel
effrayé à ma vue
7/10
"Complete Poems", par Karin Boye
Poésie, environ 180 pages, dont 50 pages de biographie. Karin Boye est une autrice suédoise du début du 20e siècle, qui a tenté de combler ses aspirations spirituelles par d'abord le bouddhisme, puis le christianisme, puis s'est tournée vers les dieux païens locaux et la nature. Sa recherche de communauté l'a amenée dans différents groupes aux opinions politiques différentes, un peu dans la communauté LGBT de son époque aussi (elle était lesbienne) sans jamais, dit la biographie, trouver une place où elle se sentait pleinement acceptée. Elle est toujours restée solitaire.
Ses poèmes sont parfois philosophiques, parfois contemplatifs, parfois blessés, et tous plutôt déprimants, mais je les aime !
The Stars' Solace
I asked a star last night
- far away , where no one lives, a light -,
'Whom do you light, strange star?
You move so light and bright.'
I made my pity grow mute
when she looked with her starry gaze
'I light a night eternal,
I light a lifeless space.
My light is a flower that withers
in the skies' late autumn, rough.
That light is all my solace.
That light is solace enough.'
8/10
"Machineries of Empire 1 - Ninefox Gambit", par Yoon-Ha Lee
Pour la catégorie "Un livre en rapport avec le ciel et l'espace" de bingo_livres
Aussi pour la catégorie "Space Opera" du bingo r/fantasy
Roman, environ 280 pages sur ma liseuse, le premier tome d'une série. C'est de la science-fiction militaire du point de vue de l'empire maléfique. Dans cet univers, les mathématiques ont un effet physique sur le monde, en tout cas tant qu'ils sont fermement ancrés dans le réel par un calendrier et des rituels (les utiliser dans un lieu qui utilise un autre calendrier demande des calculs très rapides). Les maths-fiction sont un des points qu'on m'avait vendus, et c'est sympa, mais ça ne va pas assez loin à mon goût.
Le personnage principal, Kel Cheris, a utilisé les mathématiques du camp qu'elle attaquait au lieu des mathématiques officielles lors d'une attaque. Cela a sauvé ses hommes, mais elle n'aurait pas dû en être capable, parce que cela montre des capacités mathématiques au-delà de ce qu'on attend d'une militaire, et aussi parce que c'est considéré comme immoral d'utiliser un autre calendrier. En punition, elle se retrouve forcée de s'allier avec le général Shuos Jedao, qui n'a jamais perdu une bataille, pour aller reprendre une autre forteresse. Et quand je dis s'allier, il est mort/immortel, il vit dans sa tête, dans son reflet, dans son ombre.
Je n'étais pas à fond dans la partie stratégie militaire. C'est douloureux de voir des personnages (Kel Cheris, parfois des persos secondaires mis à l'honneur) manifester le meilleur de leurs compétences et de leur sens du sacrifice pour un but horrible, être fiers de leur honneur quand ils commettent des crimes de guerre. C'est fait exprès ! Mais c'est douloureux.
La partie la plus intéressante est la relation entre Cheris et Jedao, et le mystère qui entoure Jedao. La fin est très bien, centrée sur ça, et donne envie de lire la suite.
7/10
"Frère Wulf 4 - L'avènement de l'obscur", par Joseph Delaney
Pour la catégorie "Epilogues and prologues" du bingo r/fantasy
Roman, environ 280 pages. Quand j'avais critique le tome 3 de la série, je croyais que c'était le dernier, mais non, il y a un tome posthume ! Qui marche beaucoup moins bien, dans mon opinion, que le précédent comme dernier tome de la série, il ouvre trop de choses, mais ce n'est pas la faute de l'auteur qui ne pouvait pas savoir qu'il n'aurait pas l'occasion d'écrire la suite :(
Je l'ai trouvé sympa à lire tout le long, il n'y a rien dans l'histoire dont je puisse me plaindre, mais ce n'est pas un de mes préférés. Je pense qu'à un moment de la série, l'auteur a monté d'un niveau de puissance les adversaires, et ensuite il n'a plus pu redescendre, et c'est un des points qui me frustrent par rapport à la première série. Encore des histoires de qui va régner sur l'Obscur, encore un Dieu à combattre. Et ça a des aspects originaux par rapport aux précédents, mais ça reste trop rapide pour moi.
J'aime toujours ses personnages (Wulf n'est pas mon préféré, mais j'ai été contente de voir autant Jenny, et agréablement surprise de revoir Slither).
7/10
"Complete Poems", par Christina Rossetti
Environ 900 pages de poésie et 300 pages de notes variées. J'avais beaucoup aimé certains poèmes de Christina Rossetti, et j'ai essayé d'en lire d'autres.
Il y a cinq recueils publiés de son vivant : Goblin Market and Other Poems, The Prince's Progress and Other Poems, Sing-Song: A Nursery Rhyme Book, A Pageant and Other Poems, Verses. Cela contient aussi une quantité impressionnante de poèmes publiés dans des revues, imprimés pour des cadeaux privés, ou retrouvés dans ses papiers à sa mort et jamais imprimés du tout.
Je suis un peu déçue, c'est très inégal de mon point de vue. Déjà, presque la moitié des poèmes sont "dévotionnels". Ce n'est pas le fait que ce soit sur sa relation avec Dieu, c'est un thème classique, c'est que ceux-là sont pour montrer un comportement moral et modèle, parfaitement aligné sur la doctrine, avec très peu de conflit, toujours cliché, et que cela m'a profondément ennuyée, en particulier l'ensemble de Verses.
Rossetti est chrétienne et morale dans tous ses poèmes ! Mais les autres permettent de montrer les imperfections, les failles, l'amour de Dieu est infini mais je ne peux m'empêcher de vouloir l'amour des humains aussi, la beauté des fleurs est vanité et ne dure qu'une saison mais je l'aime quand même. Ils semblent personnels ! Les poèmes dévotionnels ne semblent personnels que quand elle avoue être jalouse des morts !
Mais bon, même s'il y en a trop à mon goût, il n'y a pas que cela. Il y a beaucoup de poèmes très charmants sur la nature, les fleurs, les oiseaux. Beaucoup de poèmes de style ballade populaire, conte de fées ou histoire de fantômes aussi. Et des textes sur la famille, surtout sur sa mère et sa soeur.
Mais voilà, c'est très irrégulier. En plus de "Goblin Market", qui reste ma préférée d'elle, il y a une série de sonnets excellente sur le point de vue de la Dame à laquelle sont adressés les sonnets de la Renaissance, mais qui n'a jamais de voix propre. Il y a une série très personnelle, qui aurait pu rester privée pour toujours, sur l'homme qui l'a aimée et qu'elle a aimé mais qu'elle n'a pas pu épouser parce qu'il n'était pas religieux. Il y a un recueil entier de comptines pour les enfants, Sing-Song, qui ne font souvent pas plus de dix lignes et qui sont très mignonnes. Mais il y a eu aussi des moments où je trouvais qu'elle se répétait, et je conseillerais de lire plutôt une anthologie/best of que ses oeuvres complètes.
Allez, un poème court (et représentatif de ses thèmes) de son recueil pour enfants !
Hope is like a harebell trembling from its birth,
Love is like a rose the joy of all the earth;
Faith is like a lily lifted high and white,
Love is like a lovely rose the world's delight;
Harebells and sweet lilies show a thornless growth,
But the rose with all its thorns excels them both.
Et sinon, je pense que tous les gens qui aiment les conte de fées, ou la fantasy avec des fées, devraient avoir lu
Goblin Market, tellement c'est une inspiration pour comment ont été écrits ces thèmes plus tard (et aussi, très bien !)
7/10
"Complete Poems", par Edith Södergran
Environ 200 pages, dont 50 de biographie et le reste de poésie. La biographie raconte la vie tragique d'Edith Södergran, son combat contre la maladie qui a déjà tué son père, sa solitude, la difficulté qu'elle a eue à faire reconnaître ses oeuvres et la façon dont ses défenses de son modernisme ont souvent été accusées de mégalomanie (et il y a de l'arrogance ! Mais plein de poètes masculins de la même époque avaient la même, et ça n'a dérangé personne !) Les influences culturelles et la difficultés de choisir une langue d'écriture (née en Finlande de famille suédoise liée à la Russie, élevée en Allemagne), les influences littéraires de Heine, Goethe ou Nietzsche.
Södergran écrit beaucoup de ses poèmes à travers un filtre de contes de fées nostalgiques, un monde où il y a des princesses, des châteaux magiques, et où les arbres peuvent penser. Ses sujets peuvent être classiques - la nature, l'amour malheureux, les quêtes spirituelles et la force de l'âme, la solitude, mais cela leur donne pour moi un charme remarquable. J'aime moins sa prose, mais il n'y en a que quelques pages. Je regrette de ne pas l'avoir découverte plus tôt, le côté magique de sa poésie aurait autant formé mon imaginaire que Heine, Bertrand ou Maeterlinck.
Sister
I once had a sister, a golden child.
In the city she vanished from me in the crowd.
When amidst black spruce trees I see
young birch trees shake their golden locks,
I remember my sister.
Is she standing wide-eyed amidst the trees
with beating heart,
is she stretching out her hands towards me?
Sister, my sister, where did they take you?
What dreams of pleasure can you dream
on beds of tiredness?
Child of heroes, child of luck!
We shall wait together
for the day of fairy-tales.
9/10
"Crow", par Ted Hughes
Pour la catégorie "Entitled animals" du bingo r/fantasy
Poésie, environ 90 pages. Ted Hughes est un auteur du 20e siècle. Le personnage principal, Crow, est vaguement inspiré du dieu trickster des inuit, et vit différentes aventures, certaines très prosaïques, certaines très abstraites. Je n'ai pas trouvé vraiment d'ordre ou de narration globale, mais l'ambiance était cool, et les poèmes parfois cruels (ceux qui parlent de la guerre en particulier), parfois drôles, parfois vertigineux d'un point de vue spirituel. J'aime ! Par contre il y a deux incidences d'utilisation de mots racistes qui m'ont fait faire ouch.
C'est difficile d'expliquer, aussi voilà un extrait.
Crow Communes
"Well," said Crow, "What first?"
God, exhausted with Creation, snored.
"Which way?" said Crow, "Which way first?"
God's shoulder was the mountain on which Crow sat.
"Come," said Crow, "Let's discuss the situation."
God lay, agape, a great carcass.
Crow tore off a mouthful and swallowed.
"Will this cipher divulge itself to digestion
Under hearing beyond understanding?"
(That was the first jest.)
Yet, it's true, he suddenly felt much stronger.
Crow, the hierophant, humped, impenetrable.
Half-illumined. Speechless.
(Appalled.)
8/10
"Poèmes choisis", par Gabriela Mistral
Poésie, environ 180 pages, plus un peu de biographie, plus son discours de remise du Prix Nobel (c'est une collection sur les Prix Nobel de littérature). Je ne suis pas très fan de l'édition, malgré de très beaux dessins. Pas de référence sur quel poème vient de quel recueil, a été écrit à quelle date, je ne suis même pas certaine qu'ils soient dans l'ordre chronologique. Certains poèmes, dans la partie biographique, sont cités en partie, mais s'ils sont si importants, pourquoi ne pas les mettre dans la sélection ? Même le début, qui raconte comment elle a eu le prix, explique pourquoi c'est arrivé de façon assez condescendante (cela aurait dû être Paul Valéry, etc)
Mais assez parlé de l'édition, parlons des poèmes eux-mêmes ! Dans ses premières oeuvres, un des thèmes principaux est la souffrance, que ce soit celle de Jésus, ou le deuil d'un amoureux (avec lequel sa relation dans la vraie vie est floue). Plus tard, elle continue à parler des enfants, de façon plutôt positive mais en regrettant de ne pas en avoir, et parle aussi de la culture du Chili, en particulier des Indiens.
Ses poèmes sont très clairs et centrés sur l'émotion ; cela marche sur moi.
LE REVOIR
Jamais plus, jamais plus, ni par les nuits pleines
de palpitations d'astres, ni aux vierges aubes
ni dans les soirs d'immolation ?
Ni sur la marge d'aucun pâle sentier
bordant les champs, ni d'aucune
frissonnante fontaine, blanche de lune ?
Ni sous les entrelacs de la forêt
Où la nuit m'a surprise à l'appeler
ni dans la grotte qui me renvoie mon cri ?
Le revoir, n'importe où, dans quelque tranquille
profondeur de ciel ou dans quelque abîme plein de remous,
sous la lune paisible ou parmi la livide horreur !
Être avec lui tous les printemps,
tous les hivers, faisant un noeud anxieux
à son cou ensanglanté !
7/10
"anOther Mythology: Poems", par Maxwell I. Gold
Pour la catégorie "Self Published or Indie Publisher" du bingo r/fantasy
Poèmes en prose, environ 50 pages. On me l'avait vendu comme une réécriture queer et poétique des mythes de création grecs ; c'était tentant. En fait, l'auteur n'aime pas trop le principe des réécritures, c'est plus une déconstruction, de l'héroïsme classique, de l'action virile, et du "hétéro ever after". Des personnages et schémas des mythes grecs - Hades, Thanatos, la lune (ici masculine) et Endymion - sont voisins de thèmes queer moderne comme la culture drag ou le "mythe du placard". Certains poèmes esquissent un amour interdit - et intéressant - entre deux dieux plus anciens que les dieux. Mais on ne peut pas vraiment parler d'une direction dans leur histoire. Les personnages mythologiques sont utilisés de façon plutôt symbolique, sans leur donner de personnalité. Les personnages féminins sont inexistants, sans doute dans le prolongement du rejet de l'hétérosexualité, mais quand on déconstruit, des fois il faut regarder ce qu'on reconstruit. L'écriture poétique est correcte, mais ne me touche pas. J'ai été déçue.
Je vais quand même citer celui qui m'avait fait espérer un arc narratif plus clair, parce que je peux !
Across the Seas, Into the Desert, I'd Have You Again
I never meant for it to come to this - to see you in such a condition, never meant to wander endless eons to see that corpse once more, which was always mine. Long ago, in my wildest and darkest dreams, I saw your body plucked from crystal waters, wrapped in chains deep inside some closet-casket where I search frantically across the ages through the Old Kingdoms now swallowed in sand and death, forgotten to the world - you forgotten by the world, but never by me - never again.
Bloodied and bruised by the gods so jealous, hateful of our forbidden passions, they ripped your kiss from my tired lips where the music and stars created from my baleful lamentations rose towards that most beautiful, rubescent sunset cradled between ancient ruins - longing for a familiar touch, a reminder I'd cross the seas, traverse the cosmic sands if it meant I'd hold you again.
5/10
"Eclipse d'étoile", par Nelly Sachs
Poésie, environ 180 pages. Ce livre contient deux recueils. Le premier, Dans les demeures de la mort, est de la poésie obsédante et déprimante sur les camps de concentration (où elle n'était pas, s'étant réfugiée en Suède, mais où son fiancé est mort). Le second, Eclipse d'étoile, est plus ambitieux, il parle aussi des camps mais de façon plus indirecte, et aborde aussi beaucoup de spiritualité juive, le destin d'Israël, etc. Les deux sont de la bonne poésie, mais le premier, pour moi, frappe vraiment comme un coup de poing, même si le second est réputé meilleur.
Quand tu relèveras tes murs -
Ton âtre, ta couche, table et chaise -
Tes larmes sur ceux qui s’en sont allés,
Qui n’habiteront plus avec toi,
Tes larmes,
Point ne les appends à la pierre
Point au bois -
Des pleurs sinon, tomberaient dans ton sommeil,
Ce court sommeil qu’il te faut encore faire.
Ne soupire pas quand tu mettras les draps à ton lit
Tes rêves sinon se mêleraient
À la sueur des morts.
Ah, murs et objets familiers sont
Telles les harpes éoliennes, réceptifs,
Et tel un champ où pousse la souffrance,
Et sentent toute trace en toi d’alliance à la poussière.
Construis quand s’écoule le sablier
Mais ne pleure pas les minutes en allées
Ensemble avec la poussière
Qui recouvre la lumière.
8/10
"Poèmes choisis", par Angèle Vannier
Poésie, environ 150 pages. J'avais découvert cette auteure dans Je serai le feu, et elle m'avait semblée intéressante ; ce livre le confirme. C'est une poétesse du 20e siècle, bretonne, aveugle, qui a eu des liens avec les surréalistes sans faire partie du milieu. J'adore ses images, et comment ses poèmes sont imprégnés de légendes. Les poèmes ont été choisis par l'auteure elle-même peu de temps avant sa mort, une sélection dans chacun de ses recueils publiés. Je lirai les recueils individuels si j'en ai l'occasion, mais ils sont tous épuisés et difficiles à trouver. En attendant, je profite de ce que j'ai réussi à trouver !
UN SERPENT COULE DANS SA BAGUE
Tous les miroirs sont veufs et les fuseaux brisés
dans le château où vit l'ombre de cette reine.
Un loup s'endort au coeur d'un triangle écarlate
Le rouet du plaisir tourne à faux tourne à blanc
car le pacte est rompu de l'ange avec la bête.
La reine est morte
un serpent coule dans sa bague
Les cloches de l'étang dévorent des poissons
Le pêcheur triche au jeu des âmes sur le pont
Dans un crime oublié au fond d'un corridor
Aveugle au temps
une araignée couve un trésor
La reine est morte
Et l'ombre de la reine est en péril de mort
9/10
Progression : 41/52
"Risques de lecture" : L'agent secret, Guardian, The Blinding Star, Complete Poems (Boye), Ninefox Gambit, Poèmes choisis (Mistral), Eclipse d'étoile, Poèmes choisis (Vannier) -> 27/26
Bingo-livres :
25/25r/fantasy :
4/25