"Les plus beaux mythes de tous les temps", par Vaclav Cibula
Environ 200 pages, dans la collection Gründ, que j'aime beaucoup - c'est entièrement centré sur les mythes et légendes d'Europe. Les mythes choisis sont plus ou moins adaptés en contes de fées, jusqu'à parfois changer des détails de façon assez notable. Est-ce pour les rendre plus lisibles par les enfants (le viol de la mère d'Arthur, par exemple, est passé sous silence) ? Est-ce pour les rendre plus acceptables pour le régime communiste sous lequel c'était imprimé (la version plus morale de l'anneau de Gyges est frappante pour moi) ? En tout cas, c'est un peu décevant. Et surtout, frustrant, parce que pour ceux que je ne connaissais pas, il n'y a aucun moyen de savoir si j'ai bien accès à l'histoire telle qu'elle a été racontée à l'origine.
Mais cela n'empêche pas que c'était agréable à lire ! Les variations sur les histoires que je connaissais déjà rendent le livre moins prévisible. Et dans celle que je ne connaissais pas, il y en a que j'ai trouvées très belles, comme celles du garçon-poisson de Naples, de l'esclave de Majorque, ou du berceau de la reine.
7/10
"13 contes de Mongolie", compilés par Laure de Cazenove, réécrits par Odile Weulersse
Recueil de contes, environ 120 pages, qui se passent presque tous à l'époque de l'Empire Mongol, sous Gengis Khan et ses descendants. Les chevaux, chameaux, etc, sont donc un thème majeur.
Il n'y a absolument aucune histoires que je connais dans tout le recueil ! C'est un point positif ! Le point négatif est qu'il y a beaucoup trop d'histoires qui finissent mal, et surtout quand c'est des histoires d'animaux, ça me déprime, ha ha. En particulier la première a failli bien finir, et non, le cheval meurt. Et le renard dans la deuxième, et... on sent un thème.
Mais il y a aussi des contes facétieux ! Mon préféré est "La caravane du fils de Sulaymanbay", qui est à moitié un conte merveilleux, et à moitié un conte facétieux, où tout est résolu grâce à la ruse d'une femme.
7/10
"Contes et légendes de Paris et de Montmartre", par Charles Quinel
Environ 250 pages, dans la collection Fernand Nathan. Des histoires qui vont des saints mythologiques (Saint Denis, Sainte Geneviève) au 18e siècle, souvent en lien avec un nom de rue parisienne. A part le merveilleux chrétien/chevaleresque, il y a très peu de surnaturel, et certaines histoires sont plus de la catégorie "légende urbaine" que conte. Il y en a même certaines où je soupçonne les auteurs d'avoir brodé sur une légende urbaine de quelques lignes sur un personnage historique célèbre et d'avoir rajouté de la caractérisation pour en faire une histoire avec une chute, souvent. Je dois avouer que j'aurais bien aimé avoir leurs sources.
Si leur but est de montrer que Paris a aussi ses contes, c'est un peu un échec, parce que c'est très différent des autres livres de la collection. Mais c'est aussi parce que c'est très différent que c'est intéresssant à lire. J'ai bien aimé l'histoire du lièvre de la forêt de Bondy, et aussi l'histoire d'espionnage sur Richelieu.
7/10
"Stories from around the world", raconté par Heather Amery, illustré par Linda Edwards
Recueil de contes, environ 120 pages. Les histoires ne sont pas mal choisies, mais ça qui fait le charme du livre, c'est les illustrations. Vraiment adorable, et en plus, chaque conte est entouré par un petit cadre différent, avec des choix de couleurs pastel pour aider à l'atmosphère... un très bel objet. Je connaissais la plupart des contes européens, ils ont été choisis pour être typiques (le conte français choisi est "Le chat botté" pour donner un exemple) et bon, l'Europe est un peu sur-représentée, mais il y quand même des contes de tous les continents, qui sont charmants. Bien sûr j'ai aimé avoir les endroits moins représentés, comme les seulement deux contes d'Océanie, qui restent précieux pour moi.
8/10
"Histoires du soir : Les animaux", par Anne Bouin
Environ 200 pages, 21 histoires, illustrées par plusieurs personnes différentes, sur le thème des animaux. Ensuite, le genre d'histoire est différent : il y a des contes merveilleux, incluant une très charmante histoire d'épouse animale, il y a des récits étiologiques sur pourquoi les animaux sont comme ils sont, des récits facétieux, dont l'histoire de Renard, Ysengrin et les anguilles est la plus connue en France, des fables morales... Il y a des contes extrêmement connus - le loup et les sept chevreaux, Boucle d'or et les trois ours - et d'autres que je ne connaissais pas.
C'est marqué à partir de 3 ans pour faire la lecture, et je trouve que certaines histoires sont un peu gore pour des petits enfants, mais pour moi c'était très agréable !
7/10
"Dans les griffes de l'océan", par Alain Grée
Environ 250 pages, non-fiction. Alain Grée, plus connu (de la génération au-dessus de la mienne, en tout cas) pour les séries "Petit Tom" et "Achille et Bergamote", est un passionné de la mer, et a décidé de présenter des témoignages d'époque (principalement 19e siècle), dans des livres ou des journaux, qu'il a collectionnés sur le thème du naufrage. Il rajoute juste ses brèves présentations, et coupe quelques digressions.
Le fait que ce soit des textes d'époque a rendu le livre bien plus intéressant à lire que j'imaginais, non seulement sur ce qui pouvait se passer en mer, mais sur les états d'esprit de l'époque. Mais par contre, cela veut dire... racisme vintage. Tellement de racisme.
J'ai appris ce qui s'était vraiment passé lors de l'histoire du Radeau de la Méduse, dont je ne connaissais que le tableau ! Parfois, il y a un naufrage parce que la mer est terrifiante. Parfois, comme ici, il y a un naufrage parce que le capitaine est profondément incompétent et égoïste.
Les autres naufrages sont bien moins connus que celui-là (pas de Titanic). Mais en tout cas, j'ai appris des choses, et c'était plutôt agréable à lire, même si j'ai été horrifiée par les nombreux morts, bien sûr.
7/10
"Antigone", par Robert Garnier, adapté par Thierry Maulnier
Théâtre, environ 120 pages, une pièce de théâtre du 16e siècle traduite en français moderne (c'est bien pour moi) et avec quelques passages coupés pour la scène (ça me plait moins) par un metteur en scène du 20e siècle, Thierry Maulnier. Cela regroupe à la fois la guerre entre Eteocle et Polynice et ce qui est habituellement l'argument d'Antigone. C'est assez ambigu sur si Oedipe est mort ou pas - on le voit en mendiant sur les routes au début, mais ensuite, Antigone revient, mais il n'a pas de scènes ? Mais sa mort n'est pas mentionnée ? Un peu confus, donc.
La morale sur l'histoire est beaucoup plus pragmatique que dans les pièces antiques. Même si Eteocle est toujours un parjure et Polynice toujours un traitre, ce n'est pas ce qui leur est reproché, mais la guerre en soi, les civils tués, les villages incendiés. C'est cette réalisation qui leur fait, dans un moment de responsabilité qui n'exclut pas leur colère, décider de régler leur différent par un duel. De même, à la fin, Créon pense que même s'il n'est pas, selon les lois des dieux, physiquement parricide, il a quand même moralement tué son fils en condamnant Antigone. En général, un des thèmes de cette pièce est ce qui fait un bon roi.
Antigone peut sembler un peu hypocrite, parce qu'avant son sacrifice, elle a passé une bonne partie de son temps à essayer de convaincre son père, puis sa mère, de ne pas se suicider, mais en fait, c'est plus de la naïveté touchante de petite fille ? Elle veut que toute sa famille soit ensemble, même si c'est au royaume des morts, et la mort d'Eteocle et Polynice fait partie de ce qui la fait basculer. Hemon, qui est, il est vrai, un peu fade, n'arrive pas à la convaincre, et se fait entraîner par sa logique.
Je n'aime pas trop ce que l'auteur a fait avec Ismene, en particulier dans le fait qu'elle ne suive pas Antigone pour guider Oedipe aveugle, ce qui va contre les versions que je préfère.
Mais sinon, j'adore voir les variations sur une légende, et celle-là a des aspects intéressants.
7/10
"The Hundred Thousand Kingdoms", par N.K. Jemisin
Roman, 230 pages dans la version électronique que j'ai lue, mais comme souvent, je soupçonne qu'"en vrai" il est beaucoup plus long.
Le cadre est un empire colonial sur lequel la famille Arameri règne pour tout ce qui est vraiment important. La mère de l'héroïne est une Arameri, qui s'est enfuie avec un homme que sa famille n'approuvait pas, et qui a été deshéritée pour cela. Après sa mort, l'héroïne, Yeine, vient à Sky, la ville centrale, pour la première fois. En théorie, pour découvrir son héritage, et peut-être, contrairement à sa mère, l'accepter. En pratique, pour découvrir qui a tué sa mère, et la venger - elle vient d'une société très guerrière et matriarcale.
L'arme principale des Arameri sont des dieux, réduits en esclavage après avoir perdu une guerre contre celui qui est actuellement le dieu suprême. Je dois avouer que je n'étais pas très intéressée par le côté impérialiste ; il sert plus de toile de fond. L'enquête sur la mort de la mère de Yeine était plus intéressante, mais piétinait. Par contre, les dieux sont le thème central. La façon dont ils sont limités par une malédiction, mais toujours divins en esprit. La façon dont les détails de la guerre contre les dieux se dévoilent peu à peu malgré l'insistance des vainqueurs pour en donner une version à leur avantage. La façon dont Yeine, en tant que descendante de la famille Arameri, peut en pratique donner des ordres aux dieux, mais dont eux, qui ont des millénaires d'expérience, peuvent essayer de la manipuler en retour. C'est la force du livre, que ce soit pour les interactions humaines (et la romance, que je n'ai pas shippée mais qui est bien faite) et surtout les nombreuses révélations sur révélations de ce à quoi peut ressembler un plan ourdi par des dieux.
Les autres histoires de la trilogie semblent ne pas être sur les mêmes personnages mais être dans le même univers ? Et cela fait qu'elles m'intéressent encore plus. Oui, je veux d'autres dieux ! En particulier ceux qui sont restés fidèles au dieu suprême, et qu'on a encore très peu vus.
9/10
"Contes juifs", par Leopold de Sacher-Masoch
Recueil de nouvelles, environ 300 pages. L'auteur, du 19e siècle, fatigué de l'anti-sémitisme permanent, a recueilli des contes juifs dans les communautés de différents pays, et en a présenté une version littéraire. Contrairement à ce que j'espérais, il n'y a pas d'éléments surnaturels. Ce sont des tranches de vie très sages où tout le monde respecte les préceptes religieux, ou personne ne couche avant le mariage, et où les jeunes filles convainquent leur père, à force de ruse, d'accepter leur fiancé plutôt que de s'enfuir avec lui. En fait, il y a beaucoup d'histoires de romance et d'obstacles dont il faut triompher pour arriver à la fin heureuse qui est le mariage, et ça va des familles ennemies aux enlèvements par des pirates en passant par des "il faut marier la grande soeur d'abord et elle est très difficile".
Si ce n'était pas, explicitement, pour combattre l'anti-sémitisme, je trouverais ça bien trop sage, mais hey, si l'auteur a besoin de convaincre ses lecteurs d'accepter que les juifs sont des personnes morales (mais pas tous intégristes), c'est triste mais je dois l'accepter aussi.
L'auteur utilise aussi ces histoires pour décrire dans les détails toutes les fêtes juives et leur sens (pas toutes dans la même histoire, et pas dans toutes les histoires, évidemment),et de façon qui ne fait pas info dump, c'est charmant.
7/10
Progression : 39/52
"Risques de lecture" : Dans les griffes de l'océan, Antigone, The Hundred Thousand Kingdoms, Contes juifs -> 24/26