L'article (partie 1)
anonymous
May 23 2005, 05:17:00 UTC
Khodorkovski : réquisitoire contre la réussite en Russie Christian Michel, Agefi, 19 mai 2005
Devenir très riche dans l'empire de Vladimir Poutine est mal vu. Surtout quand on est juif, ce que sont les oligarques.
«Un bon oligarque est un oligarque en taule», pensent la plupart des Russes. C'est pourquoi ils sont pauvres. Au football comme en musique, comme dans les affaires, le respect qui entoure la réussite suscite les vocations. Une caractéristique des pays pauvres est que l'élite y préfère la carrière administrative au négoce, l'armée à la production, elle y vit de l'impôt plutôt que de créer la richesse qui le finance.
Un procès qui ne suscite même pas l'indignation
Depuis Custine, nous savons que la Russie est un charmant pays de poètes, de savants et de brutes. La vile fonction de travailler pour s'enrichir était bonne pour les juifs. Sept décennies de socialisme n'ont pas fait progresser les mentalités. Les oligarques sont doublement tarés : ils sont juifs et insolemment riches.
Le mépris des Russes pour leurs meilleurs créateurs de prospérité n'est pas loin d'être partagé à l'étranger. Le procès fabriqué de toutes pièces contre Mikhaïl Khodorkovski et Platon Lebedev suscite à peine une indignation polie. Le président Bush laisse à sa secrétaire d'Etat le soin d'émettre des réserves. La France des droits de l'homme se tait. Amnesty International, après un an d'atermoiements, publie enfin une vive critique des méthodes poutiniennes, sans néanmoins reconnaître à Mikhaïl Khodorkovski son statut de prisonnier politique (on se demande bien ce qu'il est d'autre).
Est-ce parce qu'ils sont juifs qu'on ne les aime pas?
Pourquoi tant de réticence à l'égard des oligarques? Qu'ils soient juifs s'explique aisément. Ils ont commencé leur carrière dans les années 80, à peine sortis de l'adolescence, lorsque l'administration Andropov a fermé les yeux sur la formation d'un «marché gris» (ce que nous appelons ici un «marché libre»). Mais ce n'est pas parce qu'une activité cesse d'être criminalisée qu'elle devient honorable. Un bon apparatchik n'eût pas voulu que sa fille épousât un «trafiquant»; et donc ceux qui s'engagèrent dans cette activité d'importer des pièces détachées d'ordinateurs (comme Khodorkovski), d'approvisionner les magasins en denrées introuvables, de vendre les surplus des entreprises d'Etat, furent ceux que leur origine ethnique ne destinait pas aux plus hautes fonctions du cursus soviétique, notamment les juifs.
En 1988, Gorbatchev légalisa la création de sociétés privées. Qui d'autre que ces entrepreneurs du marché gris avaient accumulé le capital pour les impulser? Ces jeunes gens se paraient du titre de banquier. Mais pour Ivan le bon Soviétique, ils restaient des juifs indécrottables qui deux ans plus tôt vendaient des choux au cul d'un camion.
Christian Michel, Agefi, 19 mai 2005
Devenir très riche dans l'empire de Vladimir Poutine est mal vu. Surtout quand on est juif, ce que sont les oligarques.
«Un bon oligarque est un oligarque en taule», pensent la plupart des Russes. C'est pourquoi ils sont pauvres. Au football comme en musique, comme dans les affaires, le respect qui entoure la réussite suscite les vocations. Une caractéristique des pays pauvres est que l'élite y préfère la carrière administrative au négoce, l'armée à la production, elle y vit de l'impôt plutôt que de créer la richesse qui le finance.
Un procès qui ne suscite même pas l'indignation
Depuis Custine, nous savons que la Russie est un charmant pays de poètes, de savants et de brutes. La vile fonction de travailler pour s'enrichir était bonne pour les juifs. Sept décennies de socialisme n'ont pas fait progresser les mentalités. Les oligarques sont doublement tarés : ils sont juifs et insolemment riches.
Le mépris des Russes pour leurs meilleurs créateurs de prospérité n'est pas loin d'être partagé à l'étranger. Le procès fabriqué de toutes pièces contre Mikhaïl Khodorkovski et Platon Lebedev suscite à peine une indignation polie. Le président Bush laisse à sa secrétaire d'Etat le soin d'émettre des réserves. La France des droits de l'homme se tait. Amnesty International, après un an d'atermoiements, publie enfin une vive critique des méthodes poutiniennes, sans néanmoins reconnaître à Mikhaïl Khodorkovski son statut de prisonnier politique (on se demande bien ce qu'il est d'autre).
Est-ce parce qu'ils sont juifs qu'on ne les aime pas?
Pourquoi tant de réticence à l'égard des oligarques? Qu'ils soient juifs s'explique aisément. Ils ont commencé leur carrière dans les années 80, à peine sortis de l'adolescence, lorsque l'administration Andropov a fermé les yeux sur la formation d'un «marché gris» (ce que nous appelons ici un «marché libre»). Mais ce n'est pas parce qu'une activité cesse d'être criminalisée qu'elle devient honorable. Un bon apparatchik n'eût pas voulu que sa fille épousât un «trafiquant»; et donc ceux qui s'engagèrent dans cette activité d'importer des pièces détachées d'ordinateurs (comme Khodorkovski), d'approvisionner les magasins en denrées introuvables, de vendre les surplus des entreprises d'Etat, furent ceux que leur origine ethnique ne destinait pas aux plus hautes fonctions du cursus soviétique, notamment les juifs.
En 1988, Gorbatchev légalisa la création de sociétés privées. Qui d'autre que ces entrepreneurs du marché gris avaient accumulé le capital pour les impulser? Ces jeunes gens se paraient du titre de banquier. Mais pour Ivan le bon Soviétique, ils restaient des juifs indécrottables qui deux ans plus tôt vendaient des choux au cul d'un camion.
Reply
Leave a comment