Titre : Bonne idée - Michael (1/4)
Auteur :
clair-de-luneSpoilers : 2.04
Note : On m’a fait remarquer que je n’écrivais pas des trucs très joyeux (ce qui est vrai), aussi, histoire de ne pas être trop déprimante, ai-je basculé du côté un peu plus rose de la force. J’ai essayé, en tout cas. Je ne garantis pas le résultat, mais il faudra m’accorder des points pour avoir tenté le coup ;-)
Résumé : « Ce n’est pas une bonne idée, » lui répète Lincoln au cas où il n’aurait pas entendu ou compris les trois premières fois.
Parties précédentes / Parties suivantes « Ce n’est pas une bonne idée, » lui souffle Lincoln dans le cou. Il se tient très, trop, près de lui, ça lui rappelle Abruzzi. Il n’a jamais su pourquoi Abruzzi se collait ainsi aux gens pour leur parler, peut-être son ascendance latine s’exprimant de façon excessive, mais il sait pourquoi Lincoln le fait en cet instant précis : il redoute qu’il fasse un truc stupide et il essaye de le garder dans son espace pour l’en empêcher. Comme si d’entre eux deux, c’était lui qui était connu pour faire les trucs stupides. Parfois, vraiment, il...
Il relève la tête et s’immobilise, frappé de stupeur : il a perdu le fil de ses pensées.
« Ce n’est pas une bonne idée, » lui répète Lincoln au cas où il n’aurait pas entendu ou compris les trois premières fois. Mais même avant ça, la phrase lui était familière. Michael fronce les sourcils et se concentre pour essayer de se souvenir où il a déjà entendu ces mots. Ca lui revient tout d’un coup et il a un petit sourire de satisfaction en constatant que sa mémoire n’est pas en si mauvais état : ils sont sortis de sa bouche plus souvent qu’il pourrait ou voudrait le compter au cours des vingt dernières années. Ils étaient généralement dirigés vers Lincoln. Il se souvient même de la dernière fois qu’il les a prononcés. C’est trois heures plus tôt quand Linc a ouvert une bouteille de Johnnie Walker en lui disant qu’il avait besoin d’un verre ou deux. Et Michael a répondu, il s’en souvient comme si c’était hier... d’ailleurs, c’était hier... enfin, c’était il y a trois heures, mais il est presque deux heures du mat’, donc techniquement... bref, il a répondu :
« Ce n’est pas une bonne idée, Lincoln. »
Mais en fait si. Les deux ou trois verres de scotch, peut-être un peu plus (il doit reconnaître qu’il n’a pas compté) lui ont permis de voir les choses beaucoup plus clairement.
« Ne t’inquiète pas, lui dit-il, j’ai un plan. »
Il a toujours un plan.
« Entrer par la fenêtre ? C’est pas ce que j’appelle un plan. »
Il se retourne et le dévisage d’un air contrarié. En tout cas, il essaye de le dévisager parce qu’il fait trop noir pour qu’il puisse vraiment le regarder. Mais il sent que son frère suinte la désapprobation. Ah ah. Si ce n’est pas un retournement de situation, ça !
« Non, dit-il froidement, blessé par la remarque, ça c’est le plan de secours. » Il a toujours un plan de secours. Au cas où, vous savez, le maffioso lui ayant coupé des orteils ne puisse finalement pas fournir l’avion prévu. « Le plan, c’est de passer par la porte de la cuisine. »
Ils sont d’ailleurs sur l’escalier de secours menant à la dite porte. Tout se passe comme prévu.
« Brillant, marmonne Lincoln sans conviction, et Michael lui lance un regard en coin.
- Ferme ta chemise, tu luis dans le noir, » rétorque-t-il. Depuis qu’ils ont recouvré leur toute relative liberté, Linc semble avoir oublié comment on boutonnait une chemise et se promène en permanence complètement dépoitraillé. Ca va finir par attirer l’attention sur eux.
Il prend pied sur le palier qui se situe devant la porte de la cuisine. Ce n’est pas vraiment une porte, d’ailleurs, mais plutôt une haute fenêtre fermée par une serrure de type...
« Michael ! Bouge-toi, » siffle Lincoln en lui donnant un coup de coude.
Avec un murmure agacé, Michael sort de la poche arrière de son jean une petite trousse de manucure tout en se demandant pourquoi Linc a tellement insisté pour l’accompagner s’il n’avait pas envie d’être là. Il aurait tout à fait pu se débrouiller tout seul. Il regarde les petits objets étincelants sur fond de cuir noir et fronce de nouveau les sourcils. Puis tend la trousse à son frère.
« Uh uh, fait celui-ci. Je ne fais pas ça.
- Oui, tu as raison parce que si on nous retrouve, ce sera le délit d’effraction qui te coûtera le plus cher.
- Qu’est-ce qui te fait croire que je sais comment... »
Michael ne le laisse pas finir et lève les yeux au ciel d’un air entendu. La façon dont les étoiles brillent détourne brièvement son attention, c’est rare que le ciel soit aussi limpide en pleine ville...
Avec un soupir, Lincoln lui prend la trousse des mains, récupère une lime et commence à s’attaquer à la serrure. Michael ouvre la bouche pour lui expliquer comment fonctionne ce genre de dispositif, mais change d’avis devant le regard noir que son initiative suscite. Il enfonce avec satisfaction les mains dans les poches de son pantalon quand la serrure cède : il savait bien que Linc savait faire ça, il ne voit vraiment pas pourquoi son frère se faisait prier pour...
« Tu entres ou on s’en va ? »
Ah parfait, c’est ouvert. Il vacille un peu et doit se raccrocher à Lincoln au moment d’enjamber le petit rebord, mais il parvient à se faufiler à l’intérieur sans trop de mal. Il fait vraiment très très sombre dedans et il se prend les pieds dans une chaise en tâtonnant à travers la cuisine.
« Chuuuuut ! » souffle-t-il bruyamment en remettant le meuble en place. Derrière eux, Linc referme la fenêtre, puis il lui pose une main sur l’épaule et le pousse en avant. Il entend dans son dos de vagues marmonnements sur le thème de "mais qu’allais-je faire dans cette galère ?"
La cuisine ouvre sur un living room mieux éclairé, baigné par la lumière de la lune et des étoiles qui entre par de grandes fenêtres. D’ailleurs, Michael distingue sans peine une silhouette un peu penchée en avant, les bras prolongés d’un objet oblong, et il s’écarte d’un bond pour éviter le coup qui va inévitablement venir.
Le coup en question cueille Linc en plein derrière les genoux et son frère s’effondre au milieu de la pièce dans un sinistre craquement de plancher. Ca fait du bruit, un type d’un mètre quatre-vingt cinq qui atterrit sur les fesses, et Michael se pose deux doigts sur les tempes, gêné par le fracas. Il entend une respiration laborieuse près de lui et se souvient pourquoi ils sont là. Il n’espérait pas un accueil enthousiaste, mais il ne pensait tout de même pas que... Sa main glisse le long du mur à la recherche de l’interrupteur et il allume la lumière. Plisse un peu les yeux dans la clarté soudaine, et se trouve face à Sara Tancredi à moitié endormie et complètement affolée, armée d’une batte de base-ball - arme anti-cambrioleurs classique s’il en est. Il essaye de la ceinturer, elle essaye de lui échapper. Dans sa panique, elle ne les a pas reconnus. Ou peut-être les a-t-elle reconnus, justement. Il rate son coup d’une bonne dizaine de centimètres et la batte, échappant un peu au contrôle de sa propriétaire, part de nouveau en direction de Lincoln, qui a tout juste le temps de baisser la tête.
« Putain de bordel de merde ! » laisse échapper celui-ci, et Michael pense que, vraiment, ce n’est pas une façon de parler en présence d’une dame. Ce n’est pas comme ça qu’il a été élevé. « Doc’...
- Lincoln ?
- Sara...
- Michael ? »
Impeccable, tout le monde se souvient des prénoms d’autrui. Quand il disait qu’il avait tout planifié...
« Michael ? » répète Sara. Elle l’a reconnu à présent, mais elle n’abaisse pas la batte. Au contraire, elle aurait tendance à... OK, ça il ne l’avait pas planifié. Puis elle voit Lincoln qui ne bouge pas, toujours assis par terre, et elle revient à des sentiments plus humains. « Lincoln, vous allez bien ? »
Elle lui tend la main pour l’aider à se relever et il la saisit sans trop d’hésitation. Michael se renfrogne : il trouve de même un peu agaçant que ce soit lui qui élabore le plan et qu’elle s’inquiète pour son frère.
Pendant environ deux secondes, ils restent sans bouger à s’observer. Puis Sara, sans lâcher sa batte, note-t-il, se dirige vers les fenêtres et tire vivement les rideaux. Ce qui est certainement un bon signe. Lorsqu’elle fait volte-face, il a avancé jusqu’à elle et il la prend dans ses bras. Il pose le menton au creux de son épaule et il la serre contre lui, un tout petit peu plus fort et un tout petit peu plus longtemps qu’il n’est strictement nécessaire, et il glisse le bout des doigts de sa main droite dans la pointe de ses cheveux. Mais ça reste subtil, il ne pense pas qu’elle puisse juger le mouvement sujet à caution.
« Vous sentez bon, » laisse-t-il tomber. Bon, ça, c’est peut-être sujet à caution.
Elle se dégage de son étreinte et le détaille d’un oeil d’entomologiste.
« On ne peut pas en dire autant de vous, riposte-t-elle avant de se tourner vers Lincoln. Il est... ivre ?
- Un peu, reconnaît Linc. Passablement, même. »
Il n’apprécie pas trop qu’ils parlent de lui comme s’il n’était pas là, mais il décide passer outre car il est venu dans un but précis, une de ses raisons étant...
« Je suis désolé, Sara, je suis vraiment désolé. Il faut me croire, ce que je vous ai dit au téléphone... »
Il tend la main vers elle et, après une hésitation, elle lui donne la sienne et abaisse la batte. Elle le gratifie même d’un sourire et il lui presse fiévreusement les doigts.
« Quelque chose me dit que vous serez encore plus désolé demain matin, dit-elle sur un ton doucereux.
- Je suis un peu plus désolé à chaque instant qui passe, » répond-il avec un certain emportement.
Elle les regarde, lui qui la fixe gravement et Linc qui se masse le bas du dos avec une grimace (Linc ne sait vraiment pas se tenir, songe-t-il) Elle semble décider de prendre sur elle-même pour ne plus les agresser à coups de batte ce soir et il se demande si Linc avait un plan et si le faire boire en faisait partie. Parce que Sara semble encline à ne pas exploser tant qu’il est dans cet état un peu second. Avec un petit soupir résigné, sans un mot, elle leur désigne le sofa et disparaît dans la cuisine. Michael s’assoit sur le canapé en se souvenant de ce qui lui a dit ce salopard de Bellick. Mais tout est propre, nettoyé, et le verre posé sur la table n’a contenu que du jus de fruit. Il aimerait pouvoir effacer aussi facilement de sa mémoire ce qu’il lui a fait.
Elle revient de la cuisine en portant un plateau chargé de tasses de café, qu’elle pose sur la table basse. Michael l’observe avec une admiration frôlant la vénération. Elle est vraiment ravissante...
« Vous n’avez pas à faire ça, Doc’, commence Lincoln.
- Je suis toujours médecin, lui rappelle-t-elle, je dois toujours assistance aux malades. Même si récemment, j’ai été un médecin camé jusqu’aux yeux. Ceci étant dit, s’il dégobille, c’est vous qui nettoierez. » Il y a une petite cuvette sur la plateau, qu’elle pose avec soin près de lui.
... et tellement gentille et douce. Elle s’assoit dans un fauteuil en face du sofa et il peut l’étudier tout à loisir tandis qu’elle sert le café. Elle est plus pâle qu’à Fox River, sa peau laiteuse tranchant plus vivement avec ses cheveux auburn, mais elle porte un pyjama rose qui lui ravive le teint...
« Donnez-lui des aspirines avec son café, » dit-elle à Linc.
... une sorte de veste en forme de cache-coeur et un pantalon avec des petits nounours imprimés. Il doit reconnaître qu’en un ou deux occasions, il s’est laissé aller à imaginer ce qu’elle pouvait porter - ou ne pas porter, d’ailleurs - pour dormir et il n'envisageait pas un pyjama rose avec des nounours. Mais ce n’en est pas moins charmant. Elle n’en est pas moins charmante.
« Eh, Michael ! » Le coup de coude - encore - de Linc manque de lui faire renverser sa tasse de café. « On peut se passer de ce genre de commentaires. »
Oh ? Il a dit ça à voix haute ?
Il n’y a pas de sucre dans son café, et il grimace.
« Non, fait Sara, et estimez vous heureux que ce ne soit pas un café salé. Buvez, maintenant. »
Il s’exécute docilement, avale le café, les aspirines, descend les deux grands verres d’eau qu’elle lui sert en lui rappelant qu’il a besoin de se réhydrater.
Puis il tombe contre le dossier du canapé dans un sommeil comateux.
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14 septembre 2006