Titre : rire sous la pluie
Fandom : originale
Personnages : Makram et Zohar
Note : appartient à l’univers DeXorCier, mais peut se lire tout seul.
Il pleuvait sur Paris depuis des jours déjà, les pavés inondés d’eau se révélaient glissants sous les pas et si on levait le nez, les pigeons riaient de vous. La bise sifflait partout et les deux enfants avaient du mal à partager le parapluie, d’un rouge vif. C’était un déséquilibre perpétuel entre les flaques gigantesques, et Makram ne pensait qu’à courir. La pluie avait cette particularité d’aviver certaines odeurs, et il avait encore du mal à taire ses instincts.
Zohar voulait marcher lentement, à cause du vent, à des flaques, des rumeurs sur les renards japonais arrivés récemment dans le quartier et dont les petits jouaient parfois des tours par temps de pluie et de brouillard. L’aînée l’avait eu une fois et elle s’était jurée qu’on ne l’y reprendrait plus. De plus, elle tenait des livres de sa main libre : si jamais elle les laissait tomber par mégarde ?
La petite fille n’avait pas besoin de le dire à son ami d’enfance, il voyait bien les mains transies de froid mais ferme, la crispation anxieuse sur le visage. Tout autant qu’elle remarquât ses efforts pour retenir l’élan de ses jambes et ses fréquents mouvements de tête, la façon dont il se courbait, comme pour mieux se retenir. Ils se calaient l'un contre l'autre quand finalement une bourrasque de trop manqua de les faire basculer. Avec la main sombre qui empoigna solidement le parapluie, Zohar remarqua aussi nettement le grondement à peine étouffé de son ami.
Par réflexe, comme lorsqu’ils étaient encore petits, elle grogna à son tour, ce qui fit rire Makram pendant qu’ils tournaient sur la droite en longeant les différentes boutiques de la rue. L’enfant grogna encore, plus fort et Zohar peina à l’égaler.
« Tricheur. » dit la petite eurasienne en souriant pendant que Makram lui tirait la langue, avant de sourire à son tour. Puis, il se transforma lentement devant elle. Les ongles devinrent des griffes, le nez un museau, des poils poussèrent et les oreilles décollées se dressèrent, s’attirant un regard dégouté d’un passant sans qu’aucun des deux ne le remarquèrent. Makram regardait uniquement son amie, les yeux plus dorés que bruns et un sourire de crocs illuminant son visage. La petite fille en rouge fronça les sourcils après un temps de silence surpris.
« Mais tu fais quoi ?
- On est trop sous le parapluie, je te laisse la place.
- Tu risques d’attraper froid !
- J’ai ma fourrure. » répondit l’enfant-loup d’une voix maintenant rauque, avant d’installer son sac dans sa gueule. Il partit ensuite, sautant de flaque en flaque avec joie, sans la laisser toute seule, l’attendant ou la rejoignant pour tourner autour d’elle. Zohar riait en oubliant le mauvais temps, le poids des livres et des soucis. Makram aussi riait, en aboyant énergiquement, sans agressivité, ignorant le regard noir des passants et de quelques camarades de classe qui changeaient de trottoir. Ils avaient l’un et l’autre, qu’importait le reste ?