Auteur : Berylia
Titre : Promenade
Type : Originale
Rating : NC-17
Nombre de mots : 14000
Résumé : Lance n'est pas beaucoup de choses. Il n'est pas nerd même s'il bosse dans le jeu-vidéo, il n'est pas gay même s'il prend soin de sa peau, et il n'est pas attiré par Steve Perfection Laverty même s'il est en train de l'embrasser.
Notes : Physique et autres désagréments était à la base une simple fic spin-off de l'Ombre du dragon, mais peu à peu ça a grandi jusqu'à devenir une véritable histoire qui promet de me faire suer longtemps.
Pour pimenter les choses j'ai décidé de me faire une grille de bingo kink que je remplirai au fur et à mesure des différents chapitres.
Kink : n°50 Public Display of affection et n°37 Kissing/necking
Dans les épisodes précédents de Physique et autres désagréments :
Au nom de cette relation sérieuse Lance a passé bien des épreuves : il a rencontré l’Ex de Steve qui lui en veut d’avoir fait capoter leur mariage, eu la chance de présenter son désastre de mère à son petit ami et maintenant venait une épreuve de plus… Joie !
Le soleil brillait, les oiseaux chantaient et Lance avait clairement le sentiment de monter une à une les marches vers l’échafaud. Il repoussa malgré tout une mèche derrière son oreille et sourit. Un sourire avec juste une dent adorablement manquante lui répondit alors que Diana mettait sa veste.
C’était une mauvaise idée. Une très mauvaise idée. Et il s’y connaissait en mauvaises idées. Il était à peu près sûr qu’il y avait un gène des mauvaises idées quelque part dans son patrimoine génétique, généreusement légué par sa mère en même temps qu’une chevelure abondante et une peau parfaite. A bien y réfléchir, son père aussi y avait contribué, parce qu’une gamine de 18 ans quand on en avait bien quarante et qu’on était marié… Bref, il savait parfaitement qu’il allait au devant d’une énorme bêtise.
Mais en attendant il était là, immobile, habillé, attendant que son monde continue de s’écrouler au fur et à mesure.
- William tu as ton sweat ? Diana tu as pris la liste des courses ?
Il baissa la tête et regarda les enfants parfaits parfaitement mis dans leurs vêtements impeccablement coupés qui prêtaient autant d’attention aux propos de leur père qu’un nerd à une conférence de Joss Whedon.
- Vous avez pris vos mouchoirs ?
- Oui papa.
Bien sûr les petits anges avaient répondu en cœur de leur voix flutées et douces et se dirigeaient maintenant vers la porte en marchant alors que toute autre marmaille aurait déjà foncé et ouvert la porte de l’appartement à la volée.
- On y va ?
Il offrit à Steve le sourire le plus faux qu’il avait en rayon. Et prit sa respiration comme un soldat conduit à son exécution.
- Bien sûr.
Un week-end entier avec les enfants, oh joie !
Un baiser se posa sur sa joue avec une odeur d’after-shave hors de prix et de cigarette.
- Tout se passera bien.
Il battit des cils et sourit.
- Avec moi, comment pourrait-il en être autrement…
Steve sourit et lui mit une discrète claque aux fesses avant de lui faire passer la porte pour rejoindre les enfants dans le couloir où ils attendaient sans même avoir été appuyer frénétiquement sur le bouton de l’ascenseur et franchement quels mômes n’appuyaient pas sur le bouton de l’ascenseur dès qu’ils en avaient l’occasion ? Les enfants parfaits bien sûr.
Diana regardait la liste de courses et William passait la main dans ses cheveux en essayant de faire tenir sa mèche.
- William, tu vas appeler l’ascenseur ?
Le bambin s’exécuta sans même courir alors que Steve rangeait ses clefs et que Diana mettait la précieuse liste dans sa poche.
Il sourit et prit le bras de son petit ami pour gravir ce chemin de croix qui avait commencé lorsqu’il avait stupidement accepté de passer du temps avec les enfants. Il préférait dire les enfants parce qu’au moins comme ça il ne risquait pas de faire de bévue ou d’avoir un lapsus devant Steve, et puis bon les monstres était un surnom déjà attribué aux gosses d’Arthur, dit la plupart du temps en ébouriffant leurs cheveux après leur avoir pété les dents à Street Fighter 2’. Parce que bon, quel nul se laissait fiche une branlée par un gosse aux jeux-vidéos ?
Bref il était bon pour passer le week-end avec les mômes et franchement qu’est-ce qui lui était passé par la tête quand il avait accepté ? Heureusement que demain ils emmenaient les enfants à l’anniversaire d’un des monstres parce que sinon… Mais pour l’heure ils étaient partis acheter un cadeau et les ingrédients pour faire un gâteau et Steve avait laissé entendre qu’ils prendraient sûrement un sandwich ou une salade à emporter pour manger dans le parc pendant que William et Diana joueraient paisiblement.
Oui, comme si surveiller des gosses dans une grande ville pleine de dangers potentiels pour eux pouvait être paisible ! Non parce que rien ne devait arriver aux enfants parfaits sans quoi il était à peu près sûr que ça lui retomberait sur le coin de la trombine et ça c’était juste non…
Ouais, il aurait presque mieux fait d’aller passer le week-end avec sa mère… En fait non parce qu’il avait déjà fait ça le week-end dernier en se rendant au vernissage et bon, il avait assez souffert pour s’offrir bonne conscience jusqu’à au moins Thanksgiving.
La porte de l’ascenseur se rouvrit sur un hall remplit de la lumière splendide du dehors alors que les enfants saluaient Vince le concierge et lui racontaient avec bonheur comment ils allaient passer une merveilleuse journée dehors avec leur papa et son amoureux.
- Bonjour monsieur Laverty.
- Bonjour, Vince. Si les livreurs devaient arriver avant nous est-ce que vous pourrez vous occuper des courses ?
- Bien sûr, monsieur Laverty.
Le sourire du concierge était sincère. Parce que bien sûr Steve avait un concierge sympa, serviable et honnête et qui, si il avait un casier (ce qui au vu de ses mains, de sa gueule, de son accent et des tatouages qui dépassaient du col de sa chemise au col en pointe était fort possible) il était forcément repenti et décidé à faire le bien parce que c’était le genre de choses qui arrivait autour de Monsieur Parfait. Et pendant ce temps son concierge à lui était un rat qui mettait des mois avant d’aller contrôler qu’il y avait bien une fuite. Bien sûr ça ne l’empêchait pas d’avoir le concierge dans sa poche parce que seul un idiot ne se mettait pas en bons termes avec l’homme qui devait veiller à l’entretien des canalisations. Mais quand même c’était injuste.
- A tout à l’heure Vince. Les enfants, dites au revoir à Vince.
- Au revoir Vince, dirent-ils, toutes fossettes dehors, tellement parfaits qu’ils semblaient sortir droit d’un plateau d’Hollywood.
- Amusez-vous bien.
Lance baissa ses lunettes de soleil sur son nez et sorti dans la lumière aveuglante qui faisait briller les cheveux blonds des petits.
Il était à peine dix heures et on était samedi. C’était criminel d’être levé si tôt.
- Lance, je peux prendre ta main pour traverser ?
Il ne manquerait plus qu’un cheveu sur la langue pour que ce soit le petit garçon le plus adorable du monde.
- Bien sûr, William.
Forcément pour prendre la main du petit il devait lâcher celle de leur père mais après tout c’était normal, c’était ce que faisaient les gosses, se mettre entre les adultes, plus exactement, se mettre entre leur père et lui. Comme ils l’avaient fait ce matin.
Parce que bien sûr il avait passé la nuit chez Steve. Ce dernier avait insisté avec le parfait raisonnement : « On passe le week-end ensemble, tu as des affaires à la maison, viens directement après le boulot. Tu m’as manqué. » Ils s’étaient vus dans la semaine, Steve était venu le chercher pour manger un bout mardi midi avec les enfants, oh moment de joie extrême, et ils avaient fait une soirée pizza et Mario jeudi, mais il n’avait pas passé la nuit. Parce que…
Parce que quand il était avec Steve il finissait toujours par avoir envie de l’emmener au lit et de le faire haleter et grogner et gémir et crier et de le serrer contre lui jusqu’à ce qu’il soit la seule chose qu’il sente, qu’il touche, qu’il respire, qu’il entende, qu’il goûte. Bref, quand il était avec Steve ça finissait toujours par du sexe.
Et il y avait les enfants.
Et les enfants voulait dire pas de sexe.
Sauf que Steve l’avait invité.
A passer la nuit.
Et le week-end.
Dans son lit.
Bon okay, ça ç’avait été une extrapolation, parce que Steve avait une chambre d’amis en plus des chambres de ses enfants. Mais il avait eu raison, parce qu’il avait dormi dans le lit de son… de Steve. Et ça avait été clairement gênant au moment de coucher les enfants. Heureusement qu’il avait la vaisselle pour s’occuper pendant que le meilleur père du monde leur lisait une histoire et les bordait.
Puis il y avait eu ce moment étrangement tranquille et habituel où ils s’étaient installés sur le canapé et avaient parlé de leur journée, s’interrompant souvent pour s’embrasser au milieu du calme. Ensuite ils avaient été se coucher et là c’était devenu bizarre, non seulement le fait de porter un pyjama mais aussi l’étrange silence qui planait au-dessus d’eux alors qu’ils se pelotaient sous les draps comme deux adolescents en étouffant leurs cris.
Mais le pire était venu ce matin. Quand Diana était venue réveiller son père en lui disant qu’il était huit heures et qu’ils avaient beaucoup à faire. Autant dire que la gaule du matin était vite redescendue et qu’il avait haï et maudit sa vie en plusieurs langues parce que merde, le week-end c’était pour faire la grasse mat et la grasse mat c’était juste un autre nom pour faire du sexe…
Mais non, au lieu de ça il avait dû enfouir sa tête sous l’oreiller en tentant de ne pas paniquer quant au fait que les enfants l’avaient trouvé au lit avec leur père et qu’ils étaient sûrement bons pour des années de thérapie à cause de ça même s’ils étaient tous les deux habillés et clairement pas en train de faire des galipettes vu comment ils avaient tous deux été béatement en train de dormir avant mais quand même il y avait une différence entre le fait que des gosses sachent que leur père était avec un homme et le fait de… et bien le savoir.
Mais il avait bien sûr joué le jeu, il s’était levé, avait eu droit à un trop court et trop chaste baiser qui n’aurait clairement pas dû être capable de faire frissonner sa peau comme ça, et il avait été s’occuper de la cuisine parce que tant qu’à avoir les enfants, autant leur faire un petit-déj dont ils vanteraient les mérites à leur mère et dont ils parleraient pendant longtemps. Oui il était abject et oui il avait pris des cours de cuisine (sur internet, fallait pas déconner) en vue de ce jour. Et encore ce n’était rien comparé à demain, il leur ferait de la brioche maison et du pain perdu.
- Pourquoi on ne va pas au super-hyper-marché géant ? demanda Diana accrochée à la main de son père alors qu’ils arrivaient sur le trottoir d’en face.
- Parce qu’il est loin d’ici.
Et que Père Parfait préférait le magasin d’alimentation bio-ethnique-équitable-bohème se trouvant au coin de la rue dans le quartier chic-branché-mais-familial où il habitait.
Celui situé entre un fleuriste et une librairie (et franchement qui achetait encore des livres en librairie ?) et dont on voyait les étals colorés à travers les hautes vitres. Celui qui faisait aussi traiteur rapide mais bio et fait maison le midi à manger sur place grâce aux quelques tables dehors ou à emporter et qui était fréquenté par tous les bobos et tous les hipsters du coin. Et à l’entrée duquel il y avait mille et une petites annonces pour des cours de yoga, du covoiturage, du dog-sitting au milieu des traditionnels posters pour animaux fugueurs. Un lieu de convivialité et de partage disait le petit article sur la boutique qui avait été découpé et encadré à l’entrée.
- Bonjour et bienvenue.
La caissière releva la tête et leur sourit, le magasin sentait la tarte aux pommes et la cannelle et le soleil entrait à flot par les grandes vitres, les quelques clients étaient beaux, jeunes et dynamiques et depuis quand était-il dans une série télé ?
- Tu nous aideras à faire le gâteau, Lance ?
Il prit le panier que lui tendait Steve tout en baissant les yeux vers William qui lui tenait toujours la main.
- Bien sûr. C’est un gâteau à quoi ?
- Une marquise au chocolat et à la pulpe et coulis de fraise, déclara Diana, sa liste de course à la main.
Bien sûr parce qu’un gâteau au chocolat tout simple ça ne pouvait pas suffire. Enfin… Il jeta un coup d’œil aux ingrédients, ça semblait être un gâteau tout simple en fait, juste avec un nom délicat et racé. Sauf si pastrami et fromage bleu entraient dans la composition du gâteau…
- Est-ce qu’on pourra écrire « Joyeux Anniversaire » sur le gâteau ? demanda William.
- Il faudrait une poche à douille et de quoi faire de la crème au beurre.
- Mais c’est possible ?
Cette fois-ci c’était Diana qui avait posé la question, lâchant la main de son père pour se rapprocher.
- Bien sûr.
Et maintenant qu’il avait dit ça il avait intérêt à assurer en écrivant sur le gâteau parce qu’ils le regardaient tous deux comme s’il leur avait promis le Saint Graal or le Saint Graal c’était vraiment pas son rayon.
- C’est super ! Hein, papa ?
La petite fille se raccrocha à la main de son père avec entrain.
- Super.
Il avait un sourire adorable quand il était avec ses mômes, ce qui était normal et il pourrait facilement faire vendre des catalogues de vêtements pour enfant là tout de suite et…
Il releva la tête et ne changea pas d’expression en le regardant et il sentit son cœur commencer à s’affoler et son souffle se coincer...
- Allons chercher du chocolat ! déclara-t-il en tournant les talons avec prudence et détermination, emportant William dans son sillage jusqu’à ce qu’il puisse se cacher derrière une étagère au moins le temps de reprendre sa respiration.
Il ne ferma pas les yeux mais prit plusieurs inspirations lentes alors qu’il laissait William regarder les différentes variétés de chocolats.
- Non, Rosalind !
Sa main réagit avant même qu’il ne comprenne réellement la situation, se tendant pour rattraper les paquets de bonbons avant qu’ils ne tombent sur la tête de William.
- Oh, mon Dieu, est-ce que ça va ? Je suis désolée, tellement désolée, parfois elle fait des mouvements brusques et… ça va ?
Il cligna des yeux et releva le regard, regardant la jeune maman avec son bébé soutenu par un harnais contre sa poitrine qui le regardait un peu affolée.
Il replaça les paquets de friandises avec les autres.
- Ya pas de mal.
Il baissa les yeux sur le petit garçon qui avait réussi à être en danger à peu près cinq secondes après qu’il se soit éloigné de son père et qu’est-ce que ça présageait pour le futur de ce week-end ?
- Hein, William ?
- Non. C’était génial, tu les as rattrapés tous les deux d’une main, comme un maître d’arts martiaux.
Okay, au moins il avait réussit à ne pas trauma le gamin, qui le regardait maintenant comme s’il était le vieux maître Mr. Miyagi.
- Je suis vraiment désolée ! reprit jeune maman totalement débordée par son premier enfant au vu de ses cernes et de ses cheveux qui échappaient à sa coiffure et de la panique qu’un incident aussi mineur causait chez elle.
- Pas grave.
Il lui sourit en reprenant la main de William et en l’éloignant juste un peu du danger public.
- Bon, alors, William, quel chocolat prend-on ?
- Je ne sais pas, il n’y a pas celui que prend toujours maman et la recette dit juste 200 grammes de chocolat noir pâtissier mais il y en a beaucoup là.
Il sourit au froncement de sourcils de concentration extrême du môme. Heureusement qu’il allait aller dans une école super select parce que son père était blindé de thunes et très très concerné parce qu’il était trop sérieux et trop intelligent pour son âge.
Il s’accroupit au niveau de l’enfant.
- Je ne connais aucune de ces marques non plus et…
Il jeta un coup d’œil aux ingrédients et à la provenance : commerce équitable blabla, bio, teneur en chocolat, pas de graisses ajoutées…
- Ils sont tous à peu près pareils donc…
Il en plaça quatre dans ses mains.
- Tu vas choisir celui qui te plait le plus au nom ou à l’aspect.
William était plus concentré que s’il devait choisir une couleur pour son jeu de Pokémon.
- Qu’est-ce que vous faites ?
Diana était à leur hauteur.
- William est en train de choisir le chocolat.
L’explication suffit à la petite fille qui retourna s’accrocher à la main de son père.
- Celui-là, décida la tête blonde avec fermeté en montrant le chocolat à l’emballage sobre et classique.
- Alors c’est celui-là que nous prendrons, déclara-t-il en se relevant et en rangeant ceux qui n’avaient pas été retenus.
Il laissa William poser précieusement le chocolat au fond du panier avant de relever les yeux sur Steve qui souriait amusé.
- Tu as besoin qu’on achète quelque chose ?
- Pour demain matin j’ai amené toutes les provisions hier.
Et n’avait-il pas eu l’air idiot avec ses énormes sacs en papier dans les mains hier en arrivant chez Steve depuis le boulot…
- Par contre si tu veux je pourrais préparer de la pâte à pancakes dimanche soir et lundi matin tu n’auras plus qu’à en faire… Il faut juste acheter plus d’œufs, de lait et de farine…
Il jeta un coup d’œil au rayonnage sur la gauche, il lui semblait avoir vu les farines…
- Tu as quelque chose à faire dimanche soir ?
Il tourna la tête, surpris alors qu’il mettait la main sur la farine avec levure sans phosphates.
- Non, répondit-il sans même y réfléchir.
La paume brûlante de Steve se posa contre sa main et il sentit une onde de chaleur le traverser alors que ce dernier lui prenait le paquet.
- Reste dimanche soir.
Il avait rapproché son visage du sien et ce n’était clairement pas la première fois qu’ils étaient presque nez contre nez, ce n’était pas la chose la plus scandaleuse qu’ils aient fait en public et de loin, mais il se sentait virer rouge pivoine en sentant ce souffle contre ses lèvres, cette voix douce, intime, le parfum envoutant de sa peau mélangé à son after-shave.
- Il y a encore deux costumes à toi dans le dressing, reste dimanche soir…
- Tu veux juste ne pas avoir à cuire les pancakes lundi.
- Tu me connais si bien, répondit son amant avant de déposer un chaste et bien trop court baiser sur ses lèvres.
Lorsqu’il rouvrit les yeux qu’il n’avait pourtant pas fermés, Lance vit jeune maman stressée qui lui souriait de ce sourire niais que beaucoup réservaient aux chatons, et aux jeunes enfants.
- Combien d’œufs te faut-il, Lance ?
Il se retourna vers Steve, ses enfants encore et toujours sagement autour de lui, le soleil se reflétant sur un miroir de sécurité venant éclairer ses cheveux d’un halo.
- Quatre. Juste quatre.
Il avait la voix étrangement enrouée et beaucoup trop chaud mais c’était parce que le magasin n’avait pas la clim parce que c’était anti-écologique et bla et bla.
- Vous avez entendu ?
- Je sais où sont les œufs ! affirma Diana avec autant de sérieux que si elle avait retrouvé le véritable site de l’Atlantis.
- Alors guide-nous.
La petite partit, suivit de son frère et Steve lui tendit la main.
C’était comme s’il sentait sur eux le poids de regards absents alors qu’il glissait sa main dans la sienne, le poids de ce geste en public, alors que la jeune génération Laverty ouvrait la marche devant eux.
xxx
Il passa le bras autour de la taille de Lance et le sentit tout à la fois se raidir, frissonner et s’alanguir contre lui. Puis lui jeter un regard en même temps mécontent et heureux.
Devant eux la queue des caisses de l’énorme magasin de jouets n’avançait pas et il n’osait pas même imaginer ce que ce devait être au moment de Noël. Il se pencha vers l’oreille de son petit ami, jetant un coup d’œil à William toujours sagement accroché à la main de Lance.
- Ça va ?
- La bonne femme avec l’immonde robe à pois verts est à deux doigts de lâcher son bébé et de nous condamner à l’enfer en pointant un doigt inquisiteur sur nous.
Il secoua la tête, laissant ses lèvres caresser le velours de l’oreille de l’américain.
- Qu’elle essaie…
Le regard qu’il lui lança était brûlant.
- Arrête, souffla-t-il.
Il n’y avait pas à dire, il aimait le mettre mal à l’aise, le pousser toujours juste un peu plus loin, à la recherche du moment où il craquerait, où il en aurait marre, où il le laisserait…
- Une honte ! Il y a des enfants ! siffla une matrone, ce qui fit agiter vivement du chef la mère à pois verts.
Il se redressa, le bras toujours autour de la taille de Lance et rapprocha Diana de lui avant de jeter un regard glacial sur la vieille.
Elle détourna les yeux, incapable de faire face.
C’était tant mieux parce qu’il n’avait pas envie d’un scandale devant les enfants. Il caressa les cheveux de Diana et jeta un coup d’œil à William. Son fils était plaqué contre la jambe de Lance et ce dernier lui ébouriffait les cheveux doucement.
Il détourna les yeux.
Il avait eu une longue conversation avec ses enfants. Il savait qu’ils allaient souffrir et sûrement garder des séquelles : la séparation de leurs parents, l’homosexualité de leur père… Mais il ne pouvait, ne voulait pas le leur cacher. Alors il leur avait expliqué. Il les avait assis dans le tout nouveau salon de son appartement et il leur avait dit qu’un jour il retomberait probablement amoureux, et que cette personne serait sûrement un homme.
Il avait répondu à leurs questions, les avait assuré plusieurs fois que quoi qu’il arrive il les aimerait toujours et qu’ils seraient toujours ses enfants.
Et puis il avait fallu leur expliquer le plus dur.
Pour l’instant il n’y avait eu aucun incident, ni dans le voisinage ni à l’école où les professeurs étaient très attentifs à l’environnement des enfants. Mais il savait que ça arriverait un jour.
Il fixa à nouveau la matrone mais elle était en train de payer.
Un jour ça arriverait.
Il préférait que Lance n’y assiste pas.
Pas seulement parce qu’il ne saurait pas gérer les enfants, mais aussi parce qu’il savait que trop de responsabilités le feraient fuir.
Il était déjà étonné de son attitude et de son calme.
La queue avança et il regarda son petit ami pousser délicatement William vers l’avant, une main doucement appuyée au centre de son dos alors que le petit garçon lui vantait les incroyables mérites du Combotronique 20022. Et Lance écoutait, ou faisait parfaitement semblant, et William continuait, emballé, souriant, sautillant presque sur place.
Il n’avait aucune idée de si ces sourires et ce corps détendu étaient sincères ou n’était qu’un rôle que son amant endossait, mais il ne pouvait pas non plus lui demander d’aimer ses enfants, de s’attacher à eux alors qu’à un moment ou un autre il prendrait peur et les laisserait…
Même si ce n’était qu’un rôle, il voulait se laisser prendre au jeu, il aimait le voir tenir la main de William, sourire à Diana qui tenait aussi à participer à la conversation, s’immiscer dans la partie la plus importante de sa vie. Puisqu’il avait décidé de partager un moment de sa vie avec lui il était heureux d’au moins partager aussi ça.
Il déposa un baiser sur sa tempe et Lance leva vers lui des yeux surpris.
- Je suis content que tu sois là.
Un grand sourire orna les lèvres douces et parfaitement hydratées.
- Je suis content d’être là.
Quelle importance que ce soit faux, il avait tellement envie d’y croire. Il resserra son étreinte sur sa taille et sourit, c’était enfin à eux de payer.
- Je veux emballer le cadeau, papa !
- Oui, maman dit que c’est plus personnel quand on emballe le cadeau.
- Est-ce qu’on pourra l’emballer nous, dit papa ?
- Dis oui s’il te plait…
- Tu sais faire des papiers cadeaux, Lance ?
- Tu sais faire ceux avec la triple pliure ?
- Maman elle sait les faire et c’est super joli.
Il laissa ses enfants saouler de paroles son petit ami et paya sous le regard morne de la vendeuse dont les cernes criaient qu’elle regrettait amèrement son lit. Il reprit le jouet et souhaita une bonne journée à l’employée.
- Allez en route, vous emballerez le cadeau à la maison mais pour l’heure nous allons déjeuner au parc.
Les enfants acquiescèrent avec bonheur.
- C’es mon tour de prendre la main à Steve ! annonça Diana.
- On dit la main de Steve, Diana.
- La main de Steve, répéta la petite fille.
- Allez William, viens prendre ma main.
Son fils obéit mais il fallait croire que sa main n’était pas à la hauteur de celle de l’américain car son fils regardait avec regret derrière lui. Diana elle se jeta sur lui et commença à lui parler du poney en peluche qu’elle avait vu dans la vitrine.
- Ça va, William ?
- Oui papa, répondit-il d’un sourire édenté.
Il ébouriffa ses cheveux avant de reprendre sa main et la route.
Lance marchait devant, Diana insistant pour le guider jusqu’au parc
- Je sais exactement où il est. Papa et nous on y va souvent. Il ya des canards et des cygnes et on peut donner à manger aux canards mais pas aux cygnes parce que papa dit que c’est méchant un cygne. C’est vrai ? Tu as déjà été mordu par un cygne ? Ça a des dents ?
Lance répondit que non aux deux questions.
- Mais il n’y a pas de paons dans le parc. Tu as déjà vu des paons vivants ? Parce qu’à l’école ils en ont jamais vu en vrai. Quand ça crie on dirait que ça dit « Léon Léon ! ». T’as déjà entendu des paons qui crient ?
Lance répondit que oui et visiblement c’était la bonne réponse parce que Diana lui sourit.
- Moi aussi. Parce que dans le parc chez grand-père il y a des paons et même que je peux leur donner à manger parce que maintenant je suis assez grande. Et Mrs T a dit que quand je viendrais elle me ferait essayer les chapeaux de mamie avec les plumes de paon dessus !
Il admira la capacité de sa fille à parler aussi longtemps sans reprendre son souffle. Il admira aussi la capacité de Lance à lui donner la réplique, la faisant parler des montagnes de cartons à chapeau et des énormes armoires qu’elle n’avait pas le droit d’ouvrir mais que parfois Mrs T ouvrait pour lui montrer quelques trésors quand elle avait été sage.
- Cet été on va passer un mois chez grand-père et papa a dit que je pourrai continuer à faire du poney. Tu sais monter à cheval, Lance ?
- Pas du tout.
- Moi oui, j’ai déjà monté plusieurs poneys et mon préféré c’est…
- Moi aussi je sais monter à cheval ! intervint William.
- Tu veux aller prendre la main de Lance, William ?
- Oui papa !
Il laissa son fils le quitter pour s’accrocher à Lance et rentrer en compétition avec sa sœur pour l’attention de son petit ami.
Il regarda le sourire doux de l’américain tout en avançant et en surveillant le chemin car Diana était bien trop occupée à parler pour prêter véritablement attention aux rues.
Il amenait les enfants en Angleterre au début du mois d’août, il resterait une semaine puis repartirait, les laissant avec leur grand-père. Il fallait qu’il en parle à Lance. Pas seulement pour lui dire qu’il ne serait pas là, non ; parce qu’il voulait qu’il l’accompagne. Pas tout le séjour parce que père… bref, mais il voulait qu’il vienne au moins passer quelques jours en Angleterre avec lui.
C’était beaucoup demander, c’était le forcer à voyager et surtout à rencontrer son père ce qui ne s’était jamais bien passé à bien y réfléchir. Il se rappelait encore le regard rapide et condescendant qu’il avait jeté sur Bettany… Bref, il n’avait aucun véritable argument pour convaincre Lance de venir passer quelques jours au manoir. Ce qui expliquait peut-être pourquoi il ne lui en avait toujours pas parlé…
Mais s’il ne le faisait pas il finirait par se faire doubler par ses enfants qui l’abreuvaient visiblement d’informations sur la maison de grand-père et les voitures de grand-père et le bruit de sa canne quand il marchait dans la maison et le fait qu’il avait l’air méchant mais qu’en fait il était gentil et…
- Les enfants, le parc est sur la droite.
Diana tourna la tête d’un seul coup.
- Je le savais ! indiqua-t-elle en boudant juste légèrement.
- Moi je me serais sans doute perdu sans Steve et toi, Diana.
Voilà qui fit revenir le sourire sur le visage de la petite.
La journée était belle et ensoleillée, le parc vert et lumineux.
- On va vers le lac papa !
- Non, l’aire de jeux !
Ils tenaient toujours la main de Lance mais se tournaient à présent vers lui, leurs yeux implorants.
- On va s’installer pour manger près du lac et ensuite on ira à l’aire de jeux.
- Je te montrerai les canards, il y en a un il a des plumes blanches en plein milieu de son dos et il y en a un autre il est orange !
- Et des fois ils viennent pour demander du pain et parfois quand il y a du pain sec à la maison on le garde et ensuite papa nous emmène au parc pour qu’on puisse le donner aux canards.
- Une fois en Angleterre on a donné du pain à des carpes, elles étaient immenses !
- Même qu’elles se battaient pour attraper le pain.
- Et elles se montaient dessus.
- T’as déjà vu des carpes ?
- Et des poisson-chat ?
- Moi je veux voir des poissons volants !
- Moi je veux retourner voir les requins !
Lance n’avait pas encore le tournis mais les enfants continuaient à le noyer sous les questions, les affirmations et les informations tout en l’emmenant vers le lac.
- Je veux m’asseoir là !
- Non, là-bas, on est plus près de l’eau.
- Mais là c’est plus joli !
- Lance, tu veux t’asseoir où ?
Les deux paires d’yeux se tournèrent vers l’américain qui s’arrêta et prit un air très songeur en regardant les deux bancs. Les enfants étaient silencieux, retenant presque leur souffle.
- Là-bas, répondit-il en désignant un banc plus loin. C’est à l’ombre et près du lac et joli.
William et Diana restaient dubitatifs, ce jugement de Salomon ne les satisfaisait visiblement pas. Mais ils se laissèrent quand même entraîner par Lance. Qui les fit asseoir sur le banc avant de lever vers lui des yeux de cocker fier de lui.
Il plaça le sac avec le cadeau dans son giron.
- Je vais chercher à manger, vous restez là ?
Le regard de Lance changea immédiatement, se faisant sérieux et presque effrayé avant que sa main ne se saisisse de son poignet avec la vivacité et la force d’un serpent se jetant sur sa proie.
- On peut venir avec toi !
- Pas la peine.
Il se pencha pour embrasser la joue de Lance et lui glisser :
- Il y a un petit resto italien qui fait de délicieuses salades avec des sandwichs, c’est juste à côté, je serais revenu dans un instant.
Lance sembla partagé entre faire bonne figure et craquer en disant que c’était bien trop de responsabilités.
- Je te fais confiance.
Juste la goutte d’eau qu’il fallait, ça cassait ou ça passait.
Ce n’était pas vraiment un sourire, plus un rictus effrayé, mais les yeux de Lance étaient à nouveaux calmes, pleins d’un désespoir paisible alors qu’il relâchait son poignet.
- On t’attendra ici.
Il se saisit des mains des enfants et tout son corps se tendit comme s’il s’attendait à ce qu’une catastrophe s’abatte sur eux à tout moment.
- Tout se passera bien, Lance, le rassura-t-il en posant une main sur sa joue.
Le regard de l’américain criait qu’il pensait le contraire et qu’il allait d’ici peu devoir faire face à des dangers inimaginables, mais il se contenta de lui mentir :
- Bien sûr.
Il ne se força pas à marcher plus vite que d’habitude, mais il constata qu’il était arrivé bien plus vite que d’habitude chez Francesca, le stress et les tensions étaient après tout contagieux.
Il avait confiance en Lance. Il venait de le laisser avec ses gamins, c’était bien qu’il avait confiance en lui. Mais il devait avouer qu’il ne se sentait pas vraiment confiant là tout de suite. Bien sûr qu’il ne les laisserait pas se blesser ou quoi que ce soit mais est-ce que les enfants seraient à l’aise avec lui sans leur père ? Visiblement Lance lui n’était pas à l’aise et William et Diana le sentiraient sûrement.
Il n’arrivait pas vraiment à savoir ce qui provoquait ce malaise, la responsabilité, la présence des enfants, le fait de devoir les garder et les amuser sans pouvoir à n’importe quel moment les renvoyer à lui ? Un instant il était souriant et paraissait vraiment heureux d’être là et la seconde d’après il était tendu, presque paniqué.
Il passa commande et essaya de ne pas presser la vendeuse en pianotant vigoureusement sur la table. Il essaya.
- Vous pouvez garder la monnaie.
Il ne pressa pas le pas, après tout qu’est-ce qui pouvait arriver en dix minutes ? Il se contenta de marcher un peu rapidement pour revenir au parc, c’était tout.
Il ne paniqua pas du tout pendant les quelques secondes où il se trompa de banc et ne les trouva pas.
Lance était en train de tresser les cheveux de Diana pendant que William et elle discutaient. Pas de cris, pas de larmes, pas de drame. Il se retint de pousser un soupir.
- Papa, Lance n’a jamais vu la relève de la garde !
- Et il n’a jamais mangé de fish and chips, ajouta William.
- Mais j’ai mangé des croissants en haut de la Tour Eiffel donc mon honneur est presque sauf, déclara l’américain en finissant la tresse blonde.
- C’est vrai qu’on peut faire le tour de Paris en bateau ?
- C’est comme les gondoles à Venise ?
- Tu parles français ?
- Moi je sais dire « Bonjour, merci et au revoir. »
- Maman dit que les meilleurs parfums viennent de Paris.
Il déposa le sac contenant le repas sur le banc.
- Si vous alliez vous laver les mains plutôt.
Les enfants obéirent en courant vers le point d’eau juste à côté. Il en profita pour s’asseoir auprès de Lance.
- Tu vois que tout s’est bien passé.
- Ça c’est parce que je les ai défendu contre les extraterrestres qui voulaient les enlever, et ça c’était après l’attaque des zombis carnivores.
- Rien que ça.
- J’ai fait ma part d’héroïsme pour la journée, tu as utilisé ton crédit pour toute la journée, maintenant tu restes avec moi.
Il l’embrassa à nouveau sur la tempe.
- Jene suis même pas parti dix minutes.
- Ouais mais moi j’ai besoin d’y aller progressivement, donc pour aujourd’hui c’était amplement suffisant.
Il avait envie de rebondir sur son lapsus, cette idée qu’il y aurait un lendemain, que petit à petit il accepterait de passer plus de temps avec eux…
- Papa, qu’est-ce que tu as pris à manger ?
- Il y a le sandwich aux avec la mostarella ?
- Mozzarella, William et oui bien sûr, venez vous asseoir.
Il distribua d’abord les demi-portions de salades, les forçant à manger tout y compris les carottes puis leur donna leur mini-sandwich et enfin le muffin qu’il avait pris pour eux en dessert. Le calme et le silence descendirent sur leur coin du parc.
- Papa, il me reste un morceau de pain, je peux le donner aux canards ?
- Moi aussi, moi aussi !
Bien sûr le calme ne durait jamais avec les enfants et il n’osait même pas pensé à ce que ce serait quand ils seraient ados…
Il ne soupira pas mais se laissa juste légèrement aller contre Lance.
- Vous nous laissez finir notre sandwich et ensuite on ira voir les canards en allant vers les jeux, ça vous va ?
- Oui !
Et Diana se mit à tourner sur elle-même et son frère à l’imiter et il ne manquait plus qu’ils vomissent pour rendre cette journée fantastique.
- Si vous continuez à tourner vous allez vomir et si vous vomissez vous n’aurez pas l’estomac assez bien pour le petit déjeuner demain et sûrement pas non plus pour le gâteau d’anniversaire chez Han.
Les mots de Lance les arrêtèrent presque instantanément.
- Il y aura quoi dans le petit déjeuner de demain ?
- Il y aura des saucisses comme chez grand-père ?
- Maman elle nous fait manger des fruits et des céréales pour le petit déjeuner.
- Mrs T elle dit qu’il faut petit déjeuner comme un roi, manger comme un prince et dîner comme un pauvre.
- Si vous continuez à poser des questions Lance ne pourra pas manger et nous n’irons pas voir les canards. William si tu sortais ton livre et que tu lisais un chapitre à Diana.
- Oh oui ! glapit sa fille en battant des mains.
Il tendit Le petit prince à son fils et ébouriffa ses cheveux quand il s’assit à ses côtés. Il le regarda ouvrir le livre et sa voix aigüe commença à lire, Diana l’écoutant avec attention.
Ils finirent de manger, jetèrent du pain au canard et se dirigèrent vers l’aire de jeu retentissant de cris de joie, de pleurs et en général de boucan. Il n’en voulut même pas à Lance quand il le sentit se raidir contre lui lorsque le vent leur en apporta les premiers bruits. Mais la sociabilité était importante et il fallait que William et Diana passent du temps en compagnie d’autres enfants.
Ils s’installèrent sur un banc et les enfants s’élancèrent immédiatement vers le toboggan.
Il avait la main de Lance dans la sienne et l’américain était rigide, tendu comme le câble d’un pont suspendu.
Il caressa ses phalanges du pouce.
- Même s’ils tombent du toboggan je doute qu’ils aient plus qu’un genou écorché, tu sais…
- En plus des probabilités pour qu’ils rencontrent un vieux morceau de fer blanc qui leur fasse avoir le tétanos…
- Ils sont vaccinés.
- Qu’ils soient poussés par un autre enfant et qu’ils fassent une mauvaise chute et se fassent le coup du lapin, qu’ils se fassent kidnapper contre rançon, ou tout simplement qu’une navette extraterrestre décide qu’aujourd’hui est le jour parfait pour asservir notre planète, je suis assez stressé par tous les regards des bonnes mères chrétiennes offensées.
Il jeta un regard autour d’eux et en effet il y avait plusieurs paires d’yeux braquées sur leur banc.
- Jusqu’à présent je n’ai jamais eu de problème.
- Jusqu’à présent elles te prenaient sûrement pour le délicieux et riche veuf ou divorcé, laisse-moi dire qu’elles ne doivent vraiment pas être contentes d’avoir raté leur coup. Toute cette rage nourrit leur bien chrétienne offense.
Il serra la main de Lance dans la sienne.
- Elles peuvent s’offenser autant qu’elles veulent si elles font un scandale devant les enfants elles en parleront à mes avocats et ils sont vicieux, c’est un mafieux qui me les a recommandés.
Lance rit et la tension commença à le quitter. C’était le moment parfait.
- Ça te dirait de ven…
Son téléphone sonna dans la poche de son pantalon.
- Merde, désolé.
Il le sortit et regarda, c’était le bureau, qu’est-ce qu’ils voulaient un samedi après-midi ?
- Laverty.
- Oh, monsieur Laverty, dieu soit loué, c’est Rose Roderick du standard, je suis désolée, il n’y a personne et je ne savais pas qui joindre, son assistant ne répond pas et Pranters des RH est injoignable et j’ai aussi essayé le docteur Reyes mais personne en répond et il n’arrête pas de demander à vous parler, je suis tellement désolée…
Il se leva.
- Que se passe-t-il exactement Mlle Roderick ?
Il posa la main sur le micro.
- Je reviens tout de suite, annonça-t-il à Lance avant de s’éloigner un peu du bruit assourdissant.
Bien sûr il remarqua la tension qui revint immédiatement dans le corps de son petit ami, mais il ne s’éloignerait pas beaucoup et garderait un œil sur les enfants.
- C’est un certain monsieur Knight, monsieur Laverty, il n’a pas arrêté d’appeler depuis une heure et je crois qu’il délire monsieur.
Il fronça les sourcils.
- Knight ? Damian Knight ?
- J’en sais rien, monsieur, il a juste dit Knight et il veut vous parler, je crois que… enfin, il n’a pas l’air très sain d’esprit, il dit que son secrétaire essaie de le tuer et… enfin il parle très vite et… mais il a dit qu’il travaillait ici, enfin pour Eris Macrotechnology.
Il cligna des yeux. Il n’avait jamais parlé de vive voix avec Knight, ils avaient correspondu par mail et articles lorsqu’il était à Cambridge et par la messagerie de l’entreprise à présent. Mais il lui avait toujours semblé être un homme raisonnable et rationnel, un homme assez rigide voulant tout contrôler, certes mais pas à ce point… Bon, bien sûr il avait entendu les rumeurs, on le disait paranoïaque, certains l’appelaient même le Monstre…
- Est-ce que vous pouvez me le passer ?
Si c’était un délire paranoïaque il fallait peut-être juste le satisfaire et ensuite il appellerait Reyes, elle devait avoir accès à son fichier…
- Euh… non… je crois pas, vous êtes sur un portable et…
Bien sûr la standardiste du week-end était incompétente, personne n’appelait jamais le week-end…
- Ok, donnez-lui mon numéro de téléphone.
- Je crois que ça va pas être possible monsieur, je lui ai donné plein de numéros et malgré tout il rappelle toujours ici…
Merde.
Il jeta un coup d’œil à l’aire de jeu et à Lance toujours droit sur le banc.
- Appelez le docteur Reyes, s’il ne répond pas cherchez son contact d’urgence, mais je le veux soit en ligne soit au bureau quand j’arriverai, en attendant faites patienter Knight.
Il commença à revenir vers le bruit.
- Oh, et Mlle Roderick, Knight fait gagner des millions à cette entreprise, tâchez de faire en sorte qu’il ne vous meure pas au bout du fil.
Il raccrocha. Il n’était pas fier de ce qu’il venait de faire mais il fallait bien qu’il passe sa mauvaise humeur sur quelqu’un.
- Des problèmes ?
Lance s’était levé et le soleil caressait ses cheveux blonds.
- Ouais, faut que je fasse un saut au boulot.
- Je vais appeler les enfants alors, l’informa l’américain en se tournant.
- Non.
Il prit son poignet et les yeux bleus se levèrent sur lui perplexes.
- J’en ai pour une demi-heure tout au plus. Laisse-les s’amuser.
- Tu veux que je les surveille seul ?
Lance semblait véritablement terrifié.
Il prit son visage entre ses mains.
- Tout se passera bien, souffla-t-il avant de l’embrasser.
Lance se jeta contre lui, nouant les bras autour de son cou, comme si ce devait être leur dernier baiser, comme s’il allait affronter un dragon dans à peine quelques secondes sans même avoir le temps de prendre épée et bouclier.
- Tout se passera bien, répéta-t-il en se séparant de ses lèvres. Je reviens dans une demi-heure.
Le désespoir nageait dans les yeux bleus.
- S’il y a le moindre problème tu me passes un coup de fil.
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Chapitre 6 Partie 2