Titre : La dernière coupe
Défi : Hors-défi
Type : Fanfic
Rating : PG-13
Personnages : Regulus, la coupe et ses souvenirs
Nombre de mots : 946
Disclaimer : Les personnages et situations sont à JKR, je me contente de faire mumuse avec sa création.
Note : Pour le Sphinx, qui a forgé ma vision de Regulus, et parce que... ça ne saurait être autrement.
La dernière coupe
La première coupe amène le souvenir de Sirius.
Sirius aimé, Sirius admiré. Sirius sous les projecteurs. Sirius regretté, Sirius maudit. Sirius dont le nom ne doit pas être prononcé - mais Sirius dont l’ombre repose à jamais sur la sienne, Sirius dont la mémoire demeure à jamais dans les yeux de ses parents, posés sans concession sur lui.
La première coupe amène le souvenir de l’amertume.
La deuxième coupe amène le souvenir du dortoir de Serpentard.
Le dortoir où il est un Black - fier, intouchable, un Black qui s’enorgueillit de son excellence, un Black dont le talent au Quidditch n’existe pas pour lui-même, qui doit uniquement servir à dorer l’image de la famille. Un Black qui n’a ni le droit de pleurer, ni le droit de craquer.
La deuxième coupe amène le souvenir de la faiblesse.
La troisième coupe amène le souvenir de Bellatrix.
Fière Bellatrix, dont les ongles tranchants meurtrissent sa joue, lacèrent son âme - cruelle Bellatrix, qui n’accepte pas la préséance des hommes et s’assure que, tout homme qu’il soit, ce petit cousin-là demeurera à jamais sous sa botte.
La troisième coupe amène le souvenir de la soumission.
La quatrième coupe amène le souvenir d’Andromeda.
Andromeda, dont le regard posé sur lui est empli de mépris. Andromeda qui encense Sirius, qui les compare sans cesse, dont il entend encore résonner l’écho à son oreille - « Tu veux devenir comme ton grand frère Sirius, n’est-ce pas, Reg ? Tu ne veux pas devenir un méchant mage noir ? » - Andromeda qui contribue à la dissociation de sa famille, à la sienne propre.
La quatrième coupe amène le souvenir de l’écartèlement.
La cinquième coupe amène le souvenir de Severus.
Et avec le souvenir de Severus, le souvenir de l’amour - les draps froissés, le regard sombre et cette étincelle d’intelligence qui illumine son visage, les traits incertains mais l’esprit affûté, les longues mains qui caressent son corps et ces lèvres exquises qui, le sommeil venu, murmurent le nom de Lily.
La cinquième coupe amène le souvenir de la trahison.
La sixième coupe amène le souvenir de sa mère.
Sa mère aux yeux durs, aux mots coupants. Sa mère, qui houspille son père, son frère et lui du même souffle, les mains lestes à gifler quiconque se trouve à leur portée. Sa mère, dont il cherche sans cesse l’approbation, sans jamais la trouver, car quoi qu’il fasse, ce n’est jamais assez.
La sixième coupe amène le souvenir de l’impuissance.
La septième coupe amène le souvenir de la Marque.
La Marque qui brûle sur son bras, dans son cœur, jusque dans son âme, la Marque qui noircit sa peau si blême, qui camoufle les veines fragiles sur son poignet. La Marque qui le ronge lentement, chaque fois qu’il blesse, chaque fois qu’il tue. La Marque devant laquelle cet enfant a crié d’horreur, lorsqu’il a remonté les manches de sa chemise.
La septième coupe amène le souvenir de la honte.
La huitième coupe amène le souvenir du Maître.
C’est le sifflement qui lui revient d’abord, le sifflement et l’effroi - l’effroi qu’on lui a appris, très jeune, à confondre avec le respect. Mais si le respect tient toujours, aujourd’hui encore, c’est la peur qui le dévore, qui le consume de l’intérieur. La peur du Maître, et la peur de ce qu’il peut faire.
La huitième coupe amène le souvenir de la terreur.
La neuvième coupe amène le souvenir de Kreacher.
Le souvenir du petit être tremblant, prématurément vieilli, le souvenir de l’agonie endurée des jours durant, le souvenir de l’angoisse, de l’inquiétude alors que ses mains incompétentes essuient son front d’un linge humide. Le souvenir de l’horreur, lorsque l’Elfe lui révèle son histoire.
La neuvième coupe amène le souvenir de la culpabilité.
La dixième coupe amène le souvenir de la Décision.
La Décision prise, alors qu’il est seul dans sa chambre et que le soir tombe doucement. La Décision consentie, au moment où le soleil cesse de briller sur lui, celle qu’il sait être la bonne, la seule valable. La Décision qui mène au Chemin, le Chemin qui mène au Sacrifice, le Sacrifice qui n’a pour issue que la Mort. Sa propre mort.
La dixième coupe amène le souvenir de la solitude, et avec la solitude vient la brûlure, les larmes et le bassin, enfin vidé de sa potion verte, aussi verte que Serpentard, aussi verte que le sortilège de la mort, aussi verte que les yeux de Lily, que Severus aimait.
Aussi verte que la souffrance intime qui rage en lui.
La dernière coupe dissipe les souvenirs.
La dernière coupe, emplie d’eau, apaise la brûlure, apaise les larmes, apaise la souffrance. La dernière coupe lui rappelle l’odeur de la pluie sur la terre sèche, et le battement doux contre la vitre de son âme. Au bout de la dernière coupe se trouve l’espoir - au bout de la dernière coupe se trouve la liberté.
La dernière coupe, en dissipant les souvenirs, annihile toute trace de ce qui fut un jour celui dont le nom était Regulus Black, et qui était à la fois un fils, un frère, un étudiant, un amant, un jeune homme trop vite grandi, et tant d’autres choses encore.
Lorsque l’Inferi agrippe son bras, lorsque la coupe roule sous ses pieds, lorsque Kreacher le quitte, ses grands yeux pleins de larmes, il ferme les siens.
Il ne sourit pas.
Mais sur ses traits apaisés, l’on ne pourrait trouver la trace ni de l’amertume, ni de la faiblesse, ni de la soumission.
Ni de l’écartèlement. Ni de la trahison. Ni de l’impuissance.
L’on ne peut non plus y trouver trace de la honte, ou de la terreur, ou de la culpabilité.
Ni celle de la souffrance.
Fin.