Un mois très accès romans historiques avec la belle découverte d’un auteur espagnol : Arturo Pérez-Reverte, bien parti pour rentrer dans ma liste des auteurs Trop-d’la-balle-qui-tuent-leur-race .
« Tancrède : Une uchronie » de Ugo Bellagamba
Uchronie - 370 pages
Tancrède est une uchronie se déroulant durant les croisades à la fin du XIe siècle et racontant l’histoire d’un jeune croisé normand, Tancrède de Hauteville. Ardent chrétien, celui-ci voit comme une bénédiction du Ciel la décision de son oncle Bauhémont de se joindre aux armées occidentales pour aller délivrer le tombeau du Christ. Hélas, les choses ne se passent pas comme prévu… De famines en massacres, en passant par les épidémies de fièvre, les lynchages et autres joyeusetés, les illusions de Tancrède ne vont pas tarder à se briser sur les murailles poussiéreuses de Jérusalem. Déchiré entre sa foi et sa conscience, sa loyauté pour ses compagnons de guerre et son admiration grandissante pour l’adversaire musulman, le jeune normand va devoir choisir un camp… Sa décision influencera non seulement son avenir, mais ceux de l’Occident et de l’Orient - si si ! Sans rire ! Très habile uchronie et fascinant roman historique, Tancrède est un plaisir à lire, un de ces romans qui parviennent à être très divertissants, tout en regorgeant de thématiques passionnantes autour des divergences culturelles et religieuses.
Ajoutant au passage que le roman donne une vision extrêmement bien renseignée et détaillée des croisades : pour peu que l’on s’intéresse un peu à cette période de l’Histoire, on termine sa lecture avec une envie dévorante de se procurer une demi-douzaine de bouquins sur le sujet pour démêler la réalité et de l’uchronie. Et, dans mon cas, de relire Le Talisman de Walter Scott (avec Richard Cœur-de-Lion barbu et beuglant comme un taureau - yihaa !) et Les Lions d’Al Rassan de Guy Gavriel Kay (qui ne parle pas vraiment des croisades, mais de la Reconquista espagnole, mais on reste dans les guerres de religion musulmanes-chrétiennes et c’est tellement bieeeeeeen…)
« Les dragons de sa Majesté - Téméraire Tome 1 » de Naomi Novik
Roman fantastique - 350 pages
Lu sur les conseils très enthousiastes de Jainas, Téméraire est une suite de romans de fantasy reposant sur un concept original, quoique un peu kitch : les guerres napoléoniennes avec des dragons ! Pour développer un peu, la série des Téméraire se passe dans un monde alternatif où les dragons existent et sont élevés au même titre que des bœufs ou des canassons pour servir de bêtes de somme, courriers et, bien entendu, d’instruments de guerre. Nous sommes au début du XIXe siècle et l’Ogre Corse est en bonne passe de conquérir toute l’Europe grâce à ses dons stratégiques, son célèbre égo et son armée de féroces dragons. Toute ? Non ! Car un village peuplé d’irréductibles gaulois résistent encore et toujours à… Euh… Pardon : car l’Angleterre résiste encore, soutenue par sa petite armée d’aviateurs, certes peu nombreux mais particulièrement motivés. Ancien membre de la Navy, le capitaine Will Laurence adopte, un peu contre son grè, un dragonnet qu’il nomme Téméraire. Accompagné de son loyal mais pas toujours très accommodant dragon, l’ancien capitaine de marine va rejoindre le Corps des aviateurs pour défendre son pays, la Couronne et tout le bataclan.
Il y a pas mal d’aspects qui me plaisent beaucoup dans Téméraire, à commencer, bien entendu, par le contexte historique utilisé de façon ingénieuse, quoique pas particulièrement approfondie, et la manière plutôt habile dont est introduite l’existence des dragons. Les deux personnages principaux sont attachants et la relation amicale qui les lie offre plusieurs passages assez touchants. Mais des personnages principaux sympathiques et une idée de départ cool ne suffisent pas forcément à faire un bon bouquin… Le livre se lit bien et sans ennui, grâce à un style simple et agréable, mais je n’ai pas était accrochée par l’intrigue qui m’a paru particulièrement peu fournie. Cette faiblesse aurait pu être contrebalancée par des personnages secondaires bien fichus et un univers très riche, mais là encore, je suis restée un peu sur ma faim. Quelques grosses facilités scénaristiques également… J’ai particulièrement bronché sur la victoire quasi miraculeuse de Téméraire à la fin du roman où l’on a grosso-modo l’impression que le dragon et son copain à deux jambes mettent en déroute à eux deux l’ensemble de l’armée française ! Je veux bien qu’il soit fort, le lézard, mais un brin de subtilité n’aurait pas nui. Impression mitigée donc, ce qui ne m’empêchera pas de lire la suite - au moins le tome suivant - puisque l’on m’a affirmé que les petits problèmes de l’intrigue disparaissaient avec le temps.
« Fondation - Le cycle de fondation Tome 1 » de Isaac Asimov
Roman de science-fiction - 400 pages
Je savais plus ou moins qu’Asimov était considéré comme un pape de la science-fiction, mais je ne m’étais jamais risquée à lire ses romans : la science-fiction et moi ça n’a jamais été une très grande histoire d’amour (si l’on oublie quelques exceptions comme l’excellente série des Vorkosigan par exemple). Mais après que mon fidèle compagnon m’ait presque fourré de force le 1er tome de Fondation dans les mains sous prétexte que « C’est pas de la SF, ça madame ! C’est de l’Histoire ! », je m’y suis finalement aventurée. Bien m’en a pris car ce premier volume s’est révélé passionnant ! L’idée de base est déjà tout à fait fascinante : dans un très très très lointain futur, un Empire galactique règne depuis 12 000 ans sur la quasi-totalité de l’univers et tout porte à croire que sa domination n’est pas prête de prendre fin. Mais un jour tout ce beau système vacille quand un mathématicien, Hari Seldon - inventeur de la psychohistoire, science permettant de prédire avec exactitude le futur d’une nation - annonce que l’empire s’effondrera d’ici 300 ans. Suivra 30 000 ans de chaos et de barbarie qui feront régresser toute la Galaxie jusqu’à l’âge de pierre. Seldon propose alors la création d’une Fondation qui, à défaut d’empêcher la chute de l’Empire, permettra de réduire cette période de chaos à seulement mille ans.
Le premier tome du cycle est constitué d’une série de nouvelles racontant plusieurs épisodes de l’histoire de la Fondation, se déroulant à peu près à 50 ans d’intervalle les uns des autres, et il faut bien avouer que c’est un petit bijou d’intelligence et de subtilité scénaristique. Oh, tout n’est pas parfait : l’écriture d’Asimov n’est pas éblouissante et ne s’encombre pas de richesses stylistiques, mais l’intelligence des dialogues (bon sang que j’aimerais pouvoir écrire des dialogues pareils, moi…) et des intrigues compense allègrement ce petit inconvénient. Une agréable surprise dont je lirai avec plaisir la suite.
« Fondation et Empire - Le cycle de la Fondation Tome 2 » de Isaac Asimov
Roman de science-fiction - 420 pages
Décennies après décennies, la Fondation étend son emprise sur les mondes qui l’entourent en contrant vaille que vaille les ambitions de ses nombreux ennemis, tandis que l’Empire galactique pourrit tranquillement sur place... Contrairement au tome précédent, celui-ci est divisé en deux parties se concentrant sur deux crises politiques majeures. Dans la première, un général ambitieux tente de s’emparer de richesses technologiques de la Fondation pour redorer la couronne impériale en déliquescence, tandis que dans la seconde, celle-ci est menacée par un mystérieux conquérant, nommé avec un sens plaisant de l’autodérision « le Mulet », décidé à construire un nouvel empire sur les ruines de l’ancien. Tout aussi réussi que le premier tome, ce roman a le grand mérite d’introduire en la personne du Mulet un beau personnage de « magnificent bastard » comme je les affectionne tant : brillant, pragmatique, compétent, manipulateur (ô combien…) et tout et tout, ce qui m’a permis de couiner joyeusement sur toute la seconde partie du roman ! A noter qu’Asimov est également un spécialiste des twists finaux astucieux à la Bradbury ou à la 4e dimension, ce qui rend la lecture particulièrement plaisante et laisse le lecteur bouche béante à la fin de chaque chapitre et marmonnant dans sa barbe « P’tain, j’y avais pas pensé… »
« Le Maître d’escrime » d’Arturo Pérez-Reverte
Roman historique - 280 pages
C’est d’la bonne ! Pour une critique plus détaillée,
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« Le Hussard » d’Arturo Pérez-Reverte
Roman historique - 180 pages
Après la très agréable lecture du Maître d’escrime, j’ai enchainé joyeusement sur la suite de la bibliographie de Pérez-Reverte. Roman historique se déroulant en 1808, Le Hussard raconte l’histoire d’un jeune soldat français envoyé mater les guérillos pendant la guerre d’Espagne, la plus sordide et la plus éprouvante de toutes les guerres napoléoniennes (quoique la retraite de Russie était pas mal dans son genre…). Le Hussard est un récit glaçant… Celui de la sanglante descente aux enfers d’un jeune homme de dix-huit ans, avide de gloire et de rêves, qui apprendre dans la boue, le sang et la merde le vrai visage de la guerre. Les trente dernières pages sont particulièrement terribles et laisse comme un arrière- goût amer dans la bouche du lecteur, partagé entre la pitié et une pointe d’amusement écœuré du type « Eh bien, mon petit gars, il fallait t’y attendre ». Très bon roman dans tous les cas qui m’encourage à penser que le señor Pérez-Reverte est décidément une valeur sûre.