"Le sentiment du fer" de Jean-Philippe Jaworski
recueil de nouvelles fantastique - 210 pages
♥ ♥ ♥ ♥ ♥ 5/5
Les elfes sont des emmerderesses. C'est pas moi qui l'ait dit, même si je n'en pense pas moins, c'est Jaworski (je serais d'ailleurs curieuse de savoir si il a piqué l'expression à Brassens qui est, à ma connaissance, le seul à l'avoir utilisée). Avec la nouvelle d'ouverture de ce recueil, « le Sentiment du fer », il nous en apporte la preuve éclatante : même quand ils ne sont pas là, les elfes arrivent à vous pourrir la vie, comme on pourrait témoigner ce voleur de Ciudalia embarqué dans une dangereuse mission pour dérober un objet mystérieux. Quand ils sont là, bien sûr, c'est encore pire. Demandez donc à cette bande d'honnêtes coupe-jarrets dérangés au milieu de leur paisible tâche par un baladin elfique à la langue trop bien pendu. Et il n'y a pas que les elfes, les nains aussi sont de sacrées petites raclures ! Moins sinueux peut-être, mais des petits salopards sournois quand même et qui n'hésitent pas exploiter et à sacrifier leurs prochains. La preuve, regardez cette caravane de gnomes conduits à coups de fouet dans les dédales d'une cité souterraine où se dissimule un terrible dragon… Et je ne vous parle même pas des sorciers ! Ralala, les sorciers, plutôt me flanquer un coup de hache dans le pied que d'en côtoyer un, je m'en tirerais à meilleurs frais !
On peut toujours compter sur Jean-Philippe Jaworski pour démolir les poncifs de la fantasy et en faire quelque chose d'entièrement nouveau. Passés à la moulinette de son imagination géniale, elfes, nains, sorciers et enchanteresses en ressortent transfigurés et modernisés. Comme pour
« Janua Vera », son précédent recueil, Jaworski prouve que sa plume délicieuse se prête à tous les registres : humoristique avec le grinçant et hilarant « Profanation », tragique avec le plus poétique « Troisième hypostase », aventureux, etc… J'ai particulièrement apprécié la façon dont tous ces petits récits tissent des ponts entre eux, ainsi qu'avec ceux de « Janua Vera », donnant l'impression d'un tout homogène et permettant au monde du Vieux Royaume d'acquérir une grande densité. le tout donne un ouvrage d'excellente qualité, malheureusement desservi par une édition assez médiocre : couverture moyenne, design général moche, pas mal de coquilles, ainsi que des erreurs d'impression. J'aime trop Jaworski pour le pénaliser pour cela. N'empêche, j'aurais préféré l'acquérir en numérique. Surprenant de la part des « Moutons électriques » qui se distinguent habituellement par des éditions de très bonne qualité.