Comme dit plus tôt, j’ai pris l’habitude de chroniquer mes lectures sur le site Babelio. Le problème, même avec les meilleurs romans, c’est qu’une fois la dernière page tournée, ils ont la fâcheuse manie de s’effacer rapidement de ma mémoire. Résultat, un mois plus tard, j’ai souvent le plus grand mal à donner un autre avis que « Ouais, il était vachement bien ! », « Pas mal » ou « Bof… Pas si bien que ça ». Le chroniquage régulier (ça se dit chroniquage ?) a l’avantage de me forcer à réfléchir sur le bouquin une fois terminé et à mettre à plat mes impressions.
C’est parti !
En espérant que cette bonne résolution là tiendra jusqu’à la fin de l’année…
« Hate List » de Jennifer Brown
roman - 400 pages
Valérie et Nick, son petit ami, souffrent. Chaque jour au lycée, ils doivent affronter le même calvaire quotidien : les professeurs qui les méprisent, les camarades de classe qui les martyrisent et les injurient, les parents qui les négligent… Alors pour trouver un dérivatif au désir de revanche qui les consume, ils imaginent la « liste de la haine » : un petit carnet où ils écrivent les noms de tous ceux qu’ils haïssent, de toutes les personnes médiocres, malveillantes, stupides, détestables qui « mériteraient de crever ». Une super idée vraiment, un baume sur leur fierté et leur sensibilité blessées. Jusqu’au jour où les choses tournent mal… Jusqu’au jour où Nick arrive au lycée armé d’un révolver et abat une à une les personnes recensées dans la liste avant de se tirer une balle dans la tête.
Voici Valérie seule. Seule pour affronter les conséquences d’un acte qu’elle n’a pas commis, seule face à la méfiance, la peur, le chagrin, les soupçons de la police qui la pense impliquée et la culpabilité lancinante de n’avoir rien vu venir, de n’avoir rien pu empêcher. Et pourtant il va falloir vivre, continuer à aller en cours, affronter le regard des camarades, des rescapés, des parents des victimes pour - peut-être, un jour - espérer retrouver une existence normale. C’est cette pénible renaissance que raconte « Hate List ». Le lecteur va accompagner Valérie pas à pas dans sa longue lutte pour reprendre prise sur sa vie. Le parcours sera difficile, ponctué d’humiliations et d’épreuves, mais aussi parsemé ça et là de lueurs d’humanité et d’espoir.
« Hate List » a le mérite de traiter un sujet difficile et sensible car terriblement d’actualité : la violence physique et psychologique en milieu scolaire et ses conséquences. Malgré cela, je dois reconnaître que le roman de Jennifer Brown ne m’a pas totalement convaincue. Certains passages, notamment sur la relation entre Valérie et sa famille, m’ont paru sonner très justes et nuancés, mais l’auteur ne parvient pas pour autant à éviter totalement les clichés habituels à ce type de récit. Le passage où l’héroïne se redécouvre à travers la peinture m’a fait particulièrement grincer des dents : l’art rédempteur… Est-ce que les écrivains ne se lasseront jamais de ce fichu poncif là ? Bémols également sur la fin, un peu trop facile quoique assez touchante, et sur le style d’écriture pas mirobolant.
Qu’on ne s’y trompe pas : « Hate List » n’est pas un mauvais roman - au contraire, il traite avec assez de pertinence et de sensibilité un sujet complexe - mais je le conseillerais plutôt à un public adolescent. Il reste en dessous de mes attentes, surtout avec un sujet aussi fort. Sur un thème très semblable, j’ai indubitablement préféré l’oppressant « Il faut qu’on parle de Kevin » de Lionel Shriver, plus noir, plus ambigu et plus mature.