S’il devait y avoir une bande son à mon année, ce serait celle de la comédie musicale Hamilton, espèce de météore musical improbable, qui depuis son lancement en 2015 en off-Broadway s’est imposé comme un succès mondial incroyable tant sur le plan critique que celui du box-office, et un phénomène culturel sans précédent.
Jugez plutôt : 11 Tony Awards (et 16 nominations), un prix Pullizer dans la catégorie Drama, un Grammy Award etc etc ; des listes d’attentes faramineuses de plus de six mois pour obtenir une place, des billets qui s’arrachent paraît-il jusqu’à 7000$ au marché noir ; un tel engouement de la jeunesse que de nombreux professeurs l’ont utilisé comme support pédagogique pour intéresser leurs étudiants à l’Histoire et que des sessions de cours dédiées sont à venir dans plusieurs universités...
Et c’est sans parler du fait que les acteurs ont été reçu à la maison Blanche et que la famille Obama a déclaré plusieurs fois être très fan.
Mais de quoi ça parle ? Pourquoi cet engouement ?
Hamilton est une comédie musicale, qui porte sur la vie du Père fondateur des États-Unis d'Amérique, l’éponyme Alexander Hamilton et qui a été composée et écrite par Lin-Manuel Miranda, lui-même inspiré par la lecture d’une biographie d'Hamilton écrite par l'historien Ron Chernow.
Mais ce qui distingue Hamilton c’est surtout :
- Son genre musical : principalement du hip-hop et du rap, avec un flow incroyable et quelques chansons dans des styles différents (les chansons du roi Georges par exemple, qui tiennent plus de la pop anglaise… mais j’en reparlerai)
- Son casting anachronique (et audacieux), presque à 100% composé d’acteurs/chanteurs noirs ou hispaniques. Hamilton était un immigrant écossais, Lin-Manuel Miranda est lui-même d’origine Portoricaine, et l’idée de la construction des Etats Unis d’Amérique par les immigrants est un thème important dans la comédie musicale.
L’on suit donc la vie d’Alexander Hamilton, de son arrivée à New York à ses études de droits, en passant par son mariage, la guerre d’indépendance dans laquelle il s’est illustré sous les ordres directs du Général Washington puis plus tard sa carrière politique, sa défense de la Constitution Américaine, ses déboires personnels, son rôle en tant que premier secrétaire d’Etat au Trésor, ses erreurs et ses errements… puis, spoiler alert (en fait non, c’est dit dès la première chanson), sa mort lors d’un duel avec son rival Aaron Burr.
En filigrane de cette biographie condensée c’est toute la naissance des Etats Unis à laquelle on assiste, la scène est peuplée par le flamboyant marquis de Lafayette, George Washington, Thomas Jefferson, Aaron Burr et bien d’autres, on explore la complexité et les tensions politique, l’ambivalence des figures historiques, l’ambition et la force de travail incroyable de cet homme indubitablement brillant et spirituel qui a échappé à la pauvreté et accédé à la postérité à la force de ses mots et de la plume.
Comme l’a dit Lin-Manuel Miranda avec humour : la vie d’Hamilton est l’incarnation même de l’esprit du hip-hop. ^^
Morceaux choisis
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La toute première présentation du concept de la pièce et de l’un de ses premiers morceaux par L-MM en 2009, à la maison Blanche, déjà. Qu’il était jeune et sans cernes ! Je conseille vraiment l’écoute, et il y a des sous titres en anglais dispo pour mieux comprendre ce qu’il dit. (Et en comparaison sympa :
le même morceau cette année, 7 ans plus tard, de nouveau à la Maison Blanche mais avec le cast au complet… )
Je vous met aussi l’une des chansons titre dont le thème musical va revenir souvent, My Shot, qui présente bien tous les personnages du premier acte, de nouveau une des vidéos de la maison Blanche, qui ont l'intérêt d’avoir une très bonne qualité de captation et de l’image, ce qui permet de voir les acteurs.
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Musicalement, Hamilton est très dense, et pour des spectateur non-natifs les sous-titre s’imposent. Mais on a de la chance ! Il y a
une chaîne youtube entièrement dédiée qui présente les 46 chansons en mode karaoké ! Je ne vous dis même pas combien de temps j’ai passé dessus. Merci, youtubeur anonyme ! <3
(edit : malheureusement il semblerait qu’une partie des vidéos aient été retirées… Mais des versions sous-titrées des chansons manquantes restent disponibles si on cherche un peu.)
Et pour boucler les extraits, je vous propose :
- La performance de la chanson “Yorktown” aux Tony Award, qui permet de se rendre compte des costumes et de la scénographie (début à 2:10). C’est une chanson entraînante, à la fois épique et pleine d’émotions, et qui contient la mémorable réplique “Immigrants, we get the job down”.
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- Les chansons que le roi Georges adresse à la nouvelle nation, qui sont conçues comme des chansons d’amour déçu revanchardes, en mode pop anglaise… Grandiose
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- The Room where it happens, une chanson politique (il y en a un certain nombre) dans laquelle Burr rage de ne pas être au coeur du jeu politique comme il le désire.
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Lin Manuel Miranda
En plus d’être l’auteur et compositeur de la comédie musicale, Lin-Manuel Miranda est un chanteur (et rappeur) de talent, et a lui-même interprété le rôle d’Alexander Hamilton dans la pièce pendant une bonne année et demi, avant d’abandonner le rôle à un successeur il y a a peine quelques mois (ce qui explique sans doute pourquoi sur la majorité de ses interventions publiques de 2016 il a l’air à demi mort d’épuisement et a sous les yeux des valises dignes d’un déménagement transatlantique).
Le succès phénoménal d’Hamilton (qui est désormais décliné à Chicago et ne va pas tarder à être lancé à San Francisco et Londres) a boosté sa carrière, et c’est le nouvel enfant prodige de la scène musicale américaine. Il est derrière la musique de la cantina dans le Star Wars épisode 7, et à écrit et interprété une partie des chansons de Moana, le dernier film Disney). Préparez vous à entendre (encore) parler de lui dans le futur.