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Films slashy VS films gays
Après avoir été voir ces deux films, il m’est apparu assez clairement qu’il fallait que je fasse un mise au point dans ma tête concernant mon ressenti et pourquoi diable j’avais du mal à expliquer à ma femme ce que Sherlock Holmes avait de mieux que I love you Philip Morris. Ce qui différencie vraiment ces films à mes yeux c’est que l’un est à tendance slashy tandis que l’autre est ouvertement gay.
Commençons d’abord par une présentation des deux œuvres avec un petit trailer qui vous laissera comprendre presque immédiatement les différences majeures.
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Sherlock Holmes est un film d’aventure et de mystère qui se veut tout public. Vous aurez noté les combats, les cascades, les explosions et surtout la fille ! Sauf qu’en fait dans le film la fille est vraiment à peine plus qu’un objet de décoration, elle court après Holmes mais elle peine à retenir son attention (qu’est-ce qu’une femme face à un mystère à élucider ?). Le film est axé aventure et tout public, mais il passe son temps à jouer avec le public yaoiste à tel point que tous les non-yaoiste qui cependant connaissent l’existence du yaoi l’ont vu. Et non, ce n’est pas juste la yaoiste en moi qui exagère.
http://popwatch.ew.com/2009/12/22/robert-downey-jr-s-allegedly-gay-sherlock-holmes-seriously/http://www.youtube.com/watch?v=XNHG1xzPr-E I love you Philip Morris est un film gay gay gay comme le crie Jim Carrey. Certes c’est drôle et rocambolesque mais on ne vous laisse pas perdre de vu que les deux personnages principaux sont gays. En détail et avec des bruitages… Pour moi, l’une des phrases qui résume le film est celle prononcée par Philip : « Enough romance, let’s fuck ! » C’est un film où on baise, on ne fait pas l’amour.
Et c’est là qu’advient pour moi toute la différence entre les films slashy et les films gays et la raison pour laquelle je n’arrive pas à adhérer aux films gays (bon, sauf Velvet Goldmine, mais celui là est dans une catégorie à part, c’est un film sur la musique plus que sur des gays). Dans les films gays on veut nous montrer des hommes des vrais, des poilus, des virils, des qui baisent et qui sont pas des femmelettes. Les films gays sont toujours hypersexués, voire priapiques, le nombre de références crues au sexe par minute est étouffant. On ne nous laisse pas oublier une seconde que ce sont des hommes, des vrais hommes, des qui ont des besoins biologiques. C’est pour ça qu’ils baisent, ils ne font pas l’amour parce que faire l’amour c’est un truc de femmes, non, « foreplay are for sissies ». Et dans ce priapisme on introduit la différence. Toi, homme hétéro qui est venu voir ce film pour faire plaisir à ta petite amie, ne crains rien, tu es différent des gays, vois comment ils baisent tout le temps, toi tu n’as pas ce rapport à la sexualité parce que tu es hétéro, tout va bien, tu n’es pas gay, ils sont différents. Alors oui, ils se disent je t’aime, ils sont mignons parfois mais tout de suite après il faut qu’ils compensent en baisant.
Freud disait (et mon prof de litté du XIXè le répétait) : « Le contraire du jeu ce n’est pas le sérieux, c’est le réel ». Le contraire du yaoi ce n‘est pas le zet, c’est la réalité. Et le problème avec les films gays c’est qu’ils balancent la réalité dans la figure du spectateur en essayant de la rendre le plus cru possible, en cherchant à ne surtout pas la sublimer, à croire que ça les écorcherait de nous donner des lipstick gays, non, il faut rester réel et surtout ne pas laisser croire à du sentimentalisme.
Alors bon, c’est leur choix, ça leur convient, tant mieux pour eux. Le problème c’est que ça ne me convient ni ne me convainc.
La yaoiste en moi a un horizon d’attente qui est totalement manqué par les films gays.
Qu’est-ce que j’attends alors ?
J’attends de l’amour. Pas du sexe, des sentiments, des regards, de la proximité affective qui ne se traduit pas par de la baise ou un couple de chihuahuas. Et c’est là que Sherlock Holmes réussit. La proximité affective entre Holmes et Watson est tellement évidente qu’elle perturbe certains spectateurs. D’ailleurs tout le film joue dessus, sur l’incapacité de Holmes à vivre sans son « meilleur ami ». Ce qui nous amène au deuxième point.
J’attends du fantasme, du double langage. Un ami disait souvent : « Pour se débarrasser d’une yaoiste il suffit de lui donner ce qu’elle croit vouloir. Dessine lui des pédés et elle s’enfuira en courant. » Et il est vrai que le réel est l’ennemi de la yaoiste (sauf rares exceptions), la yaoiste vit dans le fantasme, dans sa version de ce qui se passe à l’écran, elle voit des choses que les autres ne peuvent voir et ces choses qu’elle voit, ces phrases qu’elle entend et qui semblent n’avoir été crées que pour elle (« Don’t get excited ! ») elle sait que les gens normaux ne les voient pas, que seules les autres membres de son clan les voient. Il y a un esprit communautaire dans le yaoi, un sentiment d’appartenir à une société secrète qui me plait. Un film slashy c’est un film qu’on décompose scène par scène en sortant de la salle, un film où on va s’extasier en couinant : "et là il lui dit ça ! C’était juste trop mignon !" A la fac je me suis spécialisé en littérature, parce que la littérature en fac c’est l’art de projeter sa lecture, sa vision du monde sur une œuvre et de prouver par a+b que ça colle, c’est l’art de fantasmer une œuvre. Et c’est ce que la yaoiste fait au quotidien : elle fantasme.
Un film slashy c’est un film qui réussit la subtile alchimie de nous donner matière à fantasmer sans pour autant nous donner une réalité qui en fait nous indiffère parce qu'elle restreint nos possibilités.