Titre : Pas plus bête
Auteur :
anadyomedeThème : Solitude
Fic nº : 6
Fandom : Everworld
Pairing : Christopher/Senna
Rating : PG
Disclaimer : Tout appartient à K. A. Applegate.
Je ne suis pas plus bête que les autres.
Je l’ai dit à Senna il y a un million d’années - avant Everworld, avant même qu’elle ne me largue pour David (David !). Je me souviens qu’elle m’avait regardé droit dans les yeux (où est-ce qu’on était ? Dans ma voiture, au restaurant, dans l’eau ? Chaque fois que j’y repense, je ne vois rien. Rien que Senna - et c’est très bête, ça). Sa main s’était posée sur ma joue, sa main glacée, et elle était tellement belle - c’était pour de faux qu’elle était aussi belle, sa peau contre la mienne, je le sais, mais putain ce que de savoir ne peut rien changer - et elle avait dit : tu crois ?
Deux petits mots qui entre ses lèvres m’avaient paru merveilleux. C’est sûr, j’étais drogué comme jamais par ses parfaits petits tours, j’étais bon à jeter.
Là dans cette chambre, c’est pareil. J’ai tout fermé ce que je pouvais et j’ai remonté les couvertures jusqu’à m’étouffer à moitié. Pour ne pas penser. Pour ne pas voir - le problème, c’est que je suis en train d’imaginer et je ne sais pas encore si j’ai envie de tuer ou de me tuer. On devrait m’ouvrir une fenêtre et me jeter du haut de l’Olympe. Ce serait bien fait.
C’est drôle parce que j’essaie très fort de me concentrer. De me dire : hé, Christopher, t’es un grand garçon maintenant. T’es un tueur de troll (ou en tout cas un tueur de Hetwan et à côté, les trolls, c’est de la petite rigolade), tu sais faire du feu en frottant deux bouts de bois (David le sait, ce qui revient à peu de choses près au même) et tu as découvert que tu n’avais même plus besoin d’un cœur pour vivre. C’est quand même classe. Alors mon gars, t’es quand même capable de voir quand t’es amoureux pour de faux, non ?
Non.
Enfin, oui. Mais c’est comme observer de très loin des gens en train de se massacrer. J’admire mon propre carnage, celui qui me déchire les côtes parce que Senna dort avec David et que moi je suis tout seul en train d’être fou amoureux d’elle. C’est comme si mon cerveau ne contrôlait plus rien, comme si on venait de me couper la main et qu’il criait à tout en moi qui hurle de douleur : arrêtez, bande d’imbéciles, la main n’est pas vraiment coupée.
Qu’est-ce que je m’en fiche qu’elle soit encore accrochée à mon bras si tout en moi crève, crève de cette souffrance égoïste que Senna m’a ancrée, parce que je suis seul, parce que David ne l’est pas, parce que je veux son corps à elle entre mes draps, ses cheveux répartis autours de moi, ses doigts contre les miens, ses lèvres partout. Parce que ce désir là ne peut pas être un mensonge, parce qu’il y a bien quelque chose chez elle qui s’étiole, qui sombrera et qu’alors elle aurait besoin de moi. Je le sais, je le sens. De moi et pas de David. Parce que je pourrais être mieux, que j’arrêterai d’être plus bête que les autres, que si elle le dit alors j’y crois.
Non.
Pas plus bête. Pas plus faible. Elle doit en rire, Senna, de moi sans elle. De moi sans elle depuis des mois, depuis des siècles peut-être, sans son corps enroulé au mien.
Quand je m’observe de loin, je sais que j’y survivrai mieux qu’elle.