Mar 26, 2007 19:36
C'est vrai, Riff ?
Tu as tout oublié ?
La saveur de nos deux peaux mêlées ? Ce bonheur enivrant qui nous prenait ? Ma main sur tes joues ?
Cette main, à chaque baiser, tressaillait.
Cette main... elle aimait lorsque tu l'effleurais sur la paume. Toi-même, tu sentais quelque chose de vertigineux te prendre, le sentiment diffus d'un souvenir sorti d'on ne savait où.
Tu me disais que tu avais déjà connu ça, et on riait, empli par une folie bizarre.
C'était à nous. Cet instant, tes lèvres sur les miennes, touche rapide et savoureuse, et puis tes mains qui savaient si bien caresser.
Ce que je n'aimais pas, c'était l'après, lorsque la mélancolie s'emparait de tes yeux. Ils n'étaient plus plein de moi, mais de choses passées que je ne comprenais pas. Là, je m'empressais de fermer tes paupières avec mes lèvres... pour tout cacher. On peut reconstruire, avec ou sans mémoire. Ta tête blonde, je voulais la garder pour moi. Ton passé m'indifférait, du moment que tu acceptais de conserver mon sceau.
Souvent, je parcourais de mes doigts cette rose menaçante sur ta poitrine. J'avais l'impression qu'elle m'avertissait, "touche-moi et tu le regretteras"... Toi, tu me regardais avec ton sourire déjà indifférent et tu me disais de ne pas m'en faire, que la cicatrice finirait bien par disparaître. Les labours, tu connaissais, alors j'avais confiance. Le blé finit par recouvrir les champs, après tout.
J'oubliais la nécessité des sillons. Ils font pousser des bêtes qui attaquent aveuglement. Et ta rose n'a pas fait exception, ses épines m'ont transpercé sans égards pour mes cris. Je croyais la nature douce et réconfortante, elle était violente et sans scrupule aucun. Derrière l'arbre aux couleurs d'automne, il y avait les rongeurs, les cloportes, les maladies.
J'ai touché les carapaces des insectes, ils sont entrés dans mon organisme et ont dévoré ce que tu n'avais pas, cette pompe qui se soulève et s'abaisse, de plus en plus mal, jusqu'à tout lâcher : la tête aux yeux verts, ses mains d'aristocrate et la sensation d'étouffer de larmes et d'amour.
D'accord, tu m'as oublié. Et il est inutile de rabâcher des souvenirs, tu me l'as fait comprendre.
Mais il y a une chose que tu n’as pas oubliée, Riff. Tu connais mes gestes et mon corps mieux que quiconque, tu sais quelle odeur il a lorsqu’il a mal. Là, même si tu n’es plus à moi, tu arrives, comme une mécanique cassée mais qui n’oublie pas son parcours, à poser l’index sur ma joue.
A chaque fois c’est quelque chose qui revient, une bribe de cris fous dans la nuit, une langue maculée de crème dans une oreille, un regard vert et la sensation perdue d’avoir touché le ciel.
god child: cain hargreaves,
1-5: toucher