Titre: Far, Far Away
Auteur: chibi_usagui
Jour/Thème: 24 novembre - c'est quand qu'on arrive ? + enfantillages
Fandom: Saint Seiya
Personnages : Hyoga, Camus
Rating: PG
Disclaimer : Tout à Masami Kurumada, Shueisha, Toei.
Participation au vote de fin de mois : Non
Far, Far Away
Hyoga, fatigué du long voyage entre le Japon et la Sibérie, sauta sur le quai gelé avec souplesse, ravi de se dégourdir enfin les jambes.
Un employé du Transsibérien lui rendit sa petite valise, et le jeune blond renifla avec joie l'air pur et la neige froide de son pays.
Il était chez lui. Pourquoi Mama avait-elle voulu quitter l'endroit où ils vivaient si heureux ?
Il n'eût pas le temps de s'attendrir sur ses souvenirs, car déjà quelqu'un l'attendait.
Le futur Cygne déglutit devant l'adolescent à l'expression hautaine et sévère, qui le dévisageait en silence de ses yeux saphir.
Des yeux beaux, profonds, aux longs cils doux mais sans la moindre trace de chaleur.
Hyoga remua un peu son nez, déstabilisé par la raideur de l'accueil.
- Je suis Camus, Chevalier d'Or du Verseau. Tu es bien Hyoga ?
- Ou… Oui… Monsieur…
- Oui Maître. Et n'avale pas tes mots comme ça.
- Pardon, Mon… Maître… s'excusa le blondinet, figé.
Le Chevalier eût un sourire si bref que Hyoga pensa un instant avoir rêvé, mais cette illusion changea tout et il reprit confiance.
- Et bien, en route, il y a quelques kilomètres jusqu'à l'Isba. Avec un peu de chance nous arriverons pour midi.
Hyoga souleva sa petite valise, prêt à tout, et il chemina promptement derrière la longue chevelure vert d'eau de son nouveau Maître, qui était salué avec considération par les rares villageois croisés.
- Et arrête de faire cette tête, je ne mange pas les enfants, l'informa le ton glacé de l'adolescent, amusé malgré lui mais qui se gardait bien de le montrer.
Milo du Scorpion avait-il raison de l'accuser d'avoir une face austère de croque-mort constipé ? Peut-être. Mais ça l’arrangeait.
- Non, bien sûr Maître, s’empressait respectueusement le gamin.
Camus repartit vivement en direction de la plaine blanche et solitaire qui s’étalait à la sortie du village, et Hyoga s'efforça de ne pas se laisser distancer. Il entama timidement une conversation à laquelle le Verseau répondait par monosyllabes.
***
Au bout d'une heure, le babillage incessant de Hyoga se tarit et un Camus aux oreilles bourdonnantes en remercia Athéna. Le petit lui rappelait un peu Milo, câlin, collant, geignard et horriblement bavard.
Dangereux ça.
Trop pour l'insensibilité qui devrait caractériser son enseignement.
- C'est quand qu'on arrive ?
- On dit, quand est-ce qu'on arrive, Hyoga.
- Oui Maître, approuva l'enfant dans un réflexe de disciple qui allait le suivre pour fort longtemps, si pas toute sa vie.
- Vois le bon côté des choses : tu n'es pas dépaysé, la Russie est ton pays. Tu connais la langue et tu es habitué au froid.
Le petit blond reprit aussitôt de l'allant, et mis en train par cette simple phrase, il trottina plus vite dans la neige.
- Vous venez aussi de Russie, Maître ? Votre accent est un peu bizarre…
Camus soupira intérieurement : pourquoi avait-il relancé le gamin ? Isaak et son bavardage perpétuel lui suffisait. Mais au fond, c'était une excellente chose : ils parleraient ensemble et le laisseraient tranquille.
- Maître ?
- Je suis français, révéla le Verseau, et ce serait la dernière information personnelle qui lui échapperait avant un long moment.
- Oh ! fît le petit blond, cherchant aussitôt à visualiser ce pays sur une carte de géographie mentale.
Cet exercice ne dura point, les pieds de l'enfant s'alourdissant de plus en plus, et le ramenant à la cruelle réalité.
- C'est encore loin, Maître ? réinterrogea soudain Hyoga avec espoir.
- Une heure, l'anéantit sans scrupules notables l'adolescent, avec un très léger sourire en coin.
Une grosse masse de buée froide s'exhala de la petite bouche aux lèvres devenues bleues du Russe. Déçu, il se tût.
- Devenir Chevalier te demandera bien davantage d'efforts que cette petite promenade par beau temps, cingla froidement Camus,
- Oui Maître.
- Pourquoi veux-tu devenir chevalier, au fait ?
Hyoga s'exalta soudain, les prunelles en forme de saule-pleureur, et raconta l'histoire tragique du naufrage et de sa mère enfouie dans un linceul de glace.
- Alors tu mourras, trancha le onzième gardien, exaspéré par un tel motif personnel et sentimental.
Saisi, le gamin continua de le suivre en silence, ses yeux limpides arrondis de stupéfaction.
Camus, lui, grinçait des dents. L'enfant le renvoyait trop sa propre histoire, à ses propres motivations, à sa propre faiblesse. Il avait appris à temps à geler la plus grande partie de ses sentiments. Mais ce gosse là… Le Verseau ne le voyait pas occulter la moindre sensibilité. Dommage.
Il espérait se tromper.
***
- On est presque arrivé ? implora une demi-heure plus tard le timbre devenu faible du nouvel apprenti.
Il restait accroché obstinément par la moufle au poignet en fourrure du manteau du Français, et Camus, qui avait refusé que le petit le prenne par la main, se secoua de son emprise avec impatience.
Non, mais il n'accompagnait pas un petit frère à une rentrée scolaire non plus… Son deuxième disciple allait lui donner plus de mal que l’audacieux Isaak, l'adolescent en était sûr et certain.
Un choc mou le fît se retourner. Hyoga gisait de tout son long dans la neige virginale, ses mèches blondes nimbant son capuchon, et Camus jura dans sa langue natale. Il s'accroupit à côté du gamin pour lui donner une poussée réprobatrice.
- Allez, debout !
- Mama, mama… geignit pour toute réponse le petit Russe, qui ne paraissait plus qu'à moitié conscient.
- Et allez, ça commence bien, grommela le Chevalier d'Or, bourru. Relève-toi, sinon je te laisse là et tu mourras de froid dans la neige.
Aucune réaction à ses paroles sympathiques, et Camus soupira.
Etait-ce en souvenir de sa propre arrivée dans cette contrée hostile que Camus releva doucement l'enfant ?
En souvenir du petit garçon grelottant et venant de se séparer de son seul ami que Camus termina le voyage en portant son récent disciple dans ses bras sans plus le bousculer ?
Le Verseau aurait congelé celui qui se serait avisé de lui poser la question.