3 février - C'est vraiment toi ? - Jeux d'enfants

Feb 03, 2009 16:50

Titre : Les quantités négligeables.
Auteur : KTL
Jour/Thème : 3 février - C'est vraiment toi ?
Fandom : Jeux d'enfants.
Personnage/Couple : Christelle, la femme de Julien, Sexy Sergueï, le mari de Sophie, et Sophie/Julien en arrière-plan, bien sûr.
Rating : PG
Disclaimer : Tout à Yann Samuell et au Studio Canal.
Notes : A partir du moment devant l'hôpital, soit à la toute fin, soit spoiler sur tout le film. Dans le genre "personnages oubliés d'un fandom lui-même oublié", je pense que c'est pas trop mal, parce que même si le fandom est plutôt connu, j'ai jamais croisé de fic dessus. (mais j'ai jamais vraiment cherché, en même temps)
Vote de fin de mois : ... on verra.


         Christelle regarde cette femme, cette presque inconnue dont elle s’est évertuée à oublier l’existence mais dont elle ne pouvait effacer l’absence, prendre sa place. Elle aimerait la rouer de coups en lui disant « C’est vraiment toi ? Tu oses revenir après dix ans, tu oses prendre ma place comme si de rien n’était ? ». Mais ça n’aurait pas de sens, parce que Christelle sait bien que c’est déjà trop tard.

Sophie s’est jetée sur Julien comme on protège un enfant, repoussant son mari et sa violence sur le côté, et le visage de celui-ci, ce visage que Christelle a vu tant de fois en couverture des magazines ou à la télévision, ce visage se vide de toute expression alors qu’il comprend qu’il vient d’être abandonné. Abandonné comme elle l’est, laissés tous deux sur le carreau comme quantité négligeable.

Il regarde sa femme se plaquer en travers du corps d’un homme qu’il ne connaît pas et il sait que c’est la fin, se dit Christelle ; du moins, si son QI est ne serait-ce que moitié aussi élevé que son nombre de buts sur l’année, il doit le savoir.

Christelle regarde Sophie prendre sa place et elle pleure, car elle sait bien au fond que ce n’était pas sa place. Elle l’a juste gardée chaude pour Sophie et ses caprices pendant dix ans. Sophie réintègre l’endroit tout contre Julien qu’elle n’aurait jamais dû quitter et Christelle se maudit de n’avoir pas compris, de n’avoir pas voulu comprendre. C’était facile pourtant. Facile de voir que Julien n’était pas heureux, facile de voir qu’elle n’était rien pour lui et que les enfants n’étaient jamais qu’une extension de plus de ce bonheur en kit dont il ne voulait pas, dont il n’avait jamais voulu. Ni eux ni elle n’ont jamais eu la moindre importance ; et pourtant il les aimait, il les aimait autant qu’il le pouvait, mais ce qu’il pouvait n’avait jamais été assez. Sophie avait son cœur entre ses mains déjà ce jour-là à l’église, et elle ne l’a jamais lâché, tout comme cette foutue boîte par terre à côté d’eux.

Cette foutue boîte, symbole de leur amour et d’une vie gâchée.

Christelle regarde Sergueï, et corrige mentalement : une vie, peut-être deux.

Il la fixe en retour, de l’air perdu de celui qui attend une explication et peu importe de qui elle vient. C’est tellement pitoyable que Christelle essuie ses larmes et hausse les épaules. Elle se dirige vers lui, ignorant la pluie et son mari gisant dans une flaque :

« -Inutile de chercher à comprendre, fait-elle à Sexy Sergueï. Ils ne vous expliqueront pas. Raccompagnez-moi plutôt. Mes enfants m’attendent et je pense que puisque leur père ne reviendra pas ce soir, s’ils peuvent voir un dieu vivant en vrai, ça les distraira un peu. »

Sexy Sergueï est obéissant, ou alors trop abruti pour penser à répliquer. Il lui ouvre la portière avec la galanterie d’un homme assommé, puis suit ses indications jusqu’à la maison qu’elle partageait ce matin encore avec l’homme qu’elle aimait, signe des autographes aux enfants surexcités, regarde leur mère leur mentir et a envie de pleurer.

Sur le parking de l’hôpital, Sophie et Julien, indifférents au malheur d’autrui, s’embrassent à en mourir, exactement de la même façon qu’ils s’aiment.

Mais peut-être, peut-être, que cette fois-ci ils s’auront s’aimer suffisamment pour vivre. Parce qu’une vie à s’aimer, se dit Christelle, c’est bien ce qu’ils leur doivent, à elle et aux enfants et à Sergueï, pour oser se montrer aussi fous, aussi irresponsables, et aussi amoureux.

C’est bien ce que Julien lui doit pour s’être moqué d’elle aussi longtemps.

Sexy Sergueï est au moins aussi malheureux qu’elle et il est en train de vider la bouteille de whisky que les collègues de Julien lui ont offert pour sa cinquième année dans la boîte. Christelle le laisse faire. Elle s’en fout et Julien n’ira certainement pas réclamer ça.

Christelle aimerait hurler mais elle n’y arrive pas et ça n’a plus d’importance. Quand Julien arrive à l’aube pour faire sa valise, elle lui flanque une gifle et il la regarde, dégrisé, comme il ne l’a jamais regardée :

« -C’est vraiment toi ? » demande-t-il, alors elle le frappe encore pour si mal la connaître. Il ne lui présente pas d’excuse, mais il sourit et cette fois elle le laisse passer. Il ignore Sexy Sergueï qui ronfle sur le canapé et monte prendre deux trois vêtements et quelques livres. Et son anthologie d’Edith Piaf. Bien sûr. Christelle comprend maintenant. Elle se marre. Il lui sourit à nouveau et pour un peu elle lui pardonnerait tout, mais c’est encore trop tôt pour ça, alors elle se force à faire un peu semblant d’être vraiment énervée alors qu’elle seulement triste et le fiche dehors. Ça le fait rire, et ça fait rire Sophie qui l’attend, installée sur les marches de la porte dans sa robe de soirée rouge tâchée.

Christelle s’assoit contre le mur du séjour et regarde Sexy Sergueï dormir sans trop savoir ce qu’elle va faire de lui quand il se réveillera.

C’est drôle comme la vie est faite de hasards qui n’en sont pas ; hier encore, si on lui avait dit qu’elle aurait l’idole de la nation bourrée dans son salon, non seulement elle ne l’aurait pas cru mais ça l’aurait fait rire. Maintenant, ça lui semble juste logique.

Bah, fait-elle en buvant ce qu’il reste de whisky directement au goulot, Julien n’a jamais été cap de l’aimer pour de bon, de toute façon.

fevrier 09, jeux d'enfants

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