Titre : Ma vie rêvée.
Auteur : Namoony
Couple : Helen Magnus, John Druitt
Fandom : Sanctuary
Rating : G
Thème : #6, "Entre le rêve et la réalité"
Disclaimer : Damian Kindler, Syfy
Note : RAS cette fois.
Helen fut réveillée par la caresse d’une mèche de cheveux sur sa joue. C’était si doux, si léger, qu’elle crut un instant l’avoir rêvé. Elle entrouvrit les yeux, juste assez pour être éblouie par l’éclat doré du soleil. En souriant, elle se retourna dans son lit, enfouissant son visage dans le douillet coussin de plumes. Ses cils glissèrent sur la soie, et elle laissa une odeur fleurie envahir son nez. Le visage toujours caché, elle ouvrit les yeux, complètement réveillée.
Le soleil, dans une chambre dont les rideaux avaient tirés par elle-même ? Une taie de soie ? Un coussin en plumes ? Helen n’était pas chez elle.
Elle rejeta ses couvertures d’un coup sec et se redressa. Le choc lui coupa la respiration. Elle était bien dans sa chambre, certes… mais celle où elle vivait avant d’être immortelle. Elle entendait les bruits de la rue avec une netteté qu’elle jugea surnaturelle : raclements des sabots de chevaux sur les pavés, les cahots des roues d’une calèche, les voix des vendeurs ambulants… Même l’odeur la transportait à une autre époque. Elle n’était plus dans le Sanctuaire.
Helen se pencha pour sortir du lit, et l’éclat du soleil frappa de nouveau ses yeux. Elle se figea. Ce n’était pas l’astre du jour. C’était une mèche de ses propres cheveux, blonds et bouclés. Elle l’effleura du bout des doigts. Elle était douce, parfumée. Mais blonde. Or, Helen savait parfaitement qu’elle était brune lorsqu’elle s’était couchée la veille.
Elle se frotta les yeux. La chambre, les odeurs, le bruit… C’était un mauvais rêve, forcément. Des réminiscences d’un passé qu’elle avait profondément enfoui dans un recoin de son brillant cerveau. Des images perdues surgirent devant ses yeux. Son père. Ses études. Ses expériences. Sa première rencontre avec un anormal.
C’était impossible. Helen se leva d’un bond et frémit au contact de ses pieds nus contre le sol froid. Elle parcourut les quelques mètres qui la séparaient de la fenêtre avec fébrilité, et attrapa les poignées. Elle hésita alors. Voulait-elle vraiment savoir ? Etre sûre ? Peut-être n’était-ce après tout qu’une mise en scène, une mauvaise farce. Etait-ce son anniversaire ? Transformer une pièce, enregistrer des sons, colorer des cheveux… c’était à la portée du premier venu. Mais toute une ville, cela semblait…
- Oh, Helen, tu es enfin réveillée !
La scientifique se retourna au son de cette voix. Impossible !
- On dirait que tu as vu un fantôme…
Pas un fantôme, non… Pire que cela. Pourquoi était-il habillé de cette façon ? Que voulait dire cette coiffure insensée ? Et ses yeux, son sourire… Non, c’était tout simplement impossible !
- Helen, est-ce que ça va ?
Sa voix était à présent teinte d’une réelle inquiétude. Quand il s’approcha d’elle, elle se protégea d’instinct avec une main devant elle.
- John, qu’est-ce qui se passe ici ?
John Druitt sembla sincère lorsque ses yeux s’écarquillèrent de surprise. Une grimace déforma ses lèvres, mais il se reprit aussitôt.
- Tu as encore eu une crise ? demanda-t-il, peiné.
- Une crise ? De quoi parles-tu ?
L’homme s’assit sur le lit, et sourit tristement. Son visage était ravagé par le chagrin, et Helen se sentit soudainement coupable, sans savoir pourquoi.
- Les enfants voulaient te dire bonjour, j’ai bien fait de les retenir.
- Les enfants ?
- Oui, Ashley, William et Grégory. Tu te souviens d’eux, n’est-ce pas ?
- Je me rappelle d’Ashley, bien sûr !
- D’accord. C’est bien. Très bien. C’est mieux que d’ordinaire.
- D’ordinaire ? John ! QU’EST-CE QUI SE PASSE ICI ?
Le sourire de Druitt s’éteignit alors qu’un voile de tristesse passa devant ses yeux. Il regarda le sol en joignant les mains, et soupira.
- Helen, tu… Tu es malade. Ton père a diagnostiqué une rare forme d’amnésie partielle.
- Tu dis n’importe quoi ! Je n’ai rien oublié du tout, je me rappelle de tout. De tout, tu entends ?! Et je sais très bien que tout ceci n’est qu’une mise en scène.
- Tu crois encore que tu vis au 21e siècle, n’est-ce pas ?
- Nous sommes au 21e siècle ! Tu ne peux pas me faire croire que je suis de nouveau dans le passé, je sais d’où je viens.
John soupira encore, l’air las.
- Ta maladie te fait croire des… choses. Parfois, tu es là, et quelque fois -comme maintenant, tu sembles vivre une autre vie. Tu es « ailleurs ». Tu parles de futur, d’anormaux, de New-York. On ne comprend pas.
- Nous sommes des anormaux, toi et moi ! Et je suis sûre que tu es derrière tout ça, oh oui John, c’est bien ton genre de me faire souffrir ainsi.
- Arrête Helen ! s’emporta Druitt. Je ne souhaite que ta guérison, tu n’as pas idée du mal que tu nous fais à tous !
- C’est faux, tout ce que tu dis est faux ! Nous sommes au 21e siècle, et tu es parti ! Je vis à New-York dans le Sanctuaire, et Ashley… Ashley est morte !!!
La voix d’Helen se brisa en prononçant ses derniers mots. John n’avait pas bougé, une étrange lueur dans les yeux. Cela ressemblait à de la douleur, teintée d’inéluctable, et de résignation.
- Tu n’as pas l’air surpris de ce que je t’ai dit, dit Helen.
- Helen… soupira John, c’est le même discours que tu racontes à chacune de tes crises. Ashley est bien vivante, ainsi que ses frères. Je peux la faire venir si tu le souhaites.
- NON !!!
La scientifique s’adossa à un mur, désemparée. Elle savait très bien quelle était sa vie, et elle ne pouvait croire à cette mise en scène. Elle se souvenait de tous les jours de son immortalité, de toutes les rencontres et les pertes. Elle ne pouvait pas avoir tout inventé. Et pourtant… Cette chambre, le visage de Druitt, et jusqu’à l’odeur, tout la ramenait à sa jeunesse londonienne. Ses mains se crispèrent sur son ventre, là où Ashley avait grandi… Se pouvait-il qu’elle ait enfanté sans s’en souvenir ? Non, c’était impossible ! Ce n’était pas un rêve, mais ça y ressemblait. Jouait-on avec son esprit ? Il fallait qu’elle donne le change.
- Qu’est-ce qui m’arrive, John ? murmura-t-elle.
Druitt se leva, et s’approcha doucement d’elle. Il posa une main sur sa joue avec tendresse, et l’attira dans ses bras. Helen retrouvait la chaleur de son contact, tel qu’elle le connaissait. Elle ferma les yeux alors qu’il parlait :
- Nous allons trouver une solution, je te le promets. J’ai fait le serment de te protéger à n’importe quel prix quand nous nous sommes mariés, et je ne faillirai pas.
- Nous sommes mariés…
- Et nous avons trois beaux enfants. Grégory va bientôt avoir six ans.
- Je suis… A quoi ressemblent mes journées ?
- Tu es la plus brillante scientifique de notre époque. Quand tu seras guérie, tu pourras recommencer à travailler avec ton père. A voyager à travers le monde pour rencontrer des spécialistes, aider les gens, trouver des remèdes aux épidémies.
Helen respira lentement. Cette vie-là était tentante. Avoir un aperçu de ce qu’aurait été son existence si elle n’avait pas mis le pied dans le monde des anormaux laissait un goût amer dans la bouche. John et elle n’auraient jamais été séparés, il n’aurait pas commis ces terribles meurtres, Ashley aurait vécu et aurait eu des frères. Et elle serait restée la brillante scientifique qu’elle était, toujours attachée à une noble cause.
Mais elle savait aussi que personne ne pouvait faire machine arrière. Elle avait fait des choix qui l’avaient amenée à ce qu’elle était. Bons ou mauvais, ils avaient façonné sa vie.
Comment décider ? Ce qu’elle vivait à cet instant était sans conteste un rêve ou une hallucination. Ou bien son autre vie n’était-elle que les tristes restes d’une maladie psychologique ? Devait-elle se battre pour revenir à son époque, ou bien continuer dans les bras de John et accepter d’avoir la vie dont elle avait autrefois rêvé ?
Ce choix… elle décida de le remettre à plus tard. La réalité s’imposerait toujours trop tôt.